Bon, je sais, la St-Valentin c'est ringard et bla bla bli, bla bla bla. Trop commercial, trop quétaine, tellement ridicule de dire je t'aime parce que c'est la fête de l'amour! Eh bien oui, c'est tout cela si vous voulez, mais ce peut être aussi ce jour-là que les gens choisissent pour se permettre un peu de répit, un peu de parfum de rose, un peu d'érotisme, un plus long baiser dans un coin plus sombre ou à la vue de tous, pourquoi pas après tout?
Ce que j'aime de M., c'est la simplicité qu'il déploie avec des manières de géant. Il m'ébranle avec des moyens de gamin. Ce coeur bombé, c'est une surprise qui a fait jaillir un sourire immense au creux de toutes mes pores. Ce que j'aime de lui aussi, c'est que notre sortie au restaurant Rumi d'hier soir, c'est une soirée vraiment spéciale. Monsieur n'aime pas les restos au quotidien et quand nous y allons, c'est parce que le moment est le bon. Tout fût excellent, jusqu'à lui qui gambade par-dessus les bancs de neige pour arriver à l'arrêt d'autobus en même temps que l'engin. Sous le viaduc de la rue Jarry, en rentrant, il s'amuse à marcher à reculons en glissant les pieds et il rigole en nous imaginant toujours nous déplacer ainsi. Pourquoi pas? qu'il demande avec son coeur d'enfant qui s'émerveille d'un rien. Il y a des étoiles qui explosent dans sa tête et de la barbe à papa lie ses neurones.
Et dans le froid et dans la neige balayée par des coups de vent à faire frissonner le yéti, nous étions bien. Nous sommes les enfants d'un pays de neige. Et même si nos corps oublient la morsure du gel dans leur dorure de juillet, ils réussissent toujours à passer au travers cette saison grandiose.
Quand je sors de chez moi dernièrement, je suis un être difforme coincé dans un habit boursoufflé qui me protège du souffle des mois blancs. Je suis bien dans mon manteau en duvet, avec mes mitaines immenses - Pl. du onzième dit qu'elles sont parfaites pour retirer des plats chauds du four -, mon foulard en laine d'apalga, mes bottes à l'épreuve de la gadoue et ma tuque bleu électrique en tissu éponge. D'ailleurs, l'autre jour, GM m'a reconnue dans un stationnement de Laval pendant qu'elle roulait sur une voie de sortie de l'autoroute à cause d'une tache bleue qui a accroché son oeil. Les cyclistes ont leur petite lumière clignotante, j'ai ma tuque. M. n'aime pas ma tuque. Moi, je trouve qu'elle fait ressortir le bleu de mes yeux pers.
L'hiver, il fait froid. C'est notre lot à nous, habitants des parallèles supérieurs de cette planète. Et puis, il y en a toujours qui se plaignent. Pas de neige au mois de décembre, c'est la fin du monde, trop de neige en février, c'est l'enfer sur les routes! Bon, je l'avoue, je suis de ceux qui craignent ne plus voir un jour le tapis immaculé se dérouler dans un avenir rapproché, mais ces jours-ci, je file le parfait bonheur. Le froid fait couler mon nez et rougir mes joues. Mes cheveux sont plats et en bataille - en fait, ils sont toujours comme ça! - et trimballer mon attirail dans les entrailles souterraines n'est pas une tâche facile, mais c'est comme ça, ici l'hiver, il faut s'adapter, se transformer. N'est-ce pas que nous sommes chanceux de voir les visages de Dame Nature changer avec autant de proximité et de précision? N'est-ce pas que la saison froide est aussi celle des chocolats chauds mi-amers, des corps enroulés et avides, du silence solennel des nuits noires aux flocons lourds et légers ressemblant à des bouts de cumulus déchiquetés par des anges? Et bien sûr, c'est aussi l'occasion de la St-Valentin. Han-han!