orphelins de l'Éden

2.24.2010

à l'autel de notre cuisine

Garçon a chopé mon rhume. À plat et les yeux dans la graisse de bine pendant deux gros jours. J'ai compris que je l'avais contaminé lorsqu'il s'est réveillé lundi matin pour cause de nez bouché. Il avait bu à toutes les deux heures cette nuit-là et remué dans son sommeil comme jamais auparavant. Gros indices de combat. Heureusement, quelques nettoyages des voies nasales avec de l'eau saline, beaucoup de repos et l'air frais chargé d'ions négatifs d'hier ont suffi pour qu'il remonte la pente en champion. Aujourd'hui, ses sourires sont revenus, aussi nombreux qu'en temps normal, même s'il s'étouffe encore un peu quand il fait ses bruits de joie gutturaux que j'aime tant. Les soldats de son immunité sont bel et bien réveillés, pour le restant de sa vie. Fascinant.

Dehors, c'est comme si tous les anges des cieux avaient décidé de faire une bataille d'oreillers. Les plumes tombent à la pelletée, légèrement. Dedans, ça sent le poulet qui se fait chauffer la couenne. Ce soir, nous soupons volaille.

En véritable ménagère, j'aime accueillir mon homme avec un bon repas. En véritable gourmande, j'aime m'offrir un bon repas. Et depuis que Bo. est là, j'aime lui donner le meilleur par mon lait. Un véritable cadeau qui lui durera pour toujours car même s'il paraît que tous les laits maternels sont équivalent en ce qu'ils sont l'aliment parfait pour les nourrissons, je crois que de s'alimenter de manière optimale ne peut qu'amplifier les qualités de l'élixir. Je crois dans la puissance de la nourriture pour ma santé, celle de M. et ceux qui m'entourent depuis des années. Bien sûr que garçon doit bénéficier de cette valeur qui nous est chère et bien assez vite, il comprendra combien manger, chez nous, c'est vital. Une véritable religion. Surtout qu'il paraît que nous sommes ce que nous mangeons alors moi, je veux que mon fils soit le fruit de mon labeur quotidien à concocter avec reconnaissance des plats préparés à partir des fruits du labeur de ceux et celles qui cultivent notre planète. Un maillon de la chaîne fondamentale, parce qu'on ne vit pas seulement d'amour et d'eau fraîche. Il saura, il comprendra, il goûtera, il appréciera. Toute l'importance de la plus extraordinaire contrainte, tout le plaisir à y répondre par repas. Promesse de convertie.

2.22.2010

vache couveuse

Ce matin, Bo. a poursuivi sa nuit jusqu'à 7 h 15. Il y avait presqu'une semaine que monsieur ne voulait plus se rendormir après son boire de 5 h. Une semaine aussi qu'il buvait aux deux heures le jour. Eh bien, ce matin, il s'est écoulé quatre heures avant qu'il ne revienne au sein.

Boire. Un de ses besoins fondamentaux pour l'instant et j'ai l'honneur, moi, femme et mère, d'être son garde-manger. Tant et tellement que j'ai dû annuler ma présence à un souper de fête samedi soir dernier. Mon amie S. célébrait ses trente ans dans un restaurant sur l'avenue Mont-Royal à 19 h, mais parce que je n'avais pas pompé de lait, que je ne peux donc me séparer de mon têtard adoré et qu'en plus, ça donnait à l'heure de notre coucher, il m'a fallu me désister.

Pas pompé de lait depuis la mastite que je me suis tapée mi-janvier. C'est que je voulais me "sevrer" de mes coupoules, ces boucliers récupérateurs que je portais dans mes soutiens-gorge pour protéger mes mamelons douloureux. Mes seins - alors habitués de produire du lait constamment à cause du flot incessant provoqué par le port des coupes - sont devenus terriblement engorgés quand je m'en suis départies, et cerise sur le sundae, mes crevasses ont empiré au point où Bo. s'est mis à régurgiter du sang. Tout ça dans l'espace de trois jours. La douleur est devenue si intolérable que j'ai décidé de donner des biberons de formule - bio! - à garçon, le temps que j'arrive à tirer mon lait. Cette nuit-là, M. donna les biberons à Bo. pendant que je m'installais pour extraire le liquide précieux, une once à la fois. Le lendemain, une rougeur mangeait mon sein droit. L'infection s'était installée dans mes canaux lactifères. Deux semaines sous antibiotiques, mais surtout, remettre Bo. au sein absolument pour vider mes seins plus efficacement. Depuis, je n'ai pas retouché à la pompe.

