orphelins de l'Éden

7.12.2008

je le veux

Bon, je l'avoue, j'ai flanché. J'ai pleuré à nouveau quand j'ai appris qu'une nouvelle grossesse était en chemin. Ce sont mes anciens voisins, mes charmants anciens voisins, ces êtres débordants de vie et d'intelligence du coeur et de l'esprit qui attendent un bébé. Pour eux, c'est arrivé par accident, de manière inattendue donc. Je suis coupable de m'être laissée aller à l'apitoiement encore une fois. C'est pour ça que je m'en veux. J'aurais aimé que la joie soit la seule émotion qui me submerge, mais non, il m'a fallu accueillir honteusement le sentiment d'envie, encore une fois. C'est ça la noirceur qui me ronge le coeur, c'est elle la bête avec laquelle je me bats depuis des mois.

Cela étant dit, c'est passé. Je me suis abandonnée à ma petitesse et maintenant, je me suis raffermie l'esprit. Je sais que tout va bien, que j'ai quelque chose à apprendre de tout cela, que notre chemin à M. et moi est différent tout simplement. Je le sais, mais parfois j'ai mal. Je ne suis qu'humaine après tout.

Humaine et en santé. Je remercie le ciel pour cette machine qui tient bon, malgré les peurs qui me font douter en tentant de m'écarter de Dieu. Mon corps passe au travers mes tempêtes intérieures sans trop de dommages, à mon grand soulagement.

Étrangement, dans cette lecture dans laquelle je suis plongée, World without end de Ken Follett, il y a un prieuré et donc des moines. Quand une tragédie survient, ceux-ci répondent souvent laconiquement: "If it's God's will..." Belle ironie tout de même de me retrouver face à des personnages qui mettent en scène différentes parts de moi. Parce que oui cette part m'habite, cette foi presque fataliste du "si Dieu le veut", mais il y a aussi d'autres parts. Dans le livre, il y a une jeune femme marginale par sa pensée avant-gardiste. Elle croit que la foi aveugle n'est pas tout, que l'on peut aussi trouver des réponses aux questions les plus ardues, qu'il suffit de s'enquérir en fonçant. Cette part m'habite aussi. Comme je l'ai déjà dit, je suis plutôt de ceux qui croient au mariage de la foi et de la science.

Je suis une créature du tout, dotée d'une conscience, d'une machine à penser et à raisonner. Humblement, je peux tenter d'élucider les noeuds de l'existence pour en récolter une tranquillité d'esprit. N'est-ce pas que Dieu nous a outillé pour cela? Plus encore, je crois que cette prérogative nous responsabilise, que nous nous devons d'aller au bout de nous-mêmes. Pour cela, il nous faut traverser des déserts et gravir des montagnes, il nous faut nous asseoir sur la crête du monde et observer, il nous faut nous rafraîchir dans une rivière discrète et boire son eau cristalline.

Plus jeune, j'ai trouvé un mot pour cet état qui anime ceux qui ne cessent de voir le mauvais côté des choses, comme s'ils sont le centre d'un univers qui s'acharne contre eux. J'ai appelé cela la victimite. Aujourd'hui, je réalise qu'il faut du courage pour ne pas céder à cet état, de la force puisée à des sources qu'il faut d'abord débusquer. Plus le temps passe, plus les distractions s'épuisent et plus nos bêtes nous surprennent rapidement au détour. En tout cas, c'est comme ça pour moi. Les batailles sont rapprochées. Il faut me ressourcer à la vitesse d'une supernova. Grâce à Dieu, j'ai des alliés du tonnerre. Ma famille, mes amis, mon amoureux. Et moi.