orphelins de l'Éden

3.31.2011

au grand

Le tissu serré qu'est l'univers a décidé que ces jours-ci, il m'enveloppait d'un peu plus près. Les signes de cohérence se multiplient et je n'ai d'autre choix que de me laisser aller à cette agréable impression d'être à ma place, au bon moment.

Après les rêves, les coïncidences et l'intuition aiguisée sont venues densifier la trajectoire de la synergie qui s'échange aussi clairement qu'une conversation téléphonique.

Moi réceptacle recueillant le code morcelé, moi analyste parvenant à coller les pièces d'un puzzle pas du tout tiré par les cheveux, moi émerveillée par cette complicité ultime.

Il faut croire que le dégel affûte mon sixième sens ou serait-ce que mon corps libéré du mal nocturne s'ébroue dans cette énergie qui circule à flot à nouveau.

Peu importe, l'ivresse de renouer avec la source est encore et toujours cet élixir dont je ne me lasserai absolument jamais.

3.29.2011

glitch

Ce peut-il que les rêves se construisent aussi de ce qui viendra le lendemain.

Quand je regarde le film Incendies hier soir, c'est l'étrange impression que j'ai lorsque, dans une scène, le notaire mentionne le testament complexe d'un homme dont les trois enfants Québécois avaient appris à sa mort qu'il menait trois vies conjugales simultanément, ce qui lui avait donné huit enfants en tout. Exactement le nombre dont il était question dans mon rêve, nous trois plus cinq autres à l'étranger.

Anodin court-circuit temporel qui garde l'esprit éveillé, à l'affût des lapins du Magicien bien dissimulés.

3.28.2011

vie parallèle

Quelqu'un m'avait refilé le tuyau: tu trouveras ton père au restaurant à la croisée de la 17 et de ton rang, il est revenu vous voir. Je me suis rendue au premier deli et là, deux filles m'ont dit qu'en fait, aucune nourriture n'était préparée sur place, comme si mon père était devenu un cuisinier. En continuant sur le chemin de ma maison d'enfance, je me suis arrêté à un comptoir de restauration rapide, le genre Subway, et il était là, debout derrière la caisse enregistreuse, tout de noir vêtu, palette de l'uniforme y compris. J'ai éclaté de rire.

J'ai pensé: mais arrête de rire, tu vas blesser son orgueil. Quand en fait, cette euphorie, c'était l'immense bonheur de le revoir.

Il quitta son poste pour nous parler, parce que mes soeurs venaient de se joindre à moi, ainsi qu'une jeune femme aux traits autochtones qui étaient accompagnée d'un homme et d'un bébé. Mon père lui demanda de se rendre à la maison, qu'il irait la voir à son tour, après avoir expliqué quelque chose à mes soeurs et moi.

Je compris que cette jeune femme, c'était une autre de ses enfants. Il nous annonça que pendant toutes ces années où il avait disparu de nos vies, il avait en fait voyagé. Il nous montra un globe terrestre sur lequel des localisations avaient été marquées d'une punaise. Il avait eu cinq autres enfants, à part nous trois. Un de ceux-là avec une certaine Nadia rencontrée dans un pays près de l'Équateur avec laquelle il avait passé une seule nuit. Il ajouta qu'il n'avait même pas vu Nadia complètement nue.

5 h 51. Bo. décide de commencer notre journée. Le fil se rompt. L'image du globe aux punaises vient de ce que M. m'a montré hier soir juste avant que nous nous mettions au lit: les points de livraison sur une mappemonde d'un journal que Radiohead rend disponible pour ses fans à la sortie de leur nouvel album demain. Mais tout le reste, il vient d'où. Chose certaine, mon rire presque incontrôlable, c'est cet immense bonheur de te revoir, toi mon papa décédé.

3.25.2011

chasser la paresse

De l'intérieur, le soleil domine. Une fois passé le pas de la porte, le vent l'emporte. Les joues de garçon rougissent, mordues par le froid, mais il s'en fout, d'aligner les pas le comble de joie. Seul avantage de cette température, ton costume rembourré qui amorti tes chutes lorsque tu t'étales sur tout ton long, par en avant. Au fond, l'avantage te joue peut-être un tour en gênant tes mouvements. Alors c'est bon, vivement le printemps.