Alors, je ne peux me séparer de garçon trop longtemps. Surtout quand monsieur décide de pousser à la vitesse des bambous. Je te coupe les ongles presqu'à tous les jours et comme ta pédiatre l'a dit lors de notre dernière visite où il a été déterminé que tu dépassais la courbe de croissance, tes ongles qui poussent de manière si fulgurante sont le reflet de ce qui se passe dans tout ton corps.

Grand, je n'arrête pas de dire combien tu l'es. Encore hier soir, dans la nuit, quand j'ai dû changé ton pyjama parce que ta couche avait débordé, j'ai réalisé qu'il me faudrait à nouveau trier tes tiroirs pour retirer les vêtements qui ne te font déjà plus. Une semaine qu'ils auront été là. Une semaine à boire aux deux heures, à en provoquer une nouvelle crevasse sur mon sein droit. Femme et mère, animale aussi.

2.19.2010

big bang

J'ai chopé un rhume. Le genre qui fait couler le nez sans arrêt en plus de le faire picoter. Le genre à faire larmoyer. Le genre à irriter le dessus de la lèvre supérieure à force de moucher et à faire éternuer violemment. J'essaie de ne pas m'inquiéter de contaminer Bo. Je pense plutôt de toutes mes forces à mon allaitement qui lui donne un système immunitaire béton. J'ai confiance.

Mon bébé koala. Monsieur est maintenant assez grand pour que je puisse sortir ses jambes de chaque côté de l'Ergo et toute la semaine, je l'ai vêtu en petit homme le jour. Beau coco. Mon coeur ne savait pas à quel point il battrait pour toi ni tout l'amour que tu fais jaillir. Il s'en doutait bien. Mais la puissance de ton être le souffle là où l'univers s'étire à l'infini.

2.17.2010

miaow

Les chats errants se multiplient. Ils rôdent dans notre cour, dans celles de tout le voisinage et ils copulent, en bonnes bêtes qu'ils sont. Hier encore, j'en ai vu deux nouveaux, deux "adolescents", plus tout à fait chatons, pas tout à fait chats. M. ne comprend pas ma panique grandissante face à ce fléau. Mais c'est qu'ils se reproduisent à une vitesse fulgurante ces félins non stérilisés. Les statistiques sur le sujet avancent qu'un couple tout mignon peut engendrer environ 15 000 chats dans l'espace de cinq ans!

Tout a commencé avec Mowgli, ce chaton gris recueilli de sous notre balcon à l'avant du paradis à l'automne 2008. C'est avec lui que j'ai commencé à m'inquiéter par rapport à la prolifération de ces animaux gracieux, mais territoriaux. Depuis, l'odeur d'urine empeste constamment dans nos escaliers d'entrée et le phénomène va en empirant vu le nombre de bêtes qui augmente de manière inquiétante. Il y a le gros noir à la tête énorme, la petite marbrée caramel et noir, le roux doux, le gris svelte, les deux adolescents aperçus hier, et d'autres qui s'aventurent dans les autres cours. Chacun leur tour, ils marquent d'un jet de pisse leurs passages quotidiens autour du paradis. Leurs pas s'accumulent pour devenir des pistes dans la neige et je crains que cet été leurs va-et-vient ne se poursuivent.

Ce que je crains aussi, c'est que leur état sauvage semble supplanter leur peur de l'humain. Lorsque nous ouvrons la porte patio pour les chasser de sur notre balcon à coup de "sshhh!" vigoureux, ils bondissent à peine de quelques mètres pour ensuite s'immobiliser à nouveau, leurs yeux dans les nôtres.

