orphelins de l'Éden

9.30.2007

demain, octobre

Exténuée. Repue. Douchée après une journée plein soleil à danser sur des rythmes fous. Am., ma belle-soeur, nous a accompagné au dernier piknic de l'année. Vraiment, c'était une bouffée d'énergie pure d'enfin me brasser le popotin après un été plutôt stationnaire. De toute manière, je suis le genre de personne à vider tout son soûl périodiquement sur la piste, mais quand je dis vider, je dis tordre jusqu'à la dernière goutte. Quand je quitte l'endroit, je suis entièrement satisfaite et quand je suis là, je ne quitte pas l'espace où je danse. Je vous l'ai déjà dit, j'aime me planter devant une tour d'haut-parleurs pour sentir la musique me traverser de part en part. Aujourd'hui, j'avais le bonus de la chaleur jaune du dernier jour de septembre. Il y avait du beau monde, beaucoup d'originalité, des enfants aussi, de toutes petites pommes courant ici et là.

Cette semaine, je travaille de soir. Mon objectif de la semaine est de terminer la révision de mon manuscrit que j'enverrai ensuite. Ça sent la fin. Déjà, je pense à mon prochain texte, sûrement dans le même style. Vous avais-je dis que c'est l'érotisme que j'explore dernièrement? Beaucoup d'entre vous le savez déjà puisque certains ont même déjà lu la grande majorité de mon manuscrit. Mais pas la fin. Personne encore n'a lu la fin. À part moi bien sûr.

9.28.2007

petit train va loin

Le voilà enfin le 200e message que je vous livre. Avant de le réaliser, de réaliser que ce serait celui-là je veux dire, j'avais en tête de vous faire une espèce de liste d'épicerie de mon week-end. Quelque chose de net, de court et de précis. Je venais de faire le tour mental de ma journée et bien qu'il y ait eu des événements rigolos, je n'avais pas le goût de démontrer pour une nouvelle fois à quel point la vie est bien faite. Parce que même lorsque l'on ne le démontre pas, elle suit son fil parfait et comme tu le dis M-H, parfois, il fait bon d'observer. Ouvrir son regard à ce cours des choses qui communiquent avec nous.

J'avais le goût de partager avec vous ce que M. et moi planifions faire pendant nos deux jours de congé. J'en avais envie parce que ce sont des gestes agréables et des actions plaisantes.

D'abord, nous allons récupérer sa bague de fiancé qui doit être arrivée à la bijouterie aujourd'hui même. J'ai hâte de le voir glisser l'anneau sur son doigt. L'anneau choisi, apparenté au mien. Un bout de lui avec moi, un bout de moi avec lui.

Ensuite, nous irons chez Omer De Serres pour faire encadrer l'image de la fée dans le marais, Iris, de John Atkinson Grimshaw que nous voulons accrocher dans notre chambre. J'attendais ce moment où le rabais de 20 % réduit considérablement ce petit luxe qui embellit l'image et la protège. Je pense à un cadre de métal brossé pour faire un rappel avec les poignées de ma commode et les séparateurs des barreaux à la tête du lit. Reste à choisir la couleur du passe-partout.

Finalement, nous voulons aller au piknic électronik de dimanche. De tout l'été, nous ne sommes allés danser qu'au premier, au mois de mai. Ils annoncent beau. Ça fera un bien fou.

Pour le reste, il y a le ménage, les courses, l'amour, les colles devant Télé-Québec ou Radio-Canada ce soir, vu qu'il y a la nouvelle émission de Daniel Pinard qui nous intéresse. Il y a les repas, une conversation avec ma soeur B., un peu de lecture, un peu de marche sans doute. Pas ce soir, parce que ce soir, le ciel est bleu-noir.

Merci à vous tous. Il faut bien que je le dise de temps à autre, non? Merci du fond du coeur.

9.26.2007

l'univers porté, l'univers à portée

Glace, exercice, orthèse et osthéopathie. Aujourd'hui, la douleur semble s'être évanouie. Je continue à suivre les recommandations de Jt. qui m'a tâté tout le bras droit lundi, de l'épaule au tendon sous ma peau entre mon pouce et mon index. Après tout, c'est elle l'experte. Alors, je vous raconte l'histoire de ce garçon que je rencontre parfois dans l'autobus tout en mots, sans photo.

Donc à tous les soirs, quand je finis de travailler, je me retrouve dans l'autobus qui décolle du quai à 15 h 54 précisément. À force d'habitude, je croise d'autres passagers qui, comme moi, sont réglés telles des montres Suisse. Il y a cette femme aux cheveux bourgogne peu épais et coupés ras, cet homme mince à la moustache grise qui s'assoit toujours près d'une fenêtre, cette jeune adolescente Asiatique qui trimballe un trousseau de clefs accroché à sa poche de jeans qui fait cling-cling à chacun de ses pas, d'autres et lui, qui arrive parfois en courant, à une seconde près du départ de ce bus. Je ne connais pas son prénom. Pas encore. La prochaine fois que nous nous rencontrons, je lui demande parce que là, j'aimerais bien le saluer correctement.