Petit retour sur mon mal de dos. Simplement, il s'est résorbé d'environ 90 %. J'évite la douleur résiduelle en dormant surtout sur mon côté gauche. Si je tente de longs blocs sur mon dos ou sur mon côté droit, je me réveille avec une brûlure inconfortable plutôt qu'avec le poignard qui m'a si longtemps bousillé le dodo. En résumé, Y., mon nouvel ostéo, est d'une efficacité redoutable.

Petit retour sur le concert de jeudi soir dernier. Sublime. Une voix caverneuse, l'autre cristalline. Des musiciens chevronnés à l'inventivité fascinante. Des pièces inédites mur à mur. Un vrai délice pour les mélomanes qui nous sommes.

Petit retour sur un film vu hier soir. The Fighter, basé sur des faits vécus, est surréel tellement il prend racines dans des drames ordinaires de petites gens extraordinaires. Un scénario bâti de main de maître.

Petit saut dans le temps. Dans une semaine, je me remets au yoga en groupe. J'ai déniché des cours offerts gratuitement pas trop loin du paradis. Mon corps de bois redeviendra liane. Je me le dois.

3.23.2011

creux

Demain soir à pareille heure, je serai bien installée dans une salle de spectacle à admirer les talents de Timber Timbre et de Patrick Watson, deux groupes musicaux qui font planer. Il y a si longtemps que je n'ai assisté à semblable manifestation artistique que je ne me souviens plus la dernière fois. Peut-être était-ce Beck au St-Denis.

Une petite saucette culturelle, ça fouettera sans doute mon inspiration. Mon écriture souffre du syndrome du jour de la marmotte ces temps-ci. Over and over again.

3.21.2011

jour dit

Printemps, tu reviens avec un sursis hivernal. De beaux gros flocons collants tombent de ton ciel vers la fin de la journée et la lumière grise s'accroche partout en lueur argentée dans le décor. Cette beauté ravive presque la nostalgie de la première bordée, mais demain, dans quelques semaines, l'apparition vert tendre des bourgeons réveillera nos sens qui s'étaient languis et la chaleur qui fait pousser la métamorphosera en Dame tout aussi resplendissante. Nouvelle saison, tu ne perds rien pour attendre.

3.19.2011

vite et lentement

Quatre mains pour modifier le body de Scoot. Toute la journée, confinés dans la cabanon où le cyclomoteur dort, M. et son ami Al. ont déboulonné, boulonné, creusé leurs cocos devant les embûches rencontrées, persévéré malgré tout, et terminé leur journée satisfaits, à siroter une bière dans le bureau. Une vraie journée de gars. Pouce ensanglanté pour cause de coup de marteau dessus compris.

Pendant ce temps, j'ai veillé sur toi. Après une longue sieste de trois heures, nous sommes sortis deux heures durant pour aller parfaire ta marche extérieure dans cet environnement de dégel et d'étrangers affables, encore au petit pont de bois du grand parc, là où la pente d'une extrémité de son arc t'a tenu occupé à la descendre et la remonter une quarantaine de minutes.

De retour au paradis, ton nouveau truc, c'est de t'éterniser sur le petit pot. Quand nous te demandons si tu as fini, c'est non, non, non. Tu restes là et moi, je vaque parfois à d'autres occupations pour revenir aux trente secondes te poser à nouveau la question. Enfin, au bout de plusieurs minutes, tu acceptes de revenir sur la table à langer pour te faire remballer le popotin.

Aussi, tu grimpes. La chaise berçante pourtant haute sur ses patins dans ta pièce de jeu, la chaise dans la cuisine pour prendre tes repas, les fauteuils dans le bureau. Beau singe d'amour. Ton agilité est belle à voir. Que de plaisir tu auras à redécouvrir le petit parc, de moins en moins enfoui sous le manteau hivernal.