Moi, je veux pouvoir sortir avec Bo. pour profiter des beaux jours qui s'en viennent à jouer avec lui dans notre beau gazon, mais je sais que je devrai rester vigilante lorsque je le déposerai puisque les chats errants, ça chie un peu partout. L'été dernier, il nous a fallu ramasser leurs tas de merde à plusieurs reprises pour éviter de s'en mettre plein les pieds. Vu leur multiplication, je ne peux que m'attendre qu'à la multiplication de leur défécation. Pire qu'un parc public fréquenté par des maîtres insouciants qui laissent les crottes de leur chéri là où celui-ci décide de s'accroupir pour évacuer sa moulée. Je pense tout particulièrement à celui près du paradis dans lequel j'ai promené Bo. hier pour la deuxième fois dans sa poussette. De la merde plein le chemin. Même en zigzaguant je n'arrivais pas à éviter les étrons écrasés et mous. Dire que je store l'engin roulant dans notre garde-robe... De toute façon, nos bottes aussi frottent les trottoirs souillées... Ne pas y penser, ne pas devenir maniaque à outrance.

Don't get me wrong, j'aime les chats. Nougat le gros chat en est la preuve vivante. Mais là, je ne peux m'empêcher de voir le phénomène dégénéré et de frémir. Surtout qu'une voisine en diagonale de nous leur a ouvert son cabanon et les nourrit. Bravo. D'accord elle a grand coeur. Mais pour elle, tous les animaux s'équivalent: pigeons, corbeaux, étourneaux, écureuils, chats. Elle leur jette sans cesse des miettes de pain et des restants de table, entretenant ainsi leur présence nuisible.

Oui, tous ces animaux peuvent devenir nuisibles quand l'équilibre est brisé entre leurs espèces et la nôtre. Je sais, je sais, ce sont nous les pas gentils, nous qui avons bousillé leurs écosystèmes en implantant nos municipalités. Mais maintenant, ils peuvent très bien venir s'installer dans les recoins et agrandir leurs rangs, bourlinguant aussi leurs parasites.

Pourquoi s'inquiéter, vraiment.

2.15.2010

mis en scène

C'est fait. La pièce orange est enfin devenue la pièce à Bo. après tous ces mois à y voir s'empiler une foule d'objets lui étant destinés, en plus de tous ceux appartenant à notre ancien bureau. Des mois à regarder le bordel s'y installer sérieusement, dans l'attente de la disponibilité des aires aménagées au sous-sol.

J'ai relevé mes manches samedi et je me suis lancée. Gros ménage, gros tri. Pendant ce temps-là, papa s'est occupé de toi à chaque minute, à part celles passées à mon sein. Parce que j'avais les deux mains dans des piles et des piles de vêtements, il t'a déniché un bel ensemble de petit garçon: chandail rayé à manches longues et mini jeans. Mignon comme tout.

Des vêtements, j'en ai plié des tonnes. C'est que nous avons hérité d'un trousseau qui grossit au fur et à mesure qu'un nouveau fils est annoncé dans la famille et parmi nos amis. Les vêtements de l'un sont passés au prochain et ainsi, les Tupperware bourrés à craquer de fringues circulent. Maintenant que Bo. porte du 9-12 mois, je pouvais préparer les caisses nouveau-né et 3-6 mois pour K., le garçon attendu impatiemment par la famille de mon amie Jl. pour le mois de mai. Honnêtement, à voir le nombre de cache-couches et de pyjamas, nous pourrions être deux, si pas trois, à profiter du kit à la fois. Mais le hasard a fait en sorte qu'à ce jour, les garçons se soient décalés dans leur arrivée. Et puis, comme Dm., une des mamans du cercle, l'a dit: "Il faudrait une fille bientôt pour profiter de l'autre trousseau." Qui sait, peut-être que ma soeur G. et son amoureux Rb., qui se lancent dans l'aventure d'un deuxième enfant, créeront une petite princesse.

Des vêtements et des jouets. Des jouets envoyés de Hong Kong par sa marraine B., d'autres légués par ma soeur G., qui les avaient, pour la plupart, elle-même reçu de notre soeur B., première mère de nous trois, et ceux offerts par ses grand-mamans. Une commode de vêtements donc, un bac à jouets, deux chaises de grande personne pour pouvoir s'installer près de lui avec un livre éventuellement, quand dans quelques mois, Bo. se divertira par son imaginaire et son sens de l'exploration.