D'emblée, il est différent des autres parce qu'il se déplace difficilement. Je crois qu'il est atteint d'une maladie dégénérative. Ses jambes sont pliées en permanence et ses genoux se touchent presque quand il marche. Quand il s'assoit, son corps demeure crispé et courbé. Quand il parle, ses mots sont articulés lentement et c'est un autre langage à saisir. Il me rappelle Rn. que j'ai connu un peu il y a quelques années. Rn., lui, se déplaçait avec une chaise roulante sur laquelle il prenait appui pour marcher et dans laquelle il travaillait. Rn. vendait des crayons Bic sur l'Avenue Mont-Royal. Peut-être les vend-il encore? Il y a longtemps que je ne l'aie vu. Il y a longtemps que je ne suis allée sur l'Avenue.

Le garçon de l'autobus, comme Rn., a toute sa tête. Je me souviens que Rn. m'expliquait combien il était ardu pour lui de subir le débit ralenti de sa parole puisque ses idées, elles, s'alignaient tellement clairement et rapidement. Je me souviens aussi que parfois, quand il me parlait, je manquais quelques bouts de ce qu'il me disait et je lui demdandais de répéter. Parfois, il répétait, d'autres fois, il s'impatientait et je m'en voulais alors j'aiguisais encore plus ma concentration. Rn. et moi, on discutait environ une heure par rencontre. Je m'asseyais sur un rebord de commerce et nous parlions de politique, de la vie, de la nature humaine, de sa frustration à ne pas avoir d'amoureuse avec qui partager toutes les petites choses du quotidien.

Et donc, le garçon de l'autobus, lui, travaille sans doute pour une branche de Videotron puisqu'il est toujours vêtu d'un polo à l'effigie du superclub video et qu'une fois, il a ouvert son porte-document de cuir pour en extraire des pochettes de plastique de DVD vides qu'il a triées méthodiquement.

La première fois que je lui ai adressé la parole, M. était là avec moi dans l'autobus. Il revenait de se faire couper les cheveux et il savait quel autobus je prenais. Le garçon est monté et un homme bedonnant qui ne prend habituellement pas l'autobus de 15 h 54 mais plutôt celui de 16 h 04 l'a salué et la femme à la chevelure bourgogne aussi. L'homme bedonnant lisait Harry Potter et à ce moment-là, je le lisais aussi, mais il était dans mon sac à main parce que cette fois-là, M. m'accompagnait. Le garçon et l'homme ont commencé à parler du bouquin et je n'ai pas pu m'empêcher de m'en mêler quand l'homme bedonnant a mentionné quelque chose que j'oublie maintenant. Ainsi donc, à partir de ce jour, le garçon, l'homme bedonnant, qui m'a aujourd'hui dit qu'il avait terminé la lecture du dit bouquin et qu'il n'avait pas beaucoup aimé la fin, et la femme à la chevelure bourgogne me saluent aussi.

Le garçon, quelque fois après cette première fois, m'a adressé la parole et j'ai compris qu'il lisait un livre épais sur François Mitterand. Il me lançait une blague avant que je ne descende parce qu'il aime bien s'asseoir à l'entrée de l'engin tandis que je préfère la banquette du milieu qui longe le mur de la porte arrière, et c'était tout. Un bonjour poli et un éclat de rire échangé. Mais aujourd'hui, il est arrivé à la dernière minute et il a dû venir vers l'arrière du véhicule.

Nous n'avons commencé à parler qu'une fois rendus sur le boulevard Milan. Il a pris place en face de moi et il a sorti le fameux livre de Mitterand. Il m'a montré la page de garde qui était déchirée. C'est son livre. Il l'a tellement manipulé qu'elle a fini par se défaire. Je suis replongée dans ma lecture et cette fois, il m'a tendu un pamphlet à propos du village natal de Mitterand. Impressionnée, je lui ai "t'es un vrai fan". Et oui, le garçon est Foubrac de la France et de ses présidents. Il est allé visiter le village en 1999 et à la même occasion, il s'est rendu sur la tombe de De Gaulle. Je lui demande pourquoi il est si mordu de la France et il ne sait pas. Son père m'apprend-il a travaillé à l'étranger et lui a permis de réaliser ce voyage de rêve.