3.17.2011

deep

Journée de chants de cardinaux, de chiens rencontrés au grand parc, de garçon qui marche sur le pont de bois du grand parc, de garçon qui dit "non-non" en plus de secouer la tête, de garçon qui exprime de plus en plus ses moments de frustration en lançant des objets ou en cherchant soit à me tirer les cheveux, soit à me pincer très fort la peau du cou. Eh oui, nous apprenons que la docilité de Bo. a ses limites. Vaincre ces explosions violentes par l'amour et la patience. Pas toujours facile donc peser play dans ma tête pour faire rouler ma cassette mantra préférée: c'est juste une phase.

Journée de coïncidence conversationnelle, si je puis formuler ça ainsi, considérant que ma lecture de cet après-midi était un tête-à-tête entre l'auteur et moi.

Je m'avance peu à peu dans ce livre rédigé par Alexander Sutherland Neill, psychanalyste et pédagogue décédé en 1973, intitulé Libres enfants de Summerhill, Summerhill étant une école fondée par cet homme en 1921 qui est aujourd'hui dirigée par sa fille, Zoë Neill Readhead. En gros, on y apprend la philosophie toute particulière de cet environnement éducatif pas tout à fait comme les autres. À Summerhill, la liberté n'est pas seulement qu'un beau mot écrit en blanc sur une branche de laurier tenue dans le bec d'une colombe imprimée sur un t-shirt, la liberté, c'est le mot d'ordre qui régit les lieux autogérés. Les enfants qui fréquentent l'établissement ont, entre autres, le choix de se présenter en salle de cours ou de jouer dans un recoin de la propriété pendant des jours, des semaines voire des mois s'ils en ont envie. Summerhill, c'est beaucoup plus qu'un lieu d'anarchie. En fait, c'est tout le contraire. C'est un microcosme où des assemblées générales ont lieu à tous les samedis soirs, moment où tous les membres de cette communauté se réunissent pour prendre des décisions collectives, qu'ils votent à mains levées, en vue d'un fonctionnement de groupe harmonieux. Si vous êtes intrigués, aller au fond de la chose en dégotant une copie de ce bouquin devenu "un classique de la pédagogie libertaire" selon l'Encyclopédie Universalis.

Pour en arriver au fait de cette coïncidence, je commence par résumer brièvement l'essence du chapitre parcouru pendant la sieste de garçon, celui portant sur la sexualité. Neill, en bon freudien, prétend que la sexualité est la base de l'identité individuelle, que cela relève de l'instinct, et que de provoquer des associations culpabilité-sexualité dans l'esprit des enfants les transformeront en adultes antivie, antivie dans le sens de haine, de tristesse, de négativisme, de méchanceté. De taper la main d'un enfant qui palpe ses parties génitales par exemple, de le punir parce qu'il jouait au docteur avec des amis, d'utiliser le mot "sale" pour couper court à son exploration, de lui interdire, une fois devenu adolescent, toutes relations sexuelles sous le toit familial et j'en passe. En lisant tout cela, je me dis qu'il me faudrait aborder le sujet avec M., pour commencer à orienter notre rôle parental à ce sujet.

La coïncidence survient lorsque, pendant que nous sommes tous les trois installés dans la salle de jeux de Bo. - sa future chambre -, M. me rapporte des propos qu'il a lus sur Internet aujourd'hui, une histoire de couple parents qui lance cette question: jusqu'à quel moment est-il correct de se promener nus devant nos enfants. M. me résume le contexte de la question - couple jugé par leurs familles respectives dans leur choix de ne pas cacher leur nudité à leurs enfants lors d'un bain ou d'un tour aux toilettes - et la réponse d'une professionnelle qui donne comme indice de bon moment ce changement qui s'opère chez l'enfant quand celui-ci recherche lui-même à préserver son lieu d'intimité, en gardant la porte de sa chambre fermée par exemple.

