orphelins de l'Éden

4.05.2009

souffle

Ce matin, installés dans Jasmine la Fit, j'ai dit à M. que nous assistions peut-être à la dernière chute de neige de l'année. Les flocons bourraient l'air de leur course folle et de la voiture à la porte principale du onzième, une marche de quelques pas seulement, je me suis félicitée d'avoir déterrée ma tuque pour me la caler sur ma tête tellement le vent froid mordait mes oreilles. Soubresaut hivernal avant l'envolée du beau temps. Juré, craché.

Il me semble dernièrement que les mots me manquent. Quand j'arrive ici pour livrer comme je le fais depuis deux ans et demi, j'hésite. J'ai l'impression que rien ne ressort de l'ordinaire, que rien ne se démarque assez pour que je vous le signifie à ma manière. Mes yeux continuent à voir pourtant, ma vie se perpétue joyeusement, mes rencontres se poursuivent, les gens qui m'entourent m'inspirent. Mais l'élan lui, on dirait qu'il est essoufflé.

D'ailleurs, vous vous souvenez peut-être de ce projet d'écriture dont je vous avais parlé au mois de décembre je crois, eh bien, la discipline a tenu à peine trois semaines. Trois semaines de labeur sérieux pour avancer dans cette idée que je croyais la bonne. Une idée assez bonne pour me motiver à aller jusqu'au bout. Mais voilà, un premier rendez-vous manqué avec le projet, une première plage horaire occupée autrement que par l'avancement dans ce projet, a suffi pour m'éloigner du droit chemin et m'égarer totalement face à mon engagement.

Lors d'une réunion familiale dernièrement, un oncle de M. m'a dit que je devrais dépersonnaliser mon écriture, explorer davantage le fictif, créer par imagination en utilisant mon langage. Il pense que ça m'aiderait à me rapprocher du succès. Encore une fois, je lui ai dis ce que vous savez déjà, je ne suis pas un auteur capable d'élaborer des univers, de faire naître des personnages, de tisser des toiles de cohérence impressionnantes. Je ne suis pas de la trempe des grands écrivains, ceux qui puisent dans un million de sujets pour arriver à pondre des oeuvres colossales. Mon talent, il tient dans l'humilité d'être humaine et outillée d'un vocabulaire me permettant de décrire certains faits merveilleux et simples, ou tout au moins certaines émotions, certains impressions.

Tiens, j'ai l'impression d'être loin de moi-même. Ça me vient là, en vous écrivant, en faisant courir mes doigts au rythme de mes pensées. J'ai l'impression d'être à côté de moi, en décalage. Est-ce toi petit être qui fait ta place sous le soleil? Est-ce toi qui me décolle le nez de mon nombril? Peut-être que l'oncle de M. m'a offert un présage. Peut-être que mon écriture changera. Peut-être aussi ce n'est qu'une passe, un moment à vivre afin de mieux revenir.