orphelins de l'Éden

1.06.2007

fête des rois à la soupe aux pois

Journée lente sous le ciel de la ville transformée en Britannique en plein mois de janvier à peine entamé. Je déambule ce matin dans les rues engourdies sur lesquelles vient se jeter une pluie paresseuse. Un véritable délice. Tout mon être déborde de joie tranquille, rempli de musique vissée à mon ouïe. Rares sont ces moments de paranthèses mélodiques à pied. J'ai l'esprit enjoué. Mon itinéraire ne cesse de se retracer dans ma tête. Les heures d'ouverture des commerces que je dois visiter dictent finalement l'allée de mon trajet. La Capoterie n'ouvre qu'à 11 h alors je poursuis mon ascension de la St-Denis vers le vétérinaire qui lui, est ouvert, depuis 9 h. En passant devant l'immense bâtiment de pierres grises assiégeant un quadrilatère entier ceint des rues Cherrier, St-Denis, Roy et Berri, j'ai l'idée d'aller danser un brin dans un recoin, histoire de laisser mon corps se délier dans l'assouvissement de cette envie saisissante de m'éclater un peu.

Quelques chansons plus tard, je retrouve le trottoir, baignée d'une chaleur douce. Je suis satisfaite et détendue. Rue St-Hubert, je repars avec la dexatrone (lisez ici cortisone) pour les démangeaisons du gros chat Nougat, ainsi que de la nourriture spécifiquement efficace pour le soulagement de cet inconfort. Je marche et je me faufile dans des ruelles nimbées me semble-t-il dans cet air humide. Je croise des gens que mon regard salue d'un regard franc et discret. J'aime percevoir cette complicité tacite qui s'échange au passage d'un étranger qui se dirige dans ma direction, qui reconnaît ma présence, qui m'effleure enfin sur un trottoir nous appartenant l'espace d'un instant.

J'aboutis aux coins de Brébeuf et Mont-Royal où Diabolissimo vient tout juste d'ouvrir sa porte, aux grands plaisirs des friands de pâtes fraîches et de sauces exquises. Là-bas, je découvre un chocolat noir 70% vendu en tablette contenant du piment d'espelette et un parfum d'ananas. Curieuse, je décide de laisser tomber le traditionnel tiramisu qui conclue habituellement notre repas et de repartir avec cette petite merveille dont M. se régalera.

À peine revenue sur le trottoir, j'attrape un combiné téléphonique pour annoncer à Jl. et Tv. que j'aimerais passer d'ici une demi-heure. "On est en pyjama, on t'attend." J'arrive.

Et me voilà repartie, rebroussant chemin ou presque puisque les rues sont nombreuses et que mon envie de tourner ici ou là m'aiguille le bout du nez. J'aperçois dans une entrée de ruelle une marelle tracée de pochoir de la bouille à Bush. Genre de pied de nez amusant. J'aperçois des murales colorées, des arbres aux écorces mouillées, un garçonnet qui échappe son ballon violet qui roule sous une voiture et que son père ira récupérer.

Arrivée chez Jl. et Tv., Tl., leur petite fille de presque deux ans est intriguée par mon arrivée. Son petit corps au chaud dans son pyjama rayé aux pieds fermés se dandine avec aisance. Une grande fille qui se déplace là où bon lui semble. Jl. me présente sa belle-famille mauricienne en visite depuis le début du mois de décembre. Jl. et moi nous installons à l'extrémité de la table à dîner et nous parlons. Jl., je vous la présente enfin comme il me fallait le faire lorsque l'occasion se présenterait et tout ce que je vous en dit de cette amie chère, c'est qu'elle est dans ma vie depuis plusieurs saisons et plusieurs hauts et bas et que le fil du temps a su nous lier l'une à l'autre et que je tiens à ce lien et que nous bouillons lorsque nos esprits se rencontrent pour discuter, rire, évoluer, s'épancher et je l'aime tout simplement d'un amour éprouvé.

Nous partageons un Rooibos pendant que Tl. tournoie autour de sa maman pour capter son attention en poussant des cris d'oiseau blessé. Fatiguée la belle enfant aux boucles noires ira faire dodo lorsque je quitterai un peu plus d'une heure après ma visite impromptue.

Mon voyage se termine à mon point de départ: La Capoterie. Là, je discute condoms japonais avec la préposée qui m'explique les différences entre les modèles offerts en boutique. Je repars avec une douzaine de contraceptifs qui nous permettrons d'éviter une grossesse trop hâtive. Bientôt, mon corps reprendra la pleine capacité de gérer ses hormones et pendant ce temps, je le préparerai pour accueillir une vie en lui.

La magie, ça se vit quand ça se ressent. Et le fumet de la soupe flotte dans l'air à l'heure où je vous écris.