Je suis heureuse d'apprendre que M. et moi, nous sommes sur la même longueur d'ondes. Bo. pourra accueillir les expériences sexuelles qui l'attendent sur son chemin de vie, quel que soit son âge, sans crainte. Bien sûr, loin de nous l'intention de le pousser à expérimenter. Ce sera à lui de déterminer son rapport à l'intimité. Comme Neill, je crois qu'une exploration sexuelle infantile normale et libre évite bien des perversions futures. Un esprit sain dans un corps sain. Un corps incarné dans chacun de ses recoins.

3.16.2011

dans une femme

Hier, pour une grosse partie de la journée, je me suis retrouvée avec mes deux soeurs, dans un spa à Sainte-Adèle, pendant que garçon passait du bon temps avec sa cousine, ses cousins et ses grand-parents, ma mère et son mari, qui avaient si gentiment accepté de veiller sur notre progéniture - qui est aussi la leur soit dit en passant- afin que nous puissions, l'espace de quelques heures, redevenir des fillettes sans obligation.

Je dis fillettes parce que lorsque je me retrouve ainsi avec mes deux soeurs, seule avec elles je veux dire, je me sens enfant bien que nous soyons devenues des femmes depuis belle lurette. Rien à voir avec le fait que je sois la cadette des trois. Tout à voir surtout avec la dynamique que nous avons formée pendant mes premières années d'existence dans laquelle mon âme replonge avec naturel via le subconscient. Quelque chose de viscéral et de primitif comme l'écho d'une chose indéracinable.

Au fond, peut-être un peu à voir avec le fait que je sois la cadette des trois parce qu'à bien y penser, G., l'aînée, n'a, pour sa part, pas bénéficié de l'énergie de sa fratrie dès sa venue au monde comme j'ai pu le faire. Le bébé que je fus avait quatre coeurs battants bourdonnant autour de lui à partir du jour un et parmi eux, deux qui ressemblaient au mien en taille, ce qui me donna sans doute un petit boost pour assimiler rapidement et facilement l'esprit de groupe.

D'ailleurs, je sais que notre deuxième enfant, là où qu'il soit présentement - flottant dans la pure lumière ou se formant dans notre imaginaire - est déjà reconnaissant d'avoir pour grand frère Bo. Je sais aussi que Bo. l'attend avec impatience ce futur ajout grandiose à notre noyau nucléaire. Même s'il ne parle pas encore, même s'il est un garçon heureux, il veut un semblable à ses côtés. Ça, c'est la mère en moi qui le sens.

3.13.2011

plus que jamais

Pendant que je parle au téléphone avec F., notre ancien voisin d'en-dessous lorsque nous habitions encore Montréal, M. décide qu'il en assez de regarder à l'extérieur du paradis au travers de fenêtres crottées. Il remplit le sceau d'eau chaude et savonneuse, empoigne le squeegee, une guenille et, garçon sur ses talons, passe d'une surface vitrée à l'autre avec l'adresse d'un pro. Schlich, schlouch, eh voilà le travail.

Ce n'est qu'un des signes qui m'indiquent que M. a drôlement envie du printemps cette année.

Il a étrenné hier sa nouvelle paire de chaussures juste parce que le temps s'était un peu adouci. Il prétend que ses godasses anglaises sont imperméables. Moi je dis qu'elles sont en cuir, un point c'est tout. Ce qu'il faut comprendre, c'est que M. est du genre à a-do-rer ses pénates, du genre à les astiquer si une marque ose les salir. Alors, qu'il les porte par une journée boueuse, c'est que la douce saison le démange sérieusement.

Aussi, à compter du 15 mars, il pourra à nouveau enfourcher Scoot. Son barème au thermomètre pour se décider à le faire est 12 degrés en après-midi. Je crois qu'il a encore quelques semaines à attendre. Mais entre-temps, monsieur s'est commandé des pièces pour revamper son bolide sur deux roues. Samedi prochain, son ami Al. vient lui prêter main-forte et ensemble, ils concrétiseront ce que M. imagine en rêve - littéralement - depuis bientôt deux semaines.

