orphelins de l'Éden

7.31.2008

je suis tout le monde

Ce soir, quand l'orage a éclaté, j'étais dans l'autobus. Arrivée à l'arrêt, une des passagères qui descendait elle aussi n'avait pas de parapluie, alors comme ça, tout naturellement, je l'ai talonné pour la couvrir une fois dehors. Elle m'a souri lorsqu'elle a réalisé pourquoi elle ne se faisait pas pleuvoir dessus et moi, je me suis dit que ce geste tout simple, il allait de soi.

Je suis quelqu'un qui essaie d'être à l'écoute et qui garde l'oeil ouvert. Quand je peux donner un coup de main, sans chichi, je le fais, c'est tout. Il me semble que c'est le plaisir qui l'emporte dans ces cas-là. Ces moments sont riches de partage et perpétuent la bonne entente inter-espèce. J'aime savoir que mon prochain est conscient de ma présence près de lui et vice versa. Je ne cherche jamais à m'imposer, à part si je sens que la personne a besoin d'un petit remontant d'humeur. Alors, je souris et voilà, le noir se dissipe et vive la lumière.

D'ailleurs, jamais je n'ai essuyé de rebuffade par celui ou celle à qui je voulais donner un coup de pouce ou avec qui j'engageais une conversation pour x ou y raison. Il m'est même arrivé de m'interposer dans une bataille en pleine rue, spontanément. L'escalade violente avait atteint le niveau des poings volant au visage, mais mon instinct m'a précipitée là, entre les deux hommes survoltés. Je leur ai dit d'une voix sortie de mon plexus quelque chose comme quoi il devait parler pour régler leur différend et comme ça, la rixe s'est brisée assez longtemps pour que les deux opposants se mesurent du regard, plus calmement, et qu'une voiture de police tourne le coin de la rue pour venir assurer la médiation du conflit. Dès que j'ai senti que l'agressivité des deux hommes avait chuté considérablement et que j'ai eu la certitude que les agents de la paix s'occuperaient de la suite, j'ai quitté la scène comme j'y étais entrée, c'est-à-dire de façon totalement anonyme, un peu comme un fantôme qui se serait matérialisé le temps de calmer le jeu. Je considère que c'était mon devoir de citoyenne de le faire, en être humain vivant dans un monde qu'elle désire humain où le respect et l'Amour s'impose dans toute leur splendeur.

Je ne suis pas badaude. Je ne me délecte pas du malheur du souffrant ou du mal pris. Bien sûr, je ne suis pas non plus de ceux qui sont devenus immunisés à ce même malheur, ceux qui poursuivent leur chemin en enjambant le désarroi. Quand j'aperçois une scène de conflit, de tension, de détresse, je me demande: puis-je aider? Si la réponse est oui, j'interviens, sinon, je poursuis mon chemin, mais avec une conscience claire et tranquille.

Dans le cas de personne qui souffre de l'âme, ceux qui consomment ou qui vivent dans la rue, je prie pour eux quand je les croise. Parfois, je donne une pièce d'un dollar. Mais plus souvent, je les regarde dans les yeux quand il me demande de l'argent et je leur dis que je suis désolée, mais non. La plupart apprécie le regard et me remercie quand même. Dans mes yeux, ils peuvent lire que je ne les juge pas et que je réalise qu'ils sont là, devant moi. Ces gens-là ne sont pas transparents. Ils ont peut-être faits de mauvais choix, mais qui peut limiter l'itinérance à cette seule cause. Chacun a son parcours, ces obstacles, ces capacités, ces moyens. Chacun a surtout un coeur qui bat et une conscience qui l'anime. Reste à passer par-dessus les pelures d'oignon pour arriver à l'essentiel. Ce coeur et cette conscience. Connais-toi toi-même. Nais ensuite universel.