Cette pièce est la tienne pour les années à venir. Ces murs seront les témoins de ton évolution. Ton film débute à peine.

2.12.2010

alimenter l'amour

Chaud, j'avais très chaud hier matin à besogner autour du four, dans une cuisine inondée de soleil du matin, soutenant Bo. plongé dans une sieste. Voyez-vous, ma voisine Algérienne et maintenant collègue K. venait nous rendre visite et puisqu'elle se rendait au onzième le lendemain, aujourd'hui donc, je voulais qu'elle apporte des biscuits à la troupe qui a été secouée la semaine dernière. Onze mises à pied. Ça brise une atmosphère de travail. Sûrement que ceux et celles qui sont maintenant à la maison auraient davantage apprécié ma petite pensée gourmande. Pour eux, j'envoie toutes mes bonnes vibrations. Qu'ils prennent ce temps pour être avec ceux qu'ils aiment, lire, renouer avec leur passe-temps favori, se refaire une forme physique dans le grand air. Heureusement, dans notre beau pays, il y a l'assurance-chômage. Même si ce n'est pas l'entièreté du salaire, ça dépanne drôlement et pour plusieurs mois en plus. Le onzième les rappellera bien assez vite, quand les coffres seront renfloués.

Ces biscuits, ils ont fait sensation si je me fie aux deux coups de téléphone reçus pour m'en remercier. Je vous transmets donc la recette hyper simple qui fera sourire les estomacs qui vous sont chers.

Dans un grand bol à mélanger, lier au malaxeur:

- 3/4 tasse de beurre salé ramolli (si non salé, ajouté une pincée de sel au mélange final)
- 3/4 tasse de cassonade tassée
- 1/4 tasse de sucre de canne
- 1 1/2 cuillère à thé de vanille
- 1 oeuf (température pièce)
- 2 cuillère à soupe de lait (d'amande, de soya, de vache, de riz)

Une fois cette mixture obtenue, y ajouter:

- 3/4 tasse de farine tout-usage

Mélanger. Ajouter ensuite:

- 3 tasse de flocons d'avoine (pas du rapide)
- 3/4 tasse de pépites de chocolat
- 1/4 tasse de bleuets séchés
- 1/4 tasse de canneberges séchées (ou
- 1 1/4 tasse de pépites de chocolat ou
- 3/4 tasse de pépites de chocolat + 1/2 d'arachides en morceaux, bref, vous comprenez le principe!)

À l'aide d'une cuillère à soupe, modeler des boulettes que vous enfournez à 350 F sur une plaque à cuisson pour environ onze minutes (dans mon four, c'est le temps idéal pour que les biscuits restent moelleux à souhait). Régalez-vous.

Cela étant partagé, je termine en glissant un mot sur garçon pour marquer ce jour où ton corps est encore un peu plus grand que la veille, de manière notable. Tant et tellement que je dois remiser certains des petits pyjamas une pièce que je t'enfilais depuis ta dernière poussée de croissance, fin décembre, et en déterrer des plus longs pour que tes pattes puissent se déplier confortablement. J'ai dû aussi modifier la grandeur de tes couches tout-en-un. Il ne nous reste plus qu'une rangée de boutons pression à défaire pour qu'elles ne soient à leur maximum et tu n'as que trois mois et demi! Mon beau brin d'herbe va!

2.10.2010

bonification


Quand je regarde la plante de ses pieds, je suis fascinée par tous les micro sillons qui les marquent. Sûrement que doit exister une chiromancie des petons de poupons. Quelque part sur la planète, où, comme ma mère me l'a tant répété, tout est possible, même et surtout ce que l'on ne peut même pas imaginer, cette science occulte supplante en importance la fameuse carte du ciel. Ses orteils fripés pareil que si garçon baignait encore constamment dans son souvenir de nid utérin se plient sur mon nez quand je lui embrasse ces porteuses de secrets. Mon bébé chimpanzé. Toute une vie pleine de mystères devant toi.

Février de retour. Court et olympien cette année. Elle est bel et bien derrière moi cette mélancolie qui s'y rattachait immanquablement depuis le départ de mon père. Maintenant, c'est de savoir que notre aventure fusionnelle ait débuté dès ses premiers jours qui me réjouit et qui me supporte devant tous ces jours blancs et courts, qui allongent pourtant un peu plus à chaque tombée du jour qui passe.