Finalement, fin février, M. parlait déjà d'installer des pneus d'été sur Jasmine la Fit, qu'il fallait d'abord magasiner. Quelques recherches m'ont permis d'en dénicher des fabriquer au Québec, écologiques et économiques de surcroît. Des pneus verts pour notre sous-compacte, cela va de soi. Surtout qu'ils sont paraît-il utilisés sur toute la flotte de véhicules des ministères du gouvernement de Québec, en plus de celles des municipalités de Montréal et de Québec.

Qui sait, peut-être qu'à lui seul, M. réussira à faire bourgeonner tous les arbres du grand parc d'un coup. Ne jamais sous-estimer la force de la volonté.

3.11.2011

affirmation

Depuis une semaine, tu ne veux plus que manger assis à table avec nous, bien installé sur une chaise de grande personne, sans booster seat, non, non, non. Non, non, non de la tête, que ça aussi c'est du nouveau, en la secouant avec détermination.

Le oui, on y travaille encore. Le mouvement de haut en bas te donne plus de fil à retordre et quand tu t'y mets, il ressemble davantage à une rotation effectuée par un garçon qui vient de tourner sur lui-même pendant une grosse minute et demie, ce qui lui a fait perdre le nord. Mignon.

Autre signe de grand garçon, tu peux boire avec une paille en tenant la boîte de jus dans tes mains. Mardi, tu as maîtrisé l'aspiration au travers le tube de plastique et deux jours plus tard, tu as compris que tu pouvais gagner en autonomie en tenant l'emballage au complet pour te déplacer avec. Seule chose qu'il te reste à comprendre, c'est que tu n'as pas besoin de pencher le contenant comme pour un verre, surtout que tu risques à tout coup d'en faire couler partout. Essai et erreur. À ton âge, c'est encore plus vrai.

Le matin, à ton réveil, tu traverses l'îlet à quatre pattes, en passant par-dessus ton papa, ultime obstacle au bout de ton parcours, plus souvent que tu ne le contournes. Hier, ton petit body a escaladé sa tête de peine et de misère. Finalement, il t'a dépêtré le quatre pattes de son visage lorsqu'il s'est fait happer de plein fouet par l'odeur de ta couche lourde de pipi. Rigolo.

Une fois que tu touches terre, tu tentes toujours de m'éviter pour filer vers la cuisine. Tu sais que je t'apporte première chose à la salle de bain, là où tes fesses sont changées. Dernièrement, tu n'apprécies pas du tout le moment du changement de couches, même si je te dis que c'est l'occasion de te faire bécoter les cuisses. Aussi, j'ai commencé à t'encourager à me signer tes besoins avant qu'ils ne surviennent pour éviter de nous rendre au petit pot pour rien. Je suis confiante que tu finiras par faire le lien. À ce propos, j'ai l'intention de te retirer la couche dès le retour du temps chaud, histoire de te libérer et de te faire connecter davantage avec tes fonctions corporelles. Il paraît que toute période de bébé pas de couche pratiquée n'est jamais oubliée par l'enfant. Nous verrons bien, surtout que le gros indice qu'est ta protestation encourage ma décision.

Après le premier changement de couche, une fois que ton pyjama est retiré et que ton popotin est recouvert d'un lange de tissu, je te dépose sur le plancher. Là, tu t'épivardes un peu, courant bien sûr à la cuisine, faisant parfois un détour par le chambre à coucher, mais finissant par venir vers moi qui t'attends dans ta pièce, là où ton armoire à vêtements se trouve. Je t'incite doucement à m'y rejoindre pour t'habiller et tu finis par apparaître.

Ce sont des détails bien sûr. Mais à force de changements infimes, nos gestes de parents laissent s'épanouir les tiens d'enfant davantage, sachant que tu sais ce que tu peux. Que tu sais aussi ce que tu veux.

3.09.2011

du ciel

Deuxième rencontre avec mon nouvel ostéo Y. Les deux dernières nuits, la douleur était presque totalement éteinte. Je le lui dis, je vous l'annonce, je me le répète encore tellement j'ai peine à y croire. Mais croire, je veux beaucoup, beaucoup, beaucoup, me rappeler un sommeil sans poignard, une nuit d'abandon et de relâchement totaux.

