lune de miel
M. dit que je suis la femme la plus intense qu'il ait connue de toute sa vie. Il m'a lancé ça hier soir lorsqu'il m'a ordonné de venir me coucher, de décrocher enfin. Depuis deux jours, je suis totalement obnubilée par cette décision que nous avons prise jeudi soir, après qu'une idée nous ait mené à une autre, puis à cette fameuse décision: partir pour l'Islande dans deux semaines! Nous qui n'avons encore jamais voyagé ensemble, nous avons décidé que c'était maintenant ou jamais le temps de nous rendre sur cette Île si près du Groenland. Sur un coup de tête, nous planifions donc partir pour un bout de terre totalement autre.
Autre avec ces vallées verdoyantes dénudées d'arbres, mais peut-être piquées de petites fleurs à la tête cotonneuse, ces geysers, ces lacs à l'eau cristalline puisqu'ils résultent de la fonte des glaciers, ces glaciers qui couvrent 10% du territoire, ces montagnes qui supportent ces massifs gelés, ces chutes impressionnantes, ces lagons bleus, ces plages noires, ces côtes escarpées dressées contre la mer froide du Grand Nord. Autre avec sa totale population s'élevant à seulement 300 mille individus dispersés sur l'ensemble de cette parcelle de terre tout de même immense. Autre avec sa nourriture basique, constituée de produits de la mer séchés, de pain de seigle et de skyr, ce yogourt épais aux allures de fromage cottage.
M. me trouve intense parce que depuis deux jours, je passe des heures à farfouiller le guide touristique que je suis allée chercher à la Grande Bibliothèque vendredi sur mon heure de dîner. Ce bouquin, il est mon lien avec ce pays que nous allons découvrir sous peu. Depuis vendredi donc, je l'épluche, section par section.
- Comment nous déplacer une fois là-bas? Soit en autobus (il n'y a pas de réseau public, seulement des circuits tracés par des compagnies privées), en voiture (louer une petite sous-compacte coûte une beurrée, mais donne la liberté nécessaire pour visiter le pays à notre rythme) ou sur le pouce (ce serait une première expérience pour M. et moi, mais l'Islande étant un des pays les plus paisibles au monde, quel meilleur endroit pour se lancer?).
- Quelles sont les moeurs et coutumes des habitants de ce pays isolé? Ce sont des gens polis, francs, propres, disciplinés et créatifs. Il n'y a pour ainsi dire aucune criminalité dans le pays à part quelques dérangements publics causés par un ivrogne une fois de temps en temps.
- Que vaut notre argent par rapport à la couronne islandaise? Pas beaucoup, mais il faut dire que cet état insulaire a compris que le tourisme étant son veau d'or, il valait mieux augmenter les prix d'absolument tout, de la nourriture au pétrole, en passant par les diachylons, sans parler des frais d'hôtel. C'est pour ça qu'une semaine là-bas, c'est amplement pour notre portefeuille.
- Comment s'habiller? À ce temps-ci de l'année, c'est encore la saison estivale. Malgré cela, il faut se vêtir de pantalons, de chandails à manche longue, de sous-vêtements longs, de bas épais, il faut avoir un imperméable, porter des bottes de randonnée imperméabilisées, un bonnet de laine et des gants eux aussi imperméabilisés de préférence. Une bruine est chose courante là-bas et la moyenne de température se situe présentement entre 5 et 10 degrés. Cependant, malgré cette température fraîche donc, il nous faudra aussi penser amener un bandeau pour couvrir nos yeux la nuit puisqu'à ce temps-ci de l'année, il y a entre 21 et 18 heures d'ensoleillement par jour. Au mois de juillet, les nuits n'ont que trois heures de durée alors j'estime qu'au moment où nous y serons, elles en auront peut-être six ou sept.
- Quelles régions sont les plus attrayantes? À cette question, il n'y a pas de bonne réponse puisqu'elles sont chacune le fruit des forces de la nature. Chaque région a une géographie qui résulte soit d'éruptions volcaniques, soit de glissements de plaques techtoniques.