Nous en venons à Sarko comme le garçon l'appelle affectueusement. Il le trouve super et il met son pouce dans les airs. Il me dit qu'il est le seul homme dont la photographie est affichée dans sa chambre. Je lui demande ce qu'il pense de sa femme et il me dit qu'elle est belle. Mais ce sont plutôt les deux filles de Cecilia, blondes et superbes qui ont retenu son attention. Nous faisons des blagues à propos de lui qui aimerait bien devenir président un jour pour avoir à son bras une belle blonde. Sa mère dit que les belles blondes coûtent cher à entretenir. En blague je lui lance que je suis d'accord avec elle, qu'elles sont comme des voitures de luxe et qu'elles ont besoin de petits soins, constamment.

Cette fois, juste avant que je ne descende, il me dit que c'est bon d'avoir des rêves. Oui, c'est bon. On appelle ça rêver mieux.

9.24.2007

une bûche à la fois

Bon ma patte va un peu mieux bien qu'elle soit encore confinée à une orthèse. Je minimiserai donc la longueur de mes messages pour les jours à venir. La nouvelle osthéopathe que j'ai rencontrée aujourd'hui m'a recommandé de la glace et des exercices en plus du traitement qu'elle va me donner périodiquement. Pour les deux prochaines semaines, je dois mettre de la glace trois fois par jour et faire une série de mouvements qu'elle m'a montrés. Je dois noter les humeurs de la douleur et de là, elle ajustera le tir.

Entre-temps, je vous présente des photographies de la corvée de bois que nous avons accomplie hier chez ma maman. Depuis des années, nous nous réunissons pour brouetter les bûches jusqu'au côté de la maison, là où les cordes sont montées, à l'abri. Mon bras gauche va se développer si je continue à l'exercer comme je le fais depuis quelques jours.



Les couleurs embellissent le nord. C'est commencé.



Le nouvel ami de ma maman et de Kt., sa chienne. Jc. a été adopté le jour de mon anniversaire.



La vue.





Le bois et la tête de Bz., le chien de ma soeur G. et de Rb., son amoureux.

9.22.2007

je vieillis

Un peu de sarcasme, pourquoi pas? Trente ans ça ne fait pas de mal à personne. De toute manière, c'était la fin de ma trentième année hier, pas le début. Puisque je porte un machin pour stabiliser mon poignet droit "tendinité", je ne peux pas vous écrire beaucoup. L'idée de vous présenter quelques photos de ma journée de fêtée est donc bienvenue. Voici quelques coups d'oeil de ma journée de fille en ville qui se fait plaisir, jusqu'à ce que ma foutue batterie me lâche sur mon chemin du retour quand j'ai voulu immortaliser un graffiti qui se lisait comme suit: form secret societies.

Au petit matin, ma compagne de presque toujours vient me saluer tout spécialement.


L'autobus et le métro m'amènent à la bibliothèque.


Sur la rue Mackay, à deux pas du spa Hauschka, je trouve un nouvel oasis du bio.


Après mon soin et un dîner exquis au resto Sur Bleury, je m'asseois ici pour écrire un brin malgré ma patte "strapée".


En me promenant comme j'aime tant le faire, je tombe sur elle et je me dis qu'elle devait avoir trente ans cette Cérès.


Finalement, en route pour les quais de Bonaventure, je vois un train passé et je me dis que dans une trentaine d'années, cette vue aura changé, assurément.

9.18.2007

perché sur un nuage

J'ai mal au poignet. Peut-être une tendinite. Sûrement. En revenant d'un forum de discussion dans le merveilleux monde virtuel, j'ai appris que la répétition d'un même mouvement peut taper sur le clou comme on dit. Lire ici: manier la souris à longueur de journée au onzième m'a rentré dans la peau, littéralement. Maintenant, une douleur lancinante au poignet droit, côté annuaire, de la main à la moitié de mon avant-bras me rappelle que j'ai une partie du corps qui se démarque des autres par un mal physique. "Je suis là" que me crie cet engourdissement continu, cet inconfort, pour signifier le bobo qui réapparaît à la première occasion.

Alors ce soir, pour ça, j'abrège mon blog.

J'ajoute seulement que la vie des fois, vous le savez, a de ses clins d'oeil hallucinants qui me font croire dur comme fer qu'il y a quelqu'un qui s'occupe de tendre l'oreille pour nous écouter. Aujourd'hui, sur l'heure de dîner, je marche avec ma soeur G. Pour expliquer le point que j'apporte à la discussion à propos des différences de perspective qu'ont deux individus ayant vécu la même situation, je parle de Mr., un garçon que j'ai connu au cégep. Je ne rentre pas dans les détails de l'histoire, mais l'important, c'est que je parle de lui et qu'il y a des mois que je n'aie pas pensé à lui, plus d'un an que je n'aie pas parlé de lui et plus de deux ans, au moins, que je ne l'aie vu. Eh bien, mesdames et messieurs, ce soir, en rentrant dans le wagon de métro à la station Lionel-Groulx, en pleine discussion cette fois avec une collègue, Lc., je me rends compte que Mc. est là, à deux pas de moi. Je le présente à ma collègue et comme ça rapidement, en deux stations, on défile les faits qui répondent à la question d'où chacun est rendu à présent. Voilà, c'est tout. La vie est extrêmement bizarre parfois. Tellement, que cette personne qui m'écoute, je sais qu'elle tendait l'oreille aujourd'hui. Évidemment.

