orphelins de l'Éden

4.07.2009

reconnaître

Parfois, il suffit de briser la routine, de changer son itinéraire, de revoir une amie perdue de vue depuis plusieurs années, pour retrouver des mots.

Journée de congé, autant dire journée de multiples possibilités. Un rendez-vous en matinée à la hauteur de la porte de la Petite Italie via St-Laurent et voilà, je replonge dans ma Montréal avec le bonheur d'un poisson dans l'eau. Malgré le parapluie qui vire sous le souffle des vents, les retards d'autobus et de métro, mes minutes dépassées l'heure prévue pour la rencontre ce qui a de quoi contrariée une ponctuelle telle que moi, je suis sur le bitume. Je suis à nouveau voyageuse, dévorant les visages et les vitrines, avalant les mètres à grandes enjambées dans des rues que je n'avais pas parcourues depuis trop longtemps.

Elle m'attend. Je vois son visage s'illuminer lorsqu'il aperçoit ma silhouette se dessiner au loin. Elle me cherchait justement, se demandant si cet endroit minuscule comme un garde-robe était bien le bon. Presque six ans que nous ne nous sommes vues, nous qui avons été soudées pendant des années. C'est Ct., une maille du cercle que j'ai formé avec trois bonnes amies au cours de mon adolescence. Ct., ma première meilleure amie à Montréal, lorsque j'y suis arrivée à l'âge de neuf ans. Ct. aux yeux de chat couleur eau tropicale cristalline. Ma partenaire pour Expo Science, celle chez qui je découchais parfois en me réveillant ces fois-là au son de la voix de Joël Le Bigot.

Nous nous sommes attablées à une pièce de verre ronde, juchées sur de hauts bancs, et d'un sujet à l'autre, du coq à l'âne surtout, nous avons comblé quelques blancs de tout ce temps passé séparées. Un peu de moi, un peu d'elle, un véritable set chaleureux, au débit naturel, sans creux inconfortable, sans paroles factices. Des heures de partage, sous d'heureux auspices. Pour la suite, nous verrâmes comme dirait l'autre.

J'ai poursuivi mon petit bonhomme de chemin au Yéti, boutique de plein air où je voulais dénicher chaussure à mon pied. Plusieurs paires testées plus tard, j'ai finalement opté pour des ballerines couleur crème hyper confortables. En grande marcheuse, je suis consciente du choix judicieux de souliers bien conçus procurant un bienfait intégral, surtout que ces mois qui viennent, je grossirai à vue d'oeil. Maman m'avait recommandé le fabricant Keen et bien que j'aie essayé de nombreux d'autres modèles de d'autres concepteurs de godasses - Patagonia, Merell, North Face -, c'est avec un de leurs produits que je suis repartie de la boutique. M. les aime bien. Moi, j'ai l'impression de glisser mes petons dans des pantoufles.

Ensuite, je suis aller engloutir une salade multicolore bourrée de légumes crus râpés nappés d'une vinaigrette aux herbes fraîches Aux Vivres. Ma faim violente et soudaine est sans conteste un symptôme de ma grossesse.

Rassasiée, je me suis rendue dans le sud de la ville pour faire mes adieux à nos anciens charmants voisins qui quittent demain pour quatre mois et demi, direction l'Asie du Sud. Le petit Mt. s'est endormi dans mes bras pour ensuite se réveiller le temps de signifier une envie de pipi. J'ai pris Jn. et P. dans mes bras et je leur ai souhaité bon voyage à ces êtres originaux, aimants, dédiés à la vie bien vécue. Leur initiative atypique me les rend encore plus superbes. Ils ont le courage de leurs idées et la conscience prudente nécessaire à la faisabilité de cette aventure incluant leur bébé de deux mois. Ils ont aussi l'expérience du monde. J'ai totalement confiance qu'ils en reviendront ressourcer, eux qui abritent déjà des oasis à l'infini.

Une journée pareille, ça me redonne des ailes. Définitivement que nous sommes neufs à chaque soleil qui se lève. Définitivement que nous sommes les mêmes à chaque soleil qui se couche. Porteurs du passé et du futur. Présents surtout. Envers et contre tout.