Étendue sur la table, recevant mon traitement de ces mains bouillantes - d'ailleurs, je ne peux m'empêcher de le lui souligner -, écoutant le jazz en sourdine flottant à nous de l'autre pièce, je me sens gamine. L'espoir de retrouver la paix dans mon corps me soûle.

Y. pense qu'avant de fixer une autre rendez-vous, mieux vaut laisser le traitement faire son p'tit bonhomme de chemin. Il est si confiant que je ne peux m'empêcher de l'être avec lui. Je suis légère et insouciante. Autant que cette nouvelle neige qui tient bon l'hiver.

3.08.2011

au bout du compte

Après ta sieste, nous sommes allés au grand parc dans le but d'y rencontrer Oa. et Mx. Ne sachant pas à quelle heure ils y seraient, je me suis rendue là où je croyais avoir compris qu'ils passeraient peut-être, près du pont grillagé. Ne les voyant pas, je décidai de me rendre sur la place à côté du pavillon d'accueil pour te permettre de marcher sur une aire ouverte et plate.

Là, deux hommes âgés étaient attablés, profitant d'une douche solaire revigorante. Lorsque je stationnai BOB pour t'en extirper, l'un d'eux m'adressa la parole avec je ne sais plus quelle amorce. Sans doute quelque chose à voir avec le temps splendide parfait pour sortir garçonnet. Chose certaine, mon cerveau sélectionna dès lors le mode anglais.

Pendant que tu restas planté exactement là où je t'avais déposé, pour environ une quinzaine de minutes, les deux pieds comme pris dans du ciment, je poursuivis ma conversation avec ces deux amis de longue date qui fréquentent le parc presque à chaque jour clément.

Bl. et Tr. qu'ils se nomment. Deux hommes tellement complices qu'ils pourraient former la paire idéale d'une quotidienne comique américaine. L'un plus bavard que l'autre, l'autre encaissant avec un sage détachement les gentilles taquineries de l'un. Un duo à l'amitié éprouvée de toute évidence.

De par ta nature curieuse et observatrice, tu t'es contenté, ces premières longues minutes figé, à pivoter ta tête dans un angle de 180 degrés, passant de nous trois à un autre groupuscule installé sur un banc de l'autre côté de la place, incluant un poupon t'interpellant de ses pleurs et un labrador blond t'interpellant lui de son plein d'énergie, amusant ainsi le plus bavard de deux hommes, Bl.

Bl. qui a grandi dans une famille de six enfants pour en avoir lui-même cinq. Quand je lui demande combien de petits-enfants ont suivi, il me répond amèrement "only two". Dans son ton, j'entends un "pfff" critique et triste. Au fond, c'est une réaction de déception viscérale, une impression de lignage brisé, d'humanité hypothéquée. D'ailleurs, son complice Tr. cite une statistique: 1.6 enfant(s) par famille québécoise.

Cherchant à leur redonner un peu de joie au coeur, je balaie cette donnée du revers de la main et leur annonce qu'autour de moi, de plus en plus de familles s'agrandissent. Deux, trois et même quatre ou cinq enfants. Il y en a encore, surtout avec ce baby-boom. Les gens reprennent envie de fonder des foyers où s'épanouissent le futur d'un tissu social qui, je l'espère, aura l'air et la chanson d'un monde meilleur, sans prétention. Seulement avec de bonnes intentions.

Tiens, pourquoi ne pas commencer par reconnaître la place que devrait occuper les aînés dans notre société.

3.05.2011

tant qu'il y aura de la pluie

Toute cette eau qui est tombée du ciel aujourd'hui annonce le printemps et sinon, elle nettoya au moins les pavés glacés. Bo. ne la connaissait pas cette pluie sur son visage cet après-midi pendant les courses. Chaque goutte qui venait s'écraser sur ses joues, son front, ses lèvres, le bout de son nez, il la recevait avec étonnement. C'est froid, mouillé, ça vient de nulle part vraiment. Étonnant. Toujours à l'abri sous l'auvent de sa poussette ou sous la bulle imperméable qui recouvre celle-ci, dans la voiture ou au paradis, ce contact avec cette manifestation de la nature était sans doute le premier aussi direct. Encore tant de choses à expérimenter, tant de sensations à éprouver avant d'oublier l'émerveillement éveillé par tant de découvertes. Moi près de toi, je reviens à lui.

