clic, il fait clair
Un éclair a zébré le ciel et sa lumière bleutée m'a fait sortir sur le balcon arrière pour voir cet orage se lever si subitement. Au loin, l'horizon ardoise mangeait le bleu à toute allure pendant que d'autres cumulonimbus grondaient. De retour à l'intérieur, il n'a fallu que quelques minutes pour qu'une de ces fameuses décharges électriques s'affaissent si près du paradis que la maison qui travaillait - comme le dit si joliment Urbain Desbois - s'éteigne d'un coup. Silencieux le lave-vaisselle, la sécheuse, l'air climatisé, le réfrigérateur, le déshumidificateur, les ventilateurs. Bang. Plus rien. C'était notre première vraie panne d'électricité depuis que nous sommes installés dans notre nid et dehors, le mercure oscillait autour d'une trentaine de degrés.
M. a remarqué que les maisons d'en face ne semblaient pas touchées. Il est sorti à l'arrière pour demander à nos voisins Algériens s'ils avaient toujours du courant et K. lui a répondu que non, d'ailleurs aurais-tu une chandelle à nous refiler. Faisant cela, M. est revenu avec le bon truc de cette cuisinière aguerrie de mettre notre viande du frigo au congélateur, au cas où cette coupure durerait toute la nuit.
On dit souvent que c'est lorsque nous venons à manquer de quelque chose que nous réalisons sa valeur.
En me mettant au lit hier soir dans notre paradis complètement endormi, je me suis souvenue combien la crise du verglas en 1998 avait bouleversé de vies, combien j'avais été chanceuse de vivre alors dans un logement qui n'avait manqué de cette précieuse électricité qui fait tout fonctionner ou à peu près tout dans nos chaumières qu'une heure à peine pendant ces deux semaines de grande noirceur. Trente degrés, c'est accablant, lourd, mais moins trente degrés, c'est terriblement menaçant, rien de moins. D'ailleurs, combien de foyers ont été installés dans les maisons après cette preuve de notre vulnérabilité face aux éléments.
Quand vers une heure du matin le répondeur a lancé "answer on, please wait for the beep", nous avons compris que la source d'énergie nous était redevenue accessible. Chacun de notre côté, nous nous sommes tirés du lit pour aller remettre en marche tous les appareils nécessaires à notre confort et puis apaisés, nous avons à nouveau sombrer, bien conscients de notre dépendance à cette invisible électricité.
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