Ce n'est qu'après coup que j'ai fait 1 + 1 = 2 dans ma petite caboche de personne qui remonte le fil de sa journée. En récapitulant, il y a souvent de ces petits éclairs de synchronicité déconcertant et réconfortant. Le tout qui surprend l'élément. L'acteur qui rejoue les scènes trouve des trésors enfouis. Des perles à mettre dans notre besace de voyageur patient.

9.15.2007

cocorico

Quand il pleut au petit matin, on dirait que le corps sent la lenteur du jour qui commence et se syntonise avec la pâle lumière qui filtre aux travers les nuages lourds. Samedi matin et je me lève avec l'envie de croissants. À quelques coins de rues du paradis, il y a le Toit Rouge, un bâtiment au toit rouge justement qui regroupe une fruiterie - lieu où il ne vendent pas d'origan frais, mais tout même agréable -, une boucherie - comptoir dont je fais abstraction puisqu'il ne répond pas à mes besoins de lacto-ovo-végé - et une pâtisserie tout au fond. Là, une femme à l'accent français qui pourrait être Marocaine ou Libanaise s'occupe de mettre dans des sacs de papier les viennoiseries, les pains et les biscuits qu'elle a pétri dans la nuit.

Je saute dans Jasmine la Fit après avoir enfilé mes Crocs - pluie oblige - et serré comme il faut le cordon de mes pantalons de jogging. J'y vais en pyjama. Au retour, à la maison, je n'aurai qu'à retirer mes godasses et à me faire chauffer un bol de lait de soya auquel j'ajouterai une larme de miel de Centaurée. J'y tremperai mes pattes de croissants en feuilletant la section cinéma du Voir qui a changé son look depuis cette dernière publication. Tranquillement, moment de cocooning.

Arrivée à l'intersection où je peux tourner pour rentrer dans le stationnement, je vois un adolescent debout sur un skate avec quatre ou cinq sacs dans les mains. La planche plonge abruptement le nez entre le trottoir et la rue. Le pauvre bougre est projeté dans les airs et retombe sur les genoux, les sacs éparpillés à la ronde, quelques vivres les fesses à l'eau. Je passe à côté de sa planche et je vais me stationner. Je sors de mon véhicule et je cours vers le jeune homme qui tente de ramasser la nourriture du mieux qu'il le peut. Je lui demande s'il est blessé. Non qu'il me dit. Je l'aide à replacer le tout dans les sacs et puis il me dit que la seule chose de brisée, ce sont les oeufs. Je le convaincs de venir à l'intérieur pour se faire échanger sa boîte. Je sais que les épiciers ont des marges de manoeuvre pour ce genre d'incidents. Je suis convaincue que quelques oeufs de cassés peuvent être remplacés sans problème. Il me suit et je lui lance à la blague que la prochaine fois, il lui faudrait peut-être laissé tomber l'idée de la planche et opter pour le vélo. Il me dit qu'il n'a plus droit à rien. Avec un sourire triste, je lui dis qu'au moins, il a droit à sa planche. Il me dit ouais.

Un commis peut-être un an ou deux plus vieux que le malchanceux m'écoute lui demander s'il y a quelque chose à faire pour les oeufs. Il va à l'arrière, revient et non, il ne peut rien faire. J'évoque cette marge de manoeuvre dont je viens de parler et puis cette fois, il demande à notre ami à la casquette à la palette sur le côté combien d'oeufs sont foutus. Dans les deux boîtes, il y a un total de six cocos de craqués. Le commis peut en remplacer un - parce que dans une boîte, il n'y en a qu'un de kaput - et lui rembourser six oeufs. Cette entente fichtrement avantageuse conclue, je laisse l'adolescent après lui répété les clauses de l'arrangement et lui souhaiter bonne chance.

De derrière le comptoir, la pâtissière à l'accent chantant me regarde discrètement de la tête aux pieds quand j'approche. Je lui dis d'emblée que je suis en pyjama. Elle me sourit avec gentillesse et comprend que même si elle est debout depuis environ six heures déjà, d'autres paressent en ce matin lent.

