orphelins de l'Éden

8.13.2012

la base

Hier soir, nous avons reçu nos amis-voisins Brésiliens à souper.  Juste avant que nous ne passions à table, je dis à An. de déposer fillette en pleurs par terre, de ne pas s'inquiéter qu'elle s'occupera là pendant que nous mangeons.  An. me regarde, hésite, puis suis mon conseil.  De fait, fillette se calme, joue avec un objet qu'elle trouve à portée, vient me rejoindre en rampant et s'amuse à essayer de se hisser à l'aide de la patte de ma chaise - eh oui, miss l'ambitieuse veut se tenir debout depuis une grosse semaine, dans le bain, sur le bord de l'îlet, par exemple.

Comment le savais-tu, qu'An. me demande.  Qu'est-ce que tu veux dire, comment je savais quoi, qu'elle se calmerait.  C'est mon enfant, nous sommes en fusion depuis sa naissance.  Nous sommes connectées l'une à l'autre.  Pas de mystère à cela.  Il me suffit d'être à son écoute et de la suivre dans son évolution.  An. m'explique qu'encore à ce jour, avec É., son garçon qui aura trois ans dans une semaine, elle doit toujours l'accompagner dans ses moments de jeux à la maison, qu'il n'arrive pas à s'occuper seul, que sinon, c'est inévitable, il fait des choses qu'il ne doit pas faire ou se fourre dans des situations pas possibles.

Nos voisins Brésiliens en sont à espérer leur deuxième enfant.  Normal donc qu'ils se préparent à revivre depuis le début une relation enfant-parent, surtout que leur seule expérience a été en quelque sorte rock and roll.  É. fut un bébé extrêmement demandant selon leurs dires, n'arrivant pas à dormir ailleurs que dans les bras de sa maman, même la nuit, pendant ses sept premiers mois, jusqu'à ce qu'ils ne fassent appel à une sleep doula qui a réussi à changer cette situation afin qu'An. trouve enfin un peu de répit.  Aussi, É. avait constamment besoin d'être stimulé, sinon il pleurait beaucoup.  Il a commencé à se mouvoir très rapidement.  Il n'a jamais voulu qu'An. ne parvienne à faire ses tâches ménagères, chignant pour avoir son attention.

Ils se demandent s'ils peuvent prévenir de tels comportements chez leur deuxième enfant.  An. et T. sont des gens éduqués, qui ont lu à propos de l'éducation des enfants, qui se posent des questions, qui cherchent des réponses.  Malgré tout cela, ils n'arrivent pas à instaurer une saine discipline auprès de leur garçon.  Ils ont entre autres recours à des time out, qui ne fonctionnent pas puisque É. répète souvent le comportement malheureux à peine sorti de ce moment d'arrêt forcé.

É. est un garçon brillant.  Il a commencé à parler très tôt.  Avant ses dix-huit mois, il comptait déjà jusqu'à dix et nommait une panoplie d'animaux.  Il parle le portugais avec ses parents et il a appris le français en fréquentant sa garderie.  Mais tout cela ne change rien au fait qu'il est une véritable girouette qui a toujours besoin de bouger, de tout souffler sur son passage.

Quand je réponds à la question d'An., ils me regardent avec l'espoir que je ne leur dévoile un secret précieux.  Tout ce que je peux vous dire, c'est de vous brancher à votre enfant, de lui donner toute la sécurité qu'il a besoin lorsqu'il est un nouveau-né, en le portant beaucoup par exemple, et de lui fournir des outils pour bien vivre son passage vers l'autonomie.  Si fillette est un serpent qui n'a pas peur d'explorer loin de moi, c'est que nous sommes allées progressivement et bien qu'elle ne se calme encore souvent que dans mes bras lorsqu'elle est fatiguée, elle est capable de passer de longs moments décollée de moi, à frapper par exemple des objets sur le sol afin de provoquer un bruit qui la fascine.

Se brancher sur son enfant pour lui insuffler la confiance par l'amour qui veille et protège, et qu'à son rythme, il se dégage de cette fusion qui l'a vu naître pour se découvrir source de vie.  Source de sa vie.