orphelins de l'Éden

1.27.2010

bulle, perle, pupille, lune, cellule

Je l'aime. Je l'aime tellement que je me demande comment ce sera possible de porter un sentiment aussi puissant, grandissant de manière aussi fulgurante, sans un jour éclater en morceaux. Je le trouve si beau, si parfait. Je tente de dompter mon cerveau pour qu'il se souvienne de lui si petit. Mon garçon. Qui me regarde avec des yeux intelligents. Je suis certaine qu'il comprend tout ce que je lui dis, tout ce que je lui transmets. Je le suis parce qu'il me regarde avec ses yeux si intelligents et qu'il réagit en conséquence. Il sait que je suis à l'écoute de ses réactions. Et comme cela, nous provoquons un cercle d'actions qui nous soudent.

1.19.2010

fil d'arrivée

Je ponds mon premier message depuis notre nouveau bureau. M. a presque presque presque terminé sa grande oeuvre et en fin de semaine, nous nous attaquons au méga ménage qui nous guette de son bordel dément. Paperasse à ordonner, objets hétéroclites à trier afin de se départir de quelques-uns d'entre eux, murs et plafonds à laver, mobilier à déplacer. Une grosse job de bras en perspective. Mais si peu de boulot comparativement aux centaines d'heures chargées que mon amoureux a suées dans ce sous-sol maintenant partiellement aménagé. Je suis toute essoufflée juste à l'idée de tout ce qu'il a accompli depuis ce jour d'août dernier où il a décidé que le moment était venu d'entamer le chantier. M., mon héros. Tu m'impressionnes.

1.15.2010

Tu sais, je suis

Lorsque j'étais étudiante au bac, mon premier gros travail universitaire fut rédigé dans le cadre d'un cours portant sur les Livres bibliques de l'Ancien Testament. J'avais choisi d'étudier plus en profondeur un livre complexe et long, rédigé en versets, celui de Job. J'aimais la prémisse de cette leçon moralisatrice.

Satan, qui dans ce Livre apparaît comme étant un membre de la cour de Dieu, une particularité unique dans toute la Bible, demande que l'on mette Job à l'épreuve. Son argument béton pour ce faire c'est que Job est le serviteur de Dieu le plus pieu parce qu'il a tout: richesses, troupeaux immenses et famille nombreuse. Selon Satan, qui est aussi appelé L'Adversaire dans certaines traductions du livre saint, il faut tester Job, le dépouiller de ses biens pour voir s'il continuera à vénérer Dieu.

Dieu lui accorde la permission d'affliger Job, ce que Satan s'empresse de faire en réduisant sa fortune à néant, ce qui n'est rien par rapport à la mort qui happe ses dix enfants. Job, avec sagesse, dit quelque chose du genre: "Nu, je suis né devant Dieu, nu je retournerai à lui." Satan demande à Dieu d'affliger la personne même de Job, ce qui lui est accordé en autant qu'il ne le tue pas. Job devient terriblement souffrant d'une espèce de peste qui l'oblige à aller vivre en retrait de la communauté, sur un tas de fumier. La femme de Job lui implore de maudire Dieu qui l'afflige, trois de ses amis arrivent pour le convaincre d'avouer ses torts - parce que selon eux, si Dieu le punit, c'est qu'il a péché -, un quatrième ami lui dit que Dieu décide de tout et qu'il doit l'accepter, ce que Job fait déjà.


Au final, Dieu restaure la fortune de Job et lui redonne dix autres enfants, quand, même après moult souffrances, il aime le Créateur au-dessus de tout, et accepte tout de Lui.

Si je vous parle de Job, c'est que je repense à lui ces jours-ci. Souffrant encore dans mon allaitement, qui devrait être naturel si l'on se fie au fait tout simple que j'ai des seins et que mon bébé doit pouvoir téter tout naturellement justement, je me suis demandée plus tôt cette semaine pourquoi Dieu m'infligeait ce défi colossal. Job, lui, était plus sage que moi. "Si Dieu le veut" suffisait à le ramener dans le voie de l'acceptation paisible, très bouddhiste d'ailleurs, à part que dans le bouddhisme, c'est le concept plus philosophique de l'éveil qui l'emporte sur celui d'un Dieu.

Allaitement souffrant, accouchement par césarienne pour cause de présentation par le siège, dilatation du bassinet droit de garçon, très long moment d'incertitude avant de finalement concevoir. Pourquoi. Tous ces défis, toutes ces épreuves qui teintent amèrement celle-là même de vivre le miracle de la vie.

Mais en y regardant de plus près, en y réfléchissant juste un peu plus, je comprends bien que l'important, c'est de pouvoir profiter de ce miracle de la vie, de pouvoir m'émerveiller devant ces bruits de joie et ces beaux yeux bleus aux longs cils. Dieu au fond savait ce qui nous attendait dans toute cette aventure. Peut-être attendait-il que je sois assez forte, prête à tenir dans l'adversité.

Et que sont mes défis face à ceux du peuple haïtien. Bien peu de chose me dis-je, bien peu de chose. Ils tapent dans leurs mains en chantant Dieu, malgré les dizaines de milliers de cadavres qui les entourent. Souffrir, mais tenir bon. Sagement.

1.08.2010

résolution

Le soir de la veille du jour de l'an, la lune était pleine dans le ciel nuageux. En plus, ma mère m'annonça quelques jours plus tard que c'était ce qu'on appelle une "blue moon" puisque c'était la deuxième du mois, phénomène qui ne se produit qu'à tous les deux ou trois ans. Terminer la première décennie du troisième millénaire sous cette treizième pastille luminescente, n'est-ce pas de bon augure? Seul le futur nous le révélera.

Il nous révélera combien chanceux nous sommes d'encore tenir bon sur le dos de la planète bleue malgré toutes nos saloperies. Parce que l'humanité est saloparde, nul doute là-dessus. Comme proposé dans le film The Matrix, notre espèce se comporte en véritable parasite. Elle s'installe et détruit, se multiplie et pille, gaspille et pollue. C'est aujourd'hui connu. Oui, et après?

Après, il faut bien dormir la nuit et manger sainement pour vivre avec équilibre, par respect pour cette force vitale qui coule dans nos veines. Mais plus encore, il faut se brancher sur cette énergie qui anime toutes choses pour réaliser à quel point nous avons de la veine. Une chance pas possible, une occasion en or. Il faut se débarbouiller de la désillusion, se curer du cynisme caduc, retrousser nos manches et embrasser nos destins. Personne ne nous sauvera à part chacun d'entre nous, pour nous. Tous.