orphelins de l'Éden

3.29.2009

unique et semblable

C'est parce que j'ai participé à une réunion de famille hier soir que j'ai rêvé à une scène similaire. Nous étions nombreux, une salle pleine de gens attablés, quand j'ai pris la parole suite à une réplique lancée par quelqu'un. Tiens cette personne pourrait très bien être Cd., le conjoint de Pl., la soeur de Cl., maman de M. Cd. est un boute-en-train qui égaie une atmosphère en un rien de temps. Bref, ça aurait très bien pu être lui, dans mon rêve, qui a dit quelque chose qui m'a donné l'élan pour étayer le sujet de l'argent contrefait. Alors me voilà, debout parmi les convives attentifs, à expliquer en quoi cet acte criminel de fabriquer de la fausse monnaie mine l'économie de la société. À un moment, je pose même la question à l'assemblée: qui d'entre vous avez déjà tenu dans vos mains un faux billet? Du groupe, un quart lève sa main. Une personne sur quatre, pensais-je, et ça c'est seulement ceux qui ont réussi à détecter le subterfuge.

Étrange comment l'esprit va prendre des éléments du jour qui vient de passer pour les mixer avec des informations flottantes dans la mémoire pour livrer le cocktail songe. Dans mon cas, les mixtures sont depuis longtemps farfelues parce que nourrir mon vidéo nocturne à longueur d'heures dormies, ça demande une certaine gymnastique de l'imagination. Ainsi, une nuit comme celle que je viens de passer, ça signifie deux ou trois atmosphères, déclinées subtilement pour bourrer l'écran de la semi-conscience. Par exemple, le dernier univers d'avant me lever ce matin, comportait principalement un lieu de restauration rapide, avec comptoirs, et une armée d'employés tout de noir vêtu. Ce lieu se trouvait au sous-sol et les étages supérieures donnaient toutes sur un coeur ouvert, une aire s'élevant jusqu'au plafond. J'ai circulé dans cet espace multi-étagé pendant environ deux heures, de mon pipi du matin de 6 h 41 à mon lever vers 7 h 59. J'ai rencontré des gens que je ne connais pas réellement, j'ai joggé sur une passerelle en grillage solide, j'ai pris des photographies de l'espace resto parce que je savais que l'endroit fermait bientôt. Bref, je me suis réveillée sans avoir l'impression de devoir commencer ma journée. Je me suis réveillée avec ce corps qui devait à présent se mouvoir ailleurs, le temps de quelques heures.

Dimanche au ciel gonflé de pluie. Quatre semaines, jour pour jour, que je sais que tu existes petit être. Nous vivons notre septième semaine et hier, à la réunion de famille du côté de la maman de M., nous avons reçu une foule de voeux de bonheur et de souhaits de belle grossesse. J'ai perçu plusieurs regards sur mon abdomen, à la recherche d'un renflement notable. Mais non, mon corps n'a pas encore commencé à se transformer. À part peut-être à mes yeux, ceux qui se portent sur lui à tous les jours. Eux remarquent que mon ventre est un peu plus enflé que normalement et que mes seins s'alourdissent petit peu par petit peu. Ça ton papa aussi l'a bien vu.

Pendant le repas, j'étais assise à côté de Cr., une cousine de M. La dernière fois que nous nous étions croisées, c'était en septembre, lors d'une réunion semblable avec pour prétexte heureux un anniversaire. Cr. avait alors annoncé sa deuxième grossesse, avec son petit Js. dans les bras. Son petit homme était là hier, installé dans sa chaise haute, grand de ses quinze mois et elle s'en occupait tout naturellement. Elle et son amoureux, J-N. Et une foule d'autres gens qui voulaient chasser ses pleurs, le divertir de sa fatigue. Ses grands-parents, sa tante, quelques proches parents. Lorsque nous sommes partis autour de 22 h, Js. ne dormait toujours pas, trop conscient de cette occasion exceptionnelle de pouvoir étirer le jour. Il paraît qu'habituellement Js. se met au lit lui-même quand sa maman lui dit que c'est l'heure du dodo. Peut-être qu'il rêve toutes les nuits lui aussi et qu'il plane dans des univers assez stimulants pour combler ces heures d'allongement solitaire. Peut-être qu'il aime être enveloppé au chaud tout simplement et se laisser aller à l'engourdissement du sommeil. Peut-être se regénère-t-il présentement pour devenir des années plus tard comme un de ses grands-oncles capable de recharger ses batteries avec une poignée d'heures de sommeil par nuit seulement.

Cinq heures c'est une bonne nuit pour Nr., le fêté d'hier. Nous étions là pour souligner ces cinquante ans. Pendant leur discours à l'attention de leur père, ses filles ont mentionné combien elles étaient fières de lui et contentes de le voir enfin arriver au bout de toutes ces années d'études. Nr. complétera sa deuxième maîtrise en juin. Il est de ce genre d'individus qui accomplissent beaucoup dans leur journée. Conciliation de la famille, du travail, des études. Dans son cas, le fait de dormir si peu d'heures par nuit a sûrement contribué à ce rythme éreintant, mais ô combien gratifiant.

L'esprit occupé n'est pas un esprit laissé à lui-même et un esprit laissé à lui-même doit apprendre à s'apaiser pour éventuellement créer. Tout n'est qu'une question d'équilibre et chacun porte en lui les doses propices à l'accomplissement d'un tel état. Seulement, il n'y a pas deux dosages pareils. Nous sommes tous livrés à nous-mêmes. Tous livrés à nous-mêmes, mais aussi tous branchés à la source. À nous de nous épauler au nom de cette mission parfois et souvent trop immense, trop intimidante, trop overwellming. À nous de jongler, en plus d'être funambules.