orphelins de l'Éden

9.13.2006

tout près

Pendant que M. apprend les événements de cet après-midi en écoutant les témoignages et les reportages qui s'enchaînent sur l'écran, je me dis que parfois, le malheur frappe bien près. Je travaille à deux pas du Collège Dawson. Je passe à tous les matins dans le centre Alexis-Nihon pour ensuite filer sur Sainte-Catherine, direction boulot. Ce midi, je suis allée marcher avec ma mère. Nous avons atteint la rue Guy pour ensuite remonter vers Sherbrooke. Je voulais prendre la rue Maisonneuve, - rue où semble s'être amorcée la fusillade encore inexpliquée - mais ma mère a vu un homme promené un chien blessé sans doute par des combats à paris, et lança "je ne veux pas croiser d'autres êtres fuckés comme lui et de toute façon, la rue Sherbrooke, c'est plus beau", alors nous y sommes allées terminer notre marche.

De retour vers le bureau, nous avons vu un policier à moto arriver à toute allure sur Sainte-Catherine et bloquer la circulation tournant vers l'est à partir de Greene. "Eh bien...", que nous nous sommes dites, sans nous douter de la gravité des événements se déroulant à peine quelques centaines de mètres plus loin, derrière les édifices du Westmount Square.

Au onzième, des collègues ont parlé de fusillade. Puis d'autres sont revenus de la petite cuisine où se niche un petit téléviseur en annonçant au compte-gouttes le déroulement de la situation "live" si près de nous: ils sont deux à avoir ouvert le feu sur des étudiants du Collège. Et puis, ma soeur G., qui travaille aussi au onzième, m'appelle pour me dire qu'elle et Vé., mon amie et collègue, sont au Winners, qui a fermé ses portes parce qu'il y a eu un coup de feu. Elles sont en sécurité, il ne faut pas s'inquiéter. Pendant ce temps, deux autres collègues reviennent de l'extérieur et racontent comment elles ont été happées dans un courant de panique due à l'arrivée d'un tireur dans la Place Alexis-Nihon. Elles se sont réfugiés dans l'arrière-boutique du magasin Un Dollar, après avoir sauté par-dessus une barrière. Du cinéma, un véritable cauchemar.

Je vais avertir ma mère que G. est en sécurité, mais qu'elle est près de l'action, de la mauvaise action, de la réalité qui fait peur, qui fait une boule dans le plexus, qui scie, ma soeur. Ma mère me prend dans ses bras. Je vais bien, ça va. Je sais que G. est à l'abri. Je sais que ces gens - il semblerait qu'ils sont quatre maintenant - sont désespérés, désaxés. Ça ne pardonne en rien leur geste dont je ne connais pas encore les conséquences. Pourtant, les premiers bilans commencent à s'afficher sur l'écran du téléviseur. Sur une bande au bas, on lit qu'ils sont douze blessés. Il y aurait peut-être un des attaquants qui aurait été tué par les policiers et peut-être qu'un autre d'entre eux s'est enlevé la vie.

G. et Vé. arrivent. G. se dirige rapidement vers moi, les yeux pleins d'eau, elle est une fillette de quatre ans qui vient de voir un monstre sous son lit, immense le monstre, toute petite la fillette qui se blottit à moi fébrilement. Je l'enveloppe pendant que Vé. s'assoit sur une chaise, glacée, des larmes coulant de ses yeux bleus qui renvoient un regard vide, troublé. Elle décroche rapidement un combiné pour parler avec son amoureux. J'ouvre mes bras et le visage de G. s'anime soudain et elle nous raconte qu'elle était en train de regarder des manteaux quand un coup de feu a retentit tout près. Des gens se sont ameutés à l'intérieur et un commis a demandé ce qui se passait. G. lui aurait dit "fermez les portes" et les portes se sont fermées. Derrière, elle a retrouvé Vé. qui était là, tout près, elle aussi.

Vers 14 h 20, des sirènes hurlaient encore et la consigne des patrons du onzième indiquait que peut-être que nous ne pourrions pas partir comme prévu à 3 h 30, compte tenu de la situation. Selon les informations, un ou des tireurs pouvaient encore être embusqués non loin, tout près. Il fallait que le périmètre soit sécurisé. Quelqu'un a dit "ça ressemble au nine-eleven", date tout près d'aujourd'hui. Bien sûr, pour moi, ça ressemblait plus à un Columbine qui aurait dégénéré si une telle chose est possible. Un débordement des attaquants qui avaient sans doute prévu ébranler le Collège et non le quartier au complet. Une bavure, dans une situation extrême, ce n'est pas surprenant. Dans la tête des assaillants, ça devait courir à mille kilomètres à l'heure et une fois dispersés, ils ont dû réagir comme ils ont pu sous la pression. Chacun pour soi. Le hic, c'est qu'on est jamais seul. Même seuls avec nous-mêmes, il peut y avoir un ennemi. Le preuve, c'est le désastre d'aujourd'hui.

1 Comments:

At 9:52 p.m., Anonymous Anonyme said...

Bonjour,
j'étais dans les bureau de mon école au niveau de Maisonneuve/Bleury quand ça s'est produit.. Nous n'étions au courant de rien. À l'heure du lunch nous avions décidé de sortir prendre l'air et d'aller plus vers l'ouest pour prendre l'air.. Nous n'étions rendu qu'au niveau de la rue de la montagn sur ste-catherine mais sans savoir ce qui se passait déjà on trouvait qu'il y avait beaucoup de monde sur la rue, sur le trotoire..
C,est en rentrant dans l'école , un peu plus vers l'est que j'ai dis à ma copine " hey tu as vu l'hélico, elle fait du sur place, c'est rare" Et nous deux de rigoler en pensant que l'hélico était attachée par un fil vers le sol.. Hélico à l'hélium...

C'est quelques minutes plus tard qu'on a tous compris ce qui se passait à moins de 10 minutes de notre emplacement..
Ce qui me fait personnellement peur, c,est qu'au départ on a parlé de 4 suspects.. et que maintenant on parle d'un seul .....
Et pourtant il y a eu simultanément des coups de feux à la place Alexis-NIhon ET à Dawson... il ne devait donc pas être seul...............................................

 

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