3.03.2011

humaine sous ma cape

J'ai contacté la clinique référée par mon amie de toujours Jl. hier après-midi et comme ça, en claquant des doigts, j'ai obtenu un rendez-vous pour le soir même avec l'ostéopathe de mon choix. Wow, magique. Annulée donc la rencontre qui devait avoir lieu demain avec S. O. parce qu'au final, je sais qu'elle n'aurait pu m'offrir de suivi que dans un autre mois et qu'avec Y., mon nouvel ostéo, j'ai déjà un second rendez-vous de booké pour la semaine prochaine.

Avec Jl., mon amie de toujours, nous nous demandons comment il se fait que malgré que nous nous parlions presque à tous les jours entre le lundi et le vendredi depuis plus d'un an maintenant parce que nous nous retrouvons toutes les deux en congé de maternité en même temps, nous nous demandons comment il se fait qu'elle ne m'ait pas référé cette clinique avant ce lundi. Pourtant, c'est un endroit auquel elle a envoyé son père l'été dernier pour soigner une lombalgie, un endroit qu'elle connaît donc depuis un certain temps, avant en fait que mon mal de dos ne commence. Mais voilà, dans la vie, il y a de ces mystères et que, blindée de mon positivisme fataliste, je sais que c'est pour une raison. Laquelle de raison, j'ai ma petite idée.

Disons que dimanche soir dernier, la veille de ce lundi où Jl. m'a parlé de cette clinique, M. a dû serrer les dents face à une moi renfrognée pas à peu près. Renfrognée parce que brûlée, épuisée, réduite en purée. M., mon chêne. Qui tient bon quand je tempête. Et qui m'aidera à décharger ce poids qui me scie en deux lorsque je veux me reposer profondément. Parce qu'il a vu mon masque d'invincibilité se lézarder. Parce qu'il connaît ma fragilité.

3.01.2011

in the light

Je suis affectée par de petits bobos ces jours-ci. Grosse fatigue depuis samedi, vague mal de coeur juste avant de me coucher hier, mal de tête en sourdine aujourd'hui. Je suis en manque. De sommeil de plomb. Toujours ce foutu mal de dos qui me vrille les lombaires au bout de six heures en position allongée. Heureusement, mon amie Jl. m'offre une lumière au bout de mon tunnel en me référant à une clinique d'ostéopathes qui font de l'urgence. Après huit mois à dealer avec ce coupe-dodo cauchemardesque, il est plus que temps d'en finir. C'est donc décidé, suite à mon rendez-vous de vendredi avec S. O., je passerai encore entre de nouvelles mains si le mal insiste pour me rire au nez.

Sinon, je file doux. Doux dans le sens d'économie de paroles et d'idées. Plus ça va, plus je me transforme en matière. Je réduis mon expressivité à son concentré. À force de longue plage de silence au quotidien, il me semble que d'être dans les mots parlés m'épuise plus rapidement. Écrire m'est aussi plus ardu. Mon autocensure est dans le tapis. Tout m'apparaît sous une lumière crue. Pas grand-chose pour dissimuler l'essence quand on évacue les conventions de socialisation. Alors vaut mieux se taire ou taire, c'est selon.

Je dis cela, mais en même temps, j'aime cette lucidité qui règne sur mon agir. Je me découvre une authenticité encore plus précise qui je l'espère, perdurera une fois ma réintégration sociale complétée. Moi qui n'ait jamais été fan des conversations météo, je suis maintenant celle qui observe poindre les leitmotiv personnels qui embourbent souvent plus qu'ils ne font réellement avancer les choses. Les miens inclus, de leitmotiv personnels. Dans ces cas, je préfère fermer mes yeux et offrir mon visage au soleil qui ragaillardit. Derrière mes rideaux, le feu l'emporte alors sur le trou noir.