9.13.2007

manger pour vivre

Juste pour le plaisir de la confidence, laissez-moi vous raconter la fois où, toute petite, j'ai vu un bébé orignal galoper maladroitement à deux pas de la maison sur notre terrain. J'y pense parce qu'hier, je racontais à Vr. ma collègue qui me donne des lifts jusqu'au paradis que j'avais aperçu un lapin bondissant à un coin de rue de chez moi il y a quelques jours et que vraiment, St-Hubert-on-the-beach, c'est presque la campagne vu de cet angle. En parlant de la bête aux longues oreilles, je me suis souvenue de cet animal aux pattes graciles et au museau rond, le bébé orignal donc, qui m'avait tant impressionnée. J'étais dans la cuisine quand je l'ai vu par la fenêtre. Il courrait à toute allure, affolé sans doute d'être à découvert. Dans ma maison d'enfance, je vivais vraiment entourée de la campagne.

En haut de la côte, il y avait des vaches paisibles qui broutaient une herbe grasse sur des terres vastes. Je ne me souviens plus du nom des gens qui habitaient là, mais je sais qu'un jour, nous y sommes allés pour participer à une corvée assez particulière. Ce jour-là, des volailles de la ferme se faisaient trancher la tête dans un entonnoir-guillotine et quand leur corps tombait, il courrait pendant quelques longs instants dans tous les sens, d'où l'expression courir comme un poulet à la tête coupée. Je me souviens qu'après, les animaux décapités qui avaient pissé le sang étaient déplumés. Le duvet collait aux doigts et la peau ressemblait à celle d'une personne âgée, fripée et pâle. Je me souviens d'avoir tiré sur des plumes pour les arracher.

Et puis aujourd'hui, j'ai appelé pour réserver dans un restaurant à Chambly pour fêter mon anniversaire. Quand j'ai demandé à la jeune femme qui prenait mon prénom en note en le trouvant joli s'il y avait des plats végétariens là, elle m'a répondu que oui, il y avait beaucoup de viandes du terroir. Par deux fois, elle m'a servi la même réponse et finalement, elle a compris ce que je demandais. Je crois que je mangerai du poisson ce soir-là. Le restaurant est réputé pour sa bonne table - quatre diamants -, mais ce qui me plaît, c'est l'utilisation des produits locaux et du terroir. Peut-être même que je me laisserai aller à manger un peu de cette volaille dont les plumes m'ont déjà collées aux doigts. Qui sait? À bien y penser, j'aime mieux opter pour le saumon de l'atlantique. Vider les entrailles d'une bête marine, ça me connaît aussi, des perchaudes surtout, et des carpes à soleil. Parce que là où on va, au Fourquet Fourchette, la chair fait bonne chère avec les bières d'Unibroue, brassées dans la ville même, alors chair il y a. Peut-être y aura-il une ou deux tomates dans mon assiette pour l'accompagner. Laissez-moi vous dire que de voir toute cette eau de végétation couler entre mes doigts ces jours-ci, c'est très dramatique aussi. Bon appétit.

9.11.2007

les fruits de mon labeur

Les jours passent et je ne trouve pas le moment qui me permettrait de pondre un blog. Ces deux derniers jours, mon excuse, c'est ça.



Tomates, tomates, tomates. C'est maintenant où jamais. Alors, on rince, on ébouillante, on pèle, on épépine, on coupe, on mijote, on stérilise, on met en pots et on prie pour entendre le pop. Hier matin, j'ai travaillé pendant trois heures pour finalement obtenir un pot d'un litre et un deuxième de 750 ml. Du gros boulot. Mais le temps a passé vite. J'écoutais Christiane Charette et ses invités et je me suis souvenue combien il est agréable de bouffer de la culture et des connaissances sociales.

Et puis, je porte des bas de laine ce matin. L'air est à l'automne et bientôt, ce seront les couleurs. Déjà, des érables près de la maison ont commencé à jaunir ou à rougir. Notre jardin est tout flétri et mon amie Sr. m'a dit que pour avoir une bonne terre grasse l'an prochain, je n'ai qu'à couper les plants et à les enfouir à même mon carré cultivable. La matière en décomposition nourrira le terreau d'une foule de minéraux obtenus par la digestion des végétaux par les micro-animaux. M. a récolté une cinquantaine de tomates pendant le dernier mois. Certaines d'entre elles finiront en pots avec leurs soeurs achetées au marché ce week-end, des Roma bios chez Maryse et Mylène, les agricultrices des Milles-Herbes, et des Romanelles près du Première Moisson.

