ceci n'est pas une pipe
Nougat le gros chat fait le pot de colle. Parfois, comme il y a quelques minutes à peine, elle bondit sur le repose-pied du fauteuil beige à côté de mon bureau d'écriture, passe au dit siège pour ensuite se hisser sur le plateau du bureau avec la seule force de ses pattes avant. Dans un élan, tout son corps massif balance sur le bureau et la voilà envahissant mon espace de travail pour recevoir quelques caresses. Maman, je suis là, tu ne peux pas me manquer n'est-ce pas? Alors flatte-moi le flanc et plonge ton visage dans ma fourrure soyeuse pour me donner des bisous pendant que je frotte mon museau sur les coins du meuble afin d'y imprégner mes phéromones. Belle panthère va.
Je reviens à peine de ma journée au onzième. Pendant mon heure de dîner, je suis allée à la Grande Bibliothèque afin d'y dénicher mes bouquins copains des prochains jours. J'ai mis la main sur deux romans format poche de la section nouveauté. Mon choix s'est arrêté sur ceux-là après avoir lu en diagonale le résumé à l'arrière de la jaquette. De la lecture légère, facile.
C'est environ à ce moment-là que mon mal de bloc a commencé. Dans le métro, à mon retour au onzième, j'ai eu une bouffée de chaleur pas possible. Mes paupières sont devenues des chapes de plomb et mes tempes m'ont semblé trop étroites tout à coup, tendues par le mal battant derrière elles à chaque flux sanguin.
Alors parce que j'y pense depuis quelques jours, je me dis que cette douleur, elle peut peut-être m'inspirer. Voyez-vous, je vous offrir un haïku, un de ces petits poèmes abstraits. Idéalement, il me faudrait le rédiger en japonais pour respecter sa construction typique de dix-sept mores. Bon le terme "more" ne se retrouve pas défini dans le Petit Robert, cet outil indispensable à ma bonne rédaction, mais plutôt sur Wikipédia où l'on dit d'elle qu'elle "est un son élémentaire émis lors de la phonation". Dans le dictionnaire, il est dit qu'un haïku est un "poème classique japonais de dix-sept syllabes réparties en trois vers (5, 7, 5)." Moi, c'est dans les Clochards Célestes de Jack Kerouac que j'ai connus ces courts amas de mots. Un haïku peut être utilisé par un maître spirituel désirant amener sa pupille au-delà afin qu'il franchisse le mur du convenu pour ainsi accéder au domaine de tous les possibles. Ce poème est donc terriblement simple et terriblement complexe à la fois. Kerouac, qui revenait au bercail dans ce récit autobiographique, faisait le poirier et composait de ses courts poèmes pour s'élever.
Donc voilà, je me lance:
Douleur palpable
devient vraie pour celui
qui abandonne
Oh la, la, je crois que ça y est, j'ai réussi. Mon premier haïku. J'aurais pu aussi choisir comme premier vers:
Souffrance vive
mais je crois que le choix de "douleur palpable" apporte une matérialité, un élément incarné qui ajoute un obstacle majeur puisque le mental est celui qui a emprise sur le corps, l'esprit étant le chef d'orchestre. Comment alors ne pas dire d'une douleur palpable qu'elle soit vraie? Si mon doigt peut venir se déposer sur la source du mal, comment ne pas y accorder sa dose de réalité et donc d'existence? Comment alors ne pas s'abandonner à cette idée qu'elle soit vraie? Et donc ne pas ainsi s'abandonner à la douleur elle-même?
J'ai mal à la tête. Vous l'ai-je dit?
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