orphelins de l'Éden

3.18.2008

insolite

Cette semaine, je travaille de soir. À toutes les trois semaines, la rotation revient et puis, j'aime bien pouvoir profiter de mes matinées tranquilles en écrivant, en lisant un article par-ci, par-là, en cuisinant pendant que Christiane Charette et ses invités déblatèrent gentiment. Souvent aussi, pendant ces semaines-là, je me rends en ville plus tôt que prévu pour aller dénicher un objet ou un aliment dont j'ai besoin ou rencontrer une amie que j'aime beaucoup. Jeudi donc, je me rends chez Jl. des prés. Elle qui écrit aussi me fera lire un petit quelque chose. Je sais qu'elle sait que je suis vraiment excitée à l'idée de pouvoir plonger dans son univers. Il y a si longtemps que je ne t'aie lue.

Alors comme ça, hier, installée sur le bord de l'immense fenestration du onzième qui ne s'ouvre pas, jamais, j'ai commencé à voir, vers 17 h 10, des corneilles virevolter du coin de l'oeil. En y regardant d'un peu plus près, j'ai constaté qu'elles convergeaient toutes vers un parc pour aller se poser à la cime des arbres hauts. Mon collègue Nk., étant lui aussi installé près du mur de fenêtres, a remarqué à son tour l'arrivée continuelle de ces oiseaux noirs aux ailes déployées afin d'effectuer de vertigineux plongeons vers le lieu de rendez-vous. Pendant une heure, ces volatiles morbides ont continué à affluer des quatre points cardinaux. Les arbres se sont congestionnés de ces bêtes plumées et, vu leur trop grand nombre, elles ont envahi les toitures environnantes. Elles étaient quelques centaines de réunies. À un moment, j'ai dit: Que quelqu'un vienne me dire que les animaux ne communiquent pas entre eux.

C'est la deuxième fois que Nk. et moi remarquons le phénomène de rassemblement des corneilles. Lorsque nous travaillions de soir il y a trois semaines, nous sommes allés marcher ensemble le lundi soir avant qu'il ne parte pour le Mexique. En quatre ans au onzième, c'était notre toute première marche ensemble. Nk. est mon collègue depuis plusieurs années maintenant, sur mon équipe depuis la majorité de ce temps. Et moi, je marche à presque toutes mes pauses. J'ai marché avec quelques collègues et souvent seule. Alors ce soir-là, Nk., qui ne marche pour ainsi dire jamais, accepta de m'accompagner.

Pour sa première fois, je voulais lui faire suivre l'itinéraire qui dure une heure et qui nous amène dans les hauteurs de Westmount, là où les mansions s'alignent dans toute leur splendeur. En route, j'ai remarqué des ombres sillonnant les airs. Mon regard s'est attardé un peu parce que j'ai cru que c'étaient des chauve-souris. Finalement, c'étaient des corneilles. Mais là, c'est Nk. qui m'a conseillé de regarder les arbres de plus près. "Look". "Oh my god, this is freaky". "It's like we're in the movie The Birds". "I've never seen anything like it". Comme hier soir, ils étaient des centaines d'oiseaux perchés aux cimes des arbres, immobiles, silencieux, envahissants. Notre regard pouvait discerner dans la nuit que les arbres occupés par ces nuées de bêtes obscures formaient un couloir bien net qui s'étendait sur une ligne précise traversant plusieurs rues. Nk., qui fait de la photo, se mordait les doigts de ne pas avoir son appareil. Il tentait de capter l'image avec son cellulaire, mais il faisait trop noir et l'appareil saisissait une pauvre réflection de la terrifiante réalité.

Nous avons passé plusieurs minutes à observer ce phénomène étrange en nous contant des peurs et puis, nous avons poursuivi notre marche dérangés par cette image foudroyante. En route, j'ai dit que nous pouvions modifier notre itinéraire pour retourner voir le couloir de corneilles, ce que nous avons fait, mais d'une autre rue. À un moment, les bêtes volantes qui étaient encore perchées, impassibles, se sont toutes envolées en masse parce qu'un plomb a été tiré, sans doute par un citoyen apeuré qui ne voulait pas d'elles dans son quartier. La flopée s'est dirigée vers la montagne aux domaines de millionnaires et j'ai remercié Nk. d'avoir été témoin de ce phénomène si incroyable, sinon, personne ne m'aurait crue.

Décidément, cet hiver est bien unique avec sa neige immaculée tombée en tonne et ses corneilles ténébreuses au nombre inquiétant. Et dire que dans trois jours, c'est la lancée du printemps. Et que bientôt, tout ceci ne sera qu'un souvenir de statistiques.

1 Comments:

At 10:01 a.m., Anonymous Anonyme said...

il y a eu même phénomène juste après noel dans Outremont, ils en parlaient à Radio-Canada le matin à la radio..

Étrange étrange... Peut-être que ces oiseaux sont encore plus sensibles aux changements climatiques que nous... ça expliquerait leur retour précosse en ville !

 

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