Le guide me renvoie à des pages web dont les adresses se terminent toutes par ".is". Par va-et-vient constant entre les pages du guide et les pages virtuelles, je finis par y voir un peu plus clair quant à la planification de notre "trip" (dans les deux sens du terme). Au début, j'aurais aimé que nous allions dans la région du sud, surtout pour nous rendre sur Heimaey, une des Îles Westmann, afin d'aller voir les puffins, ces oiseaux particuliers qui ressemblent à un mélange entre un toucan et un pingouin. Ce détour nous aurait fait faire un tour de traversier en haute mer et, pour en revenir, nous aurions sauté à bord d'un avion pouvant voyager seulement six passagers à la fois. Mais puisque tout est dispendieux là-bas, nous avons ensuite opté pour demeurer sur l'Île principale. De toute façon, il y a tant de beautés à y admirer qu'en une semaine, nous aurons à peine l'opportunité d'en entrevoir une poignée.
Du sud, nous en sommes maintenant à reluquer la région de l'ouest. D'ailleurs, l'auteur du guide dit que pour les voyageurs qui n'ont pas plus qu'une semaine, c'est l'endroit tout désigné. Les Islandais eux-mêmes considèrent que cette région est représentative de l'ensemble de leur pays. Nous pensons donc tracer notre itinéraire en fonction des trésors qu'elle recèle: la plus haute chute du pays à Glymur, les geysers de Gesyr, le glacier de Snaefellness qui a vu quitter et revenir au bercail les terribles Vikings, les ancêtres du peuple islandais, les plages de la côte sur lesquelles nous pourront peut-être faire un peu d'équitation, juchés sur un cheval islandais, espèce robuste à courtes pattes. Aussi, pour le coucher, mes recherches m'amènent à choisir entre deux options: les auberges de jeunesse, nombreuses et bien réparties sur le territoire, peu coûteuses, extrêmement propres ou les fermes, nombreuses elle aussi, plus pittoresques, mais surtout, le réseau des fermes islandaises offre une option intéressante combinant la location d'une voiture et le gîte selon notre itinéraire, tout cela pour une somme économique. Reste à voir ce que nous préférons. De toute manière, dans les deux cas, nous ne serions pas dans des chambres privées. Ce serait plutôt l'esprit de groupe et les ronflements collectifs qui l'emporteraient. Tout ça avec salle de bain partagée. Il nous faudrait peut-être même amener des sacs de couchage parce que là-bas, les draps ne sont pas toujours compris dans le prix du lit.
Mais peu importe, nous sommes prêts pour l'aventure. À la blague hier, M. a dit que nous allions sûrement nous engueuler un peu une fois rendus là. Il ne s'attendait pas à ce que je lui réponde: "Ça c'est sûr", ce que j'ai fait. Soyons réalistes, nous allons vivre une expérience totalement déstabilisante, alors il est normal que nous soyons peut-être plus fragiles, plus stressés. Mais tout à la fois, nous allons vivre une semaine de rêve, projetés dans une réalité qui éclatera tout notre référentiel. Une expérience puissante à se gorger de la nature puissante, immergés dans une culture surprenante.
Alors intense? Oui, mais surtout excitée. Il y a si longtemps que je n'ai ressenti ce mélange délicieux de peur de l'inconnu et de fascination de l'inconnu. Il y a si longtemps que j'aie dû me laisser aller dans les filets du bon Dieu en toute confiance, sans points de repères. Blissfully blind but only to see with new eyes. Intense? Oui, mais surtout bénie.
4 Comments:
Comme je suis heureuse pour toi chère amie... ce voyage... ce dépaysement... cette poésie de la découverte.
Bises J
ah mon dieu !! Alors premier voyage ensemble ok !!!!
Alors oui vous allez vous amuser et vous engueuler mais au moins vous ne partirez pas assez longtemps pour vous mettre à bouder : pas le temps c'est trop court comme on dit !! Vous serez plus préoccupés à en profitez !
et les puffins en francais ce sont des macareux ;-)
Bonne semaine
Yiiii quel bonheur, voyager! Découvrir! S'aérer!
Je vous le souhaite très fort et qui sait, il n'y aura peut-être pas d'engueulade ;)
Vivement l'équitation à la plage =)
Tu nous en a appris ce soir sur l'Islande! Merci =)
Wow! vous êtes chanceux. Vous avez choisi une belle destination qu'on entend pas souvent parler. J'ai hâte d'entendre vos récits de voyage.
Am
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