Dimanche, j'ai reçu ma conseillère en finances, Nc., et son fils de six ans, P-A. Je lui avais déjà parlé du cannage des tomates, de pêches, de confitures. La semaine dernière, je lui ai mentionné que c'était le temps des tomates et que nous le ferions pendant le week-end. Elle a accepté mon invitation et après avoir mangé une soupe, nous nous sommes mis à la tache autour de l'îlot pendant que P-A s'est installé à la table avec son cahier à colorier et ses Prisma Color. Notre labeur nous a donné quatre pots de tomates et quatre de jus pour les fonds de soupe. Lorsqu'elle reviendra la semaine prochaine pour parler REER, elle amènera sa part d'or rouge parce que les pots étaient encore trop chauds pour être manipulés quand ils sont partis.

Ma conseillère est une perle. Elle et son partenaire travaille dans une petite caisse annexée à la Caisse de Solidarité. Ma Caisse est celle du Chaînon. Elle se différencie des autres par son action sociale et humaine. Par exemple, pas de ristournes pour les membres puisque les sous sont redistribués à des organismes sociaux. Par exemple, Nc. et son partenaire étudient la possibilité d'accorder des montants cadeaux aux acheteurs de véhicules faibles en émissions de GES. Par exemple, Nc. se déplace à la maison des membres pour faciliter les rencontres. Par exemple, j'ai son numéro de cellulaire et quand nous avons fait les démarches pour acheter la maison, je lui ai téléphone à répétition pour lui poser une foule de questions. Par exemple, Nc. est assez honnête pour me conseiller de ne pas investir dans tel fond qui est trop instable. Le service que j'ai n'a rien à voir avec celui que j'avais avec la RBC, boîte immense qui engrange les profits et offre un service virtuel. Ma petite caisse est comme David contre Goliath. Une caisse qui retourne à ses origines en offrant un service personnalisé. Nc. et son partenaire ont un nombre de membres limités sous leur tutelle pour pouvoir assuré ce service impeccable. En plus d'avoir des valeurs tout à fait en synchronisme avec les nôtres: développement durable, développement social et humain et responsabilisation financière.

L'argent, on travaille pour. Il faut savoir comment le faire fructifier tout en en profitant. Conjuguer passé, présent et futur. Si j'avais à étudier, je me lancerais dans les chiffres, les marchés boursiers, le décryptage de la langue de bois des experts. D'ailleurs, je sais que je le ferai sous peu. Je déteste ne pas comprendre quelque chose d'aussi important. Parce que bien sûr, la vie c'est autre chose que des billets. Mais ça aide vachement quand même d'en avoir et de savoir les gérer. Je veux bien vivre dans ma prison dorée. Ne pas tirer le diable par la queue, j'en ai assez donné. Mes dettes sont celles que j'ai choisies consciemment, maison, voiture. Je les assume. Je suis de la classe moyenne. Et je sais que je suis extrêmement fortunée. Avec mes sous, je me procure la bague de fiancé de M., des tomates, une journée de spa pour ma soeur, le disque de Pierre Lapointe. Je sais que je suis bénie de pouvoir m'endormir sans souci, le ventre plein. Je remercie aussi souvent que je pense à le faire. Je remercie. Je suis reconnaissante. Et puis, je me lève et je continue.

9.07.2007

la rentrée

Dans l'autobus hier, c'était chaud et collant. Les voyageurs sont plus nombreux depuis la rentrée. Des étudiants avec des sacs gigantesques se plantent dans le couloir et il faut dire "excuse-moi" pour qu'ils réalisent notre présence et se tassent. Quoi qu'il en soit, je suis heureuse de pouvoir sauter dans le bus sans souci. Toujours à la même heure au quai d'embarquement, pas de surprise. Je sais que je suis à la maison à 4 h 30.

Em., ma filleule à Hong Kong, vient de commencer l'école des touts-petits. Ma soeur et mon beau-frère nous ont fait parvenir des photographies délicieuses de cette petite fille délicate vêtue de sa petite robe blanche et d'autres sur lesquelles elle est vêtue d'un short jaune et d'un t-shirt blanc pour s'activer dans la journée. Elle est tout simplement croquable avec ses longs cheveux et sa frange. À l'école, elle est la seule non Chinoise. Son nom apparaît tout en haut de la liste parce qu'il n'a pas d'équivalent en symboles chinois. B., ma soeur, m'a expliqué qu'ils allaient être 39 enfants, une enseignante et trois éducatrices. Em. devra apprendre le mandarin pour communiquer avec tout ce beau monde. Déjà, cette petite qui n'a pas encore trois ans mélangent le français et l'anglais pour créer un nouveau langage et baragouine aussi du cantonnais avec Auntie, sa nounou qui vient à temps partiel. Quand Em. veut manger elle dit: "I faim." Les enfants sont des éponges, véritablement.