Maintenant que tu m'as projetée vers le futur à partir de ton apparition, mon passé semble scellé par cette renaissance, à l'abri des épanchements nostalgiques et nombrilistes au profit d'un destin qui a pris tout un tournant lorsqu'il t'a posé au creux de mon sein. Il n'est pas question de reniement, mais plutôt de dépassement. À quoi te servirais-je si je n'avais pas appris à digérer les événements qui m'ont fabriquée? Aussi désuète qu'un oracle figé par le fatalisme. C'est de grandir spirituellement qu'il faut s'attendre de l'enfantement. Quelle tristesse pour notre progéniture sinon. Quel gaspillage d'opportunités grandioses. Le ressentiment n'a jamais donné de fruit à ce que je sache. Il est temps de courage au nom de tous ceux qui seront appelés à rester plus longtemps que nous. De l'avant, avec un amour léger et franc, pour une humanité libérée.

2.07.2010

nouveau départ

D'un autre côté, je suis injuste. Notre entourage nous offre beaucoup, beaucoup de support et d'ouverture, même si parfois, nos choix les laissent songeurs.

Dans un livre que je suis en train de parcourir - livre qui m'a été prêté par ma soeur G., livre qu'elle n'a pas lu, elle qui dit souvent que nos façons de faire ne sont pas les mêmes, mais qui tient à nous offrir des outils dans notre voie de parents parce que son coeur est ainsi fait - on retrouve en leitmotiv cette idée que seul un parent connaît assez bien son enfant pour lui donner ce qu'il pense être le meilleur pour lui, selon ses besoins et sa personnalité, toujours en accord avec les valeurs de l'unité familiale. Ce bouquin est rédigé par la famille Sears: papa est un pédiatre célèbre, maman est une infirmière, consultante en allaitement, et les deux fils ont suivi les traces de leur père. À quatre, ils ont pondu ce The Baby Sleep Book pour aider les parents à comprendre le sommeil de leurs enfants. Sans le savoir, ma soeur m'a remis entre les mains un ouvrage parfait pour nous qui pratiquons le co-dodo puisque la famille Sears le prônent par expérience et par science. Je relis donc des notions que j'avais apprises par une autre lecture portant sur le sujet et j'apprends comment d'autres parents sont passés par là. En fait, les Sears y sont pour beaucoup dans le développement de cette notion d'attachment parenting. Depuis des années maintenant, ils ont écrit une pelletée d'ouvrages portant sur l'art d'être parents. Si j'ai bien compris, ils seraient même parmi les initiateurs des principes de base pour un parentage de proximité en Occident.

Je crois que c'est aussi pour cela que j'ai ralenti la cadence, parce que je suis avare de mon contact privilégié avec garçon et que je ne veux pas l'exposer. Cette fois, mes journées sont vraiment réduites à l'essentiel et je ne peux plus me cacher derrière les petites choses magiques qui font dévier le spot de moi. À moins de parler de mon point de vue depuis l'intérieur du paradis. De décrire les habitudes de tout le voisinage qui se répète day in day out, du lundi au vendredi. Le père de la famille guatémaltèque qui quitte autour de 8 h 30 le matin, après avoir bougé la voiture qui bloque la sienne. Parce qu'ils fonctionnent à trois véhicules pour les six habitants de la maisonnée. Le facteur enjoué qui vole d'une boîte aux lettres à l'autre et qui dépose nos missives autour de 12 h 30, si certaines nous sont destinées. Le chat errant marbré noir et caramel aux yeux aqua qui grimpe sur notre balcon arrière les jours ensoleillés. Le roux qui l'accompagne parfois et qui jette un peu d'urine sur notre rail d'escalier à l'entrée pour marquer son territoire. L'autobus scolaire qui ramène certains enfants vers 15 h au stop à quatre maisons du paradis où les y attendent des parents accompagnateurs. Le couple qui promène un épagneul chaussé de bottes lorsque le pavé pourtant sec est blanc comme craie sous le soleil d'hiver. Etcetera.

