orphelins de l'Éden

11.13.2008

comprendre, pressentir

À l'heure où j'écris ces lignes, ma soeur G. est de retour à la maison, avec Lc. dans le ventre, encore. L'obstétricien a pourtant bien essayé de faire en sorte que son col dilate, mais bébé n'a pas envie de sortir pour l'instant alors voilà, Mère Nature l'emporte.

Toute la journée, des collègues à nous, à G. et moi, m'ont interrogée sur la progression de son accouchement. Ils seront peut-être bien surpris d'apprendre demain matin que la maman est de retour à la maison, le bedon rond et tendu, dans l'attente d'un col plus coopératif. Parce que si d'ici à mardi rien de nouveau s'est passé, la médecine réessayera d'intervenir pour qu'il nous arrive enfin ce petit bout d'homme qui sait se faire désirer. D'ici là, Lc. peut décider que le timing est bon à n'importe quel moment. Par exemple ce soir vers 19 h 30, une fois que G. aura englouti sa poitrine de poulet commandée au St-Hubert. Ou demain, en plein milieu de matinée, pendant qu'elle sera en train d'écouter par dépit quelque chose à la télévision. Ou pourquoi pas dimanche, lorsqu'ils parleront entre amoureux de cet enfant qui sera bientôt, très bientôt, blotti dans leurs bras.

Entre-temps, il pleut, il fait froid, il fait noir tôt, les stores du paradis sont baissés, tirés, pivotés et Nougat le gros chat va mieux. Depuis une grosse semaine, elle n'a pas vomi une seule fois. La médication semble porter fruit. La nuit, elle est plus colleuse que jamais, au grand plaisir de M. qui la serre au creux de son bras comme il le ferait avec une peluche. L'amour, c'est de toute beauté.

Moi, je vais, j'avance. Mon moral se maintient sur air d'aller agréable. Côté émotions, ça bouillonne beaucoup moins. Le processus de récolte de réponses à propos de notre constitution physiologique d'êtres reproducteurs arrivera à terme éventuellement, le temps de passer les tests nécessaires dans de telles situations et de mettre la main sur les résultats. Aussi, maintenant que nous nous sommes rejoints à mi-chemin entre mon mode explosif et son mode implosif, M. et moi communiquons plus facilement à ce sujet. Il faut bien apprendre à continuer.

Ces jours-ci, mon intuition est aiguisée. Des choses me viennent à l'esprit de façon vive. Parfois, je les sens plutôt. Ces jours-ci, se sont surtout des informations à propos de certains individus qui m'entourent qui se manifestent de nulle part. J'en suis même venue à me dire que si quelqu'un m'aidait à canaliser ces intuitions, à les reconnaître d'entre toutes les autres informations générées par diverses sources - liens logiques, déductions, présomptions, connaissances - à coup sûr, je pourrais peut-être faire quelque chose avec ça. Quoi qu'il en soit, quand elles s'allument et me guident, j'essaie de les mettre à profit des individus concernés du mieux que je le peux, quand je le peux surtout. Parfois, mes intuitions sont tout à fait anodines.

M. aussi réalise que son intuition se développe. Vendredi soir dernier, il a formulé une réflexion à voix haute qui s'est avérée chose concrétisée samedi en début d'après-midi. De l'expérience il a dit: "J'ai l'impression d'être Dieu." Rien de moins. Omniscient pour une fraction de seconde, puis omniscient à nouveau pour une seconde fraction de seconde, ça équivaut à l'omniscience. Non, bien sûr que non, mais tout de même, l'intuition est un élixir bien enivrant. Principalement parce qu'elle se manifeste spontanément, qu'elle glisse de l'attention comme un poisson frétillant pour retomber parmi toutes les autres pensées qui surviennent, mais que lorsqu'elle se matérialise et que nous avions su la formuler ou le reconnaître assez longtemps pour la distinguer clairement dans notre langage intérieur, le lien entre nous et le monde se fortifie, se consolide. L'intuition est la preuve de notre synergie collective. Elle est l'étincelle qui déflagre la foi.