Je pars dans quelques minutes pour un spa dans le nord. Aujourd'hui, nous célébrons la fête de ma soeur G. Elle se fera masser, nous profiterons d'une bonne table ce midi et après, nous irons suer un bon coup dans les bains secs et humides. Ensuite, maman nous attend chez elle, avec grand-maman. Elles auront préparer un souper en l'honneur de mon aînée qui vraiment, est un soleil sur deux pattes. G. c'est une battante, pleine d'ambition mesurée et de romantisme enfin comblé. G. c'est aussi des millions d'éclats de rire et une générosité toute de petites attentions. G. s'est du bon pain, belle à part de ça. Je t'aime ma soeur et bonne fête, même si c'est juste lundi.

9.05.2007

capsule

Petit à petit, les messages s'accumulent et le décompte est lancé pour atteindre mon deux centième. Il faudrait que je les enregistre ailleurs pour ma postérité, pour que mes enfants et mes petits-enfants peut-être puissent lire les descriptions d'un autre temps et se dire à eux-mêmes qu'ils viennent de petits événements enchaînés les uns aux autres pour créer le filon qui a mené à eux, leur existence, leur point de vue, leur grain de sel en tant que grain de sable dans l'univers. Il faudrait que je préserve ma mémoire pour qu'elle devienne publique au sein d'un regroupement privé. Ludivine aimait écrire. À son époque, le papier diminuait d'importance pour transcrire les idées. Les ordinateurs commençaient à emmagasiner les savoirs, les écrits, les travaux, les correspondances, les manuscrits. Mais sachez vous qui me lirez peut-être dans cinquante ou soixante-quinze ans, que les livres existent encore aujourd'hui. Les livres sont encore des compagnons sympathiques plus légers et agréables que des portables ou des palms. Les livres ont encore leur fonction et leur raison d'être. Souvenons-nous combien il fait bon de manipuler un roman qui nous aspire parce qu'il nous inspire. Les mots silencieux, les mots patients. Ces mots-là, ils me réconfortent à tout coup.

9.03.2007

on t'aime Sm.

Assise devant l'écran, la couette dans les airs et les yeux fripés, je sais que je n'ai pas assez dormi. Lundi férié heureusement. Nous sommes revenus à 2 h 30 du matin de St-Cuthbert, là où le père de Sm., notre ancien voisin du rez-de-chaussée, a acheté une maison et une ferme bâties sur une terre immense qu'il loue en partie à des agriculteurs qui cultivent le soja. Sm. nous a invité à aller célébrer son anniversaire autour d'un feu. Nous nous rendons donc, à bord de Jasmine la Fit, accompagnés de nos anciens charmants voisins. Nous passons les prendre à leur nouveau paradis qui est franchement beau. J. nous fait visiter tous les recoins de leur nid. Dans la cour, le vent siffle des mélodies dans les feuillages d'arbres gigantesques plantés dans des cours voisines. Ces arbres sont les témoins centenaires de l'endroit.

Dans la voiture, P. est comme le stroumph grognon. Monsieur met son grain de négativisme dans toutes les conversations: désillusion face au virage vert des grandes entreprises, doute sur la véracité d'un fait dans une histoire que J. raconte, mauvaise foi quand finalement elle aboutit à la conclusion de son monologue après un grand détour. P. est au prise avec le stress du déménagement subit au paradis. M. et moi, on tente de rassurer ce couple charmant que ce n'est qu'une phase temporaire et que bientôt, ils savoureront la pleine valeur de leur move. L'achat d'une propriété est un défi à relever, des choix décoratifs à la signature chez le notaire, en passant par les rénovations et la recherche d'un évaluateur chevronné, sans oublier les coûts à défrayer, l'adaptation au nouveau milieu de vie, l'angoisse face à la décision.

Nous prenons la sortie Berthierville et de là, P. tente de guider M. à partir des indications que J. a notées au téléphone quand Sm. les lui expliquait, mais j'annonce tous les prochains virages que M. doit faire avant lui. Le shtroumph grognon dit que je lui vole tous les punchs. P. est plein d'humour, tout le temps. Oui, je me souviens, mais cette fois, la terre ne dort plus sous un manteau blanc, elle ondoie de multiples teintes de vert. J., qui venait pour la première fois, dit qu'ici qu'on constate l'infini du Québec.

C'est un Sm. heureux qui nous accueille. P. dit que Sm. est déguisé en épi de maïs parce qu'il porte un t-shirt jaune pétant et des baskets de skateux aux lacets de la même couleur flashante. Dans la maison ancestrale que son père retape petit à petit, le paternel est là justement, une bière à la main. Sm. et lui sont en train de préparer des tartiflettes, plat rapporté par Sm. d'un voyage en Europe. Attentionné, Sm. en prépare une sans bacon pour J. et moi. M. qui aurait sans doute goûter à la version viandée s'abstient d'en manger quand le plat est déposé sur la table parce qu'il y a du reblechon. Le fromage coupe l'appétit de mon chéri à tout coup, à part sur la pizza. Un blocage culinaire associé à un traumatisme d'enfance.

