orphelins de l'Éden

2.27.2013

salut à toi

Février court et interminable à la fois.  Vingt-quatre ans que mon père est décédé la semaine dernière.  Quatre ans que garçon a été conçu deux semaines avant celle-là.  Février, mois de grands bouleversements, sur toile de froid blanc.  Plus le pire de tous les douze dans mon coeur cependant, plus depuis qu'il m'a donné mon premier enfant, malgré qu'il m'ait pris mon père.

Ce lundi-là, j'ai pensé que vingt-quatre ans, c'est un plus que deux fois l'âge que j'avais quand tu es tombé, blessé gravement, pour t'éteindre éternellement un mois après l'accident.  Onze ans que j'avais.  Dans une autre vie me semble-t-il.  Dans un autre espace-temps très certainement.

Aujourd'hui, si tu étais à un coup de téléphone près, je te dirais des choses simples sans doute, peut-être combien j'aime les cardinaux qui se perchent aux cimes des feuillus dénudés comme autant de taches de sang dans un système de capillaires.  Que quand je les vois, c'est un peu comme si la vie me faisait un clin d'oeil.  Que même seule dans les rues, à pousser fillette alanguie par l'air frais et le décor monotone de la banlieue défilant régulièrement, je me sens accompagnée lorsqu'un d'eux vient me saluer de son appel franc et joli, que mon oreille a appris à distinguer des autres trilles saturant le vent afin de m'aider à les repérer.  Que si les anges existent, ils en sont, version vermillon.

Quelques fois par année, je serais avec toi.  À Noël par exemple, ou Pâques, pourquoi pas.  Sûrement que tu habiterais encore la maison où j'ai grandi, que tu habiterais en fait surtout ton immense garage, là où tu aimais tant te salir les mains à les plonger dans la mécanique de tes Harley chéries.  Garçon s'installerait à tes côtés, sur un banc, pour te regarder manipuler les outils, les pièces.  Oui, sûrement qu'il pourrait avoir ces souvenirs-là, par toi.  L'odeur de graisse, la musique de ta radio, la complexité d'un bolide à deux roues, la profondeur de ton silence.

Mois fantomatique, pendant lequel mon âme tangue au gré du spleen.  Les émotions se succèdent discrètement et me transforme en pèlerine.  Dans elles, je me laisse me redécouvrir.  Demain, toujours, tout va refleurir.  

1 Comments:

At 11:54 p.m., Anonymous Joanna said...

je suis très touchée par ton texte, ôde à ton père, lettre à ton père.
ca doit être bouleversant de vivre la mort de l'un de nos deux piliers si jeune.
ca a sûrement dû façonner qui tu es.
et te blesser bcp aussi.
c'est dur tout ça.
je sais pas si ça peut faire qqch, mais, qqn m'a dit un jour qu'on se réincarne et qu'on croise toujours les même personnes de vie en vie... alors peut être ton père reviendra dans ta vie sous une autre forme, ou tu le reverras dans la prochaine?
je t'embrasse et t'envois de belles pensées pr ce mois si riche et intense en émotions pr toi.
au fait, connais-tu la chançon Février de Vincent Vallières? je l'aime bcp, pr moi cette chançon, c'est vraiment l'hymne du québec!
bisous
Joanna

 

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