Écrire me manque. D'ailleurs, c'est fou comme les neurones rouillent rapidement. Les fautes d'orthographe se multiplient et les structures de phrase laissent à désirer.

J'ai confiance dans mon maternage. Assez confiance pour faire ce que j'ai toujours fait si j'ai besoin de guidance: demander conseil. Cela étant dit, peut-être que ma pudeur tombera et que je pourrai enfin commencer à raconter à Bo. la préciosité de notre relation. Plus en détails.

2.06.2010

bien, tout va bien

Il y a une éternité, je débarquais d'un avion qui me ramenait au paradis et M. venait m'accueillir à l'aéroport et il était tellement content de me revoir qu'il me faisait l'amour à peine rentrés et sans le savoir, il m'offrait le plus beau de tous les cadeaux: toi. Il y a un an. Jour pour jour.

Nous revenons d'un saut de crapaud chez nos anciens charmants voisins qui recevaient parents et amis pour célébrer le premier anniversaire de leur garçon Mt. Jour pour jour. À le voir marcher partout, s'épanouir pleinement et s'émerveiller à aller à la rencontre de chaque nouvel arrivant à la fête, je suis reconnaissante de les avoir dans notre vie car ils sont ceux qui ont mis en pratique avant nous des concepts que certains dans notre entourage croient inhibiteurs d'une indépendance. Parce que garçon est près de moi pendant qu'il fait ses siestes dans l'Ergo, parce que je le porte dans mes bras pour me déplacer d'un endroit à l'autre dans la maison, parce que je joue toujours avec lui quand vient le moment de stimulation, parce que nous dormons avec lui, ne le privons-nous pas de son autonomie? Je crois que non et mon instinct de mère me dit qu'il est heureux ainsi, qu'il se développe sans stress, baigné de cette énergie couveuse.

Si j'écris moins, c'est aussi un peu parce que je sais que nos choix ne sont pas ceux de la majorité et pour la première fois de ma vie, je n'ai pas envie d'expliquer le pourquoi du comment. Je n'ai pas envie de justifier ceci ou cela. Comme lorsque j'ai écrit il y a deux mois que garçon et moi, nous ne sortions pas beaucoup depuis que le froid hivernal s'était installé sur notre coin de planète. Eh bien, l'inquiétude que ça a généré dans mon entourage c'est traduit par des conseils de toutes parts. Il faut que tu sortes, c'est mieux pour ton mental, pour ta santé. Euh oui, je le sais, évidemment, mais la contrainte est là et on s'adapte, c'est tout. Cette inquiétude, même si elle naît de l'amour, je n'en ai pas besoin. Alors j'évite.

Sinon, je pourrais dire ici à quel point je suis constamment à te soigner, à te voir te métamorphoser sous mon regard, à adorer chaque instant à veiller à ton bien-être. Je pourrais dire que depuis deux ou trois semaines, tu précises toi-même ton rythme. Sans t'imposer quoi que ce soit, ta faim s'éveille aux mêmes heures, de jour en jour, et ton sommeil de siestes te gagne aux mêmes heures, de jour en jour. Dire que je me mets au lit vers 19 h, en même temps que toi, pour la nuit afin de t'accompagner dans l'assoupissement et m'assurer ainsi un vrai bon repos. Que nous restons un douze heures dans l'îlot, pour nous éveiller pour un premier boire nocturne vers minuit, puis de nouveau autour de 4 h 30. Dire comment tu te rendors sans rechigner aux creux des bras de ton papa ou à deux centimètres de moi, nez à nez. Dire qu'une fois que ton papa quitte pour le boulot, nous commençons notre journée qui a des airs d'une série d'un même cycle constitué d'un boire, de jeux, d'une relaxation en portage, d'une sieste, d'un éveil doux, d'un changement de fesses et puis d'un boire et ainsi de suite. Je pourrais dire comment tu grandis et tu te renforces et tu aiguises ta curiosité pour tout ce qui t'entoure et tu écoutes mes paroles et tu gazouilles de plus en plus.

Pour n'avoir jamais vécu cette opportunité de voir mon enfant vivre, je suis en paix avec cette proximité que nous partageons, cette intimité si nécessaire au développement de ton sentiment de sécurité. Comment pourrais-je faire autrement?