Pendant que Sm. et son papa poursuivent la préparation du repas, Br. arrive avec sa petite-fille El. dans ses bras. Je leur trouve un air de famille évident et je la prends pour la mère. Jc., le papa de Sm., me dit que Br. est la grand-maman. Je comprendrai plus tard que Br. est l'amoureuse de Jc. et non la mère de Sm. De nos jours, il faut faire attention avec ses assomptions. Deux fins de semaine de suite, j'ai fait la gaffe de ne pas poser la bonne question: qui est relié à qui ici et de quelle façon? La semaine dernière, c'était Lr. et JF que j'ai associé père-fils parce qu'ils ont le même air taquin. En fait, Lr. est maintenant l'amoureux de la maman de JF, mais pas son papa. Familles reconstituées, quand tu nous tiens.

Sm. nous propose de sauter sur les quatre roues pour suivre le chemin qui traverse la terre de son père. Je suis énervée comme une gamine tant et tellement qu'une fois rendu au bout des champs, P. me propose d'enfourcher l'appareil qu'il conduit pour le retour. J. qui s'agrippe à moi me dit qu'elle me fait confiance. Et je pars avec un sourire étampé sur le visage. Après le souper, qui tombe dans nos estomacs comme une tonne de briques avec toutes ces patates, ces oignons, cette crème 35% et ce fromage, Sm. nous embarque à l'arrière d'un tracteur plus vieux que moi. À un moment, P. propose que je le conduise et Sm., patiemment, m'explique comment manipuler l'engin. M. prend des photos de moi et parce que la pénombre tombe rapidement pour faire place à la nuit, le flash clignote avant de se décider à saisir le moment. M. est Thor sur un chemin de terre à St-Cuthbert.

Sm. nous emmène jusque dans un boisé où s'élèvent des hêtres et de la pruche, deux essences rares au Québec. Là, il y a une cabane à sucre, la première que J. voit dans sa vie. C'est une bâtisse toute petite pour faire une production privée. Pour revenir, Sm. embraye la troisième et le tracteur roule à toute allure pour rentrer au bercail. En descendant, J. et moi on repart sur le chemin pour faire une marche santé. La tonne de brique nous pèse encore sur l'estomac. Elle me parle de sa mère et de son père, de leurs vies pendant que la lampe de poche que je trimballe projète des ombres à nos pieds et sur les arbres de la pinède.

À notre retour, on mange une pointe du gâteau rose fluo aux fraises que je suis allée chercher chez Première Moisson. Je raconte comment la fille qui a pris ma commande ne pigeait rien de ce que je lui disais à cause de mon accent. Ça grouillait de Françaises derrière le comptoir de la boulangerie. J. rit aux éclats et P. fait la remarque qu'il y a plus de Français que jamais en ville. Sm. dit que c'est parce que les cours reprennent.

Après, on se dirige au feu, près de la ferme. Deux amis de Sm., Mr. et Ch., viennent d'arriver dans leur 323. Les dreadlocks de Mr. sont beaux à présents et plus tard, elle chantera avec brio une chanson de Tryo accompagnée par Ch. à la guitare de P. On joue de la musique et à des jeux de logique. Ct., une autre amie de Sm. que l'on connaît pour l'avoir vue ici même au mois de février, comme Mr d'ailleurs, pendant notre fameuse partie de hockey sur l'étang, débarque et nous raconte qu'elle et son amoureux ont ramené des punaises de leur voyage à Cuba. L'enfer. Elle nous explique comment faire disparaître ces minuscules bêtes suceuses de sang d'un logement. Je me rappelle de la fois au cégep où la gale avait contaminé nombreux d'étudiants dont moi. Cet araignée microscopique qui pond sous la peau est une satanée bestiole. Étape par étape, il faut tout aseptiser, mais se débarasser des punaises, c'est plus heavy encore. Nous plaignons tous la pauvre Ct.

On fait l'accolade à notre cher Sm. et on rembarque dans Jasmine. Je mets du Bob Marley pour me tenir réveiller en chantant. Les trois autres tombent tous endormis, mais M. se réveille en passant le pont Legardeur pour me tenir compagnie et s'assurer que je prends les bonnes sorties. J. et P. se réveillent quand le véhicule s'immobilisent à destination. Je fais un pipi parce que ma vessie ne tiendra pas le coup jusqu'à l'autre rive. Je traverse pour la première fois le pont Victoria en conduisant. On arrive, on se brosse les dents et je dois dire à M. de se taire pour enfin m'endormir. Je sombre subito. Ça fesait 21 heures que j'étais réveillée.