orphelins de l'Éden

4.18.2013

here goes

Deux ans que ça dure.  J'en ai déjà glissé un bref mot ici, croyant d'abord que c'était une infection à levures ou si vous préférez, une vaginite.  Le temps m'a fait comprendre que c'était autre chose.  Une irritation irritante - c'est le moins que je puisse dire - située sur mon périnée et migrant autour de l'anus.  Un besoin impératif de me gratter au sang si je ne retiens pas mon envie de me soulager lorsque je vais uriner ou à la selle et que je m'essuie.  Je sais, je sais, beaucoup de détails crus ou gênants, mais que voulez-vous, cette partie du corps existe aussi.

Et j'en sais quelque chose.  Parce que deux ans, c'est long quand ça brûle à cet endroit-là ou que le picotement démange.  Heureusement, le mal va et vient.  Good days, bad days.  C'est un peu beaucoup pourquoi il m'aura fallu tout ce temps avant de chercher la source du problème.

Mais en fait, déjà au bout de quelques mois à vivre avec cet inconfort physique, j'étais allée consulter une gynécologue à la clinique L'Alternative, parce que je sais que les spécialistes là-bas sont justement très spécialisés.  Je pensais que ma réponse viendrait alors, ce qui ne fut malheureusement pas le cas.  J'étais enceinte de fillette jusqu'aux oreilles et la gynécologue m'a conseillé de revenir après mon accouchement parce que de toute manière, elle ne pouvait pas me prescrire de médicaments topiques dans mon état gravide.  Aussi, cette journée-là, l'inflammation était en dormance, comme cela s'est passé par moments.  Malade imaginaire à ses yeux.

Avec l'arrivée de fillette, j'ai attendu encore un an avant de me rendre auprès de ma généraliste, pour mon examen physique annuel.  C'était en décembre dernier.  Entretemps, j'avais tenté d'identifier la source dans mon alimentation.  Le chocolat m'a semblé une bonne piste, mais l'envie intense de me gratter est revenue.  Même chose pour le sucre.  Je n'ai pas essayé avec les tomates ou le gluten.  À ce stade, je voulais un diagnostique pour m'aiguiller.

Ma généraliste a examiné la région affectée.  Verdict: un lichen simplex.  Je lui ai fait écrire sur un bout de papier.  Qu'est-ce.  Quelque chose qui ressemble à de l'eczéma.  Qu'est-ce qui le déclenche.  Je vais vous servir une vraie réponse de médecin qui ne sait pas, mais qui doit tenter une réponse pour satisfaire son patient: le stress.  Eh ben.  Le plus beau, c'est que c'est quelque chose dont on ne guérit jamais vraiment.  On ne peut que le soulager momentanément avec une crème à base de - eh oui - cortisone.

Le hasard fait que la semaine suivant cette visite médicale, je me rende voir mon ostéopathe adorée.  De son côté, elle me confirme que le lichen simplex est chronique et qu'une fois installé dans un corps, il peut toujours refaire surface.  Mais elle me donne tout de même un peu d'espoir de guérison quand elle me refile les coordonnées de son homéopathe adorée. Aussi, M. me suggère de me rendre auprès d'un second spécialiste pour avoir un autre diagnostique.  

Prise de rendez-vous chez l'homéopathe - deux mois d'attente parce qu'elle est devenue une vedette depuis qu'elle a fait une apparition télévisée chez Dr. Oz - et avec l'obstétricien qui m'a suivie pour ma deuxième grossesse parce qu'il est également gynécologue.

Dr. P m'ausculte et modère le diagnostique que j'avais reçu.  Si c'est un lichen simplex, dit-il, c'est un cas très léger parce que la peau n'est pas trop épaissie ou fissurée.  D'accord, super, mais ça pique en titi-ouiti.  Il me prescrit la même crème que ma généraliste, mais avec pour différence que si la douleur persiste ou revient au bout de trois mois d'application aux semaines, je dois subir une biopsie qu'il pourra envoyer en labo pour analyse afin de déterminer si oui ou non c'est un cas de lichen simplex.  Dernière question: est-ce que ça peut être tout simplement une réaction allergique.  Oui, bien sûr, mais reste à trouver à quoi.  Au latex par exemple - nous utilisons le condom comme moyen de contraception.  Oui, répond-il, ou à votre savon pour le corps, pour la lessive, à un type de matériel, votre papier de toilette - j'ai déjà essayé de le changer, sans succès.  Tout de même, une autre brindille d'espoir dans ma besace.

Alors aujourd'hui, je la rencontre enfin cette homéopathe adorée de mon ostéopathe adorée. C'est une femme grande comme moi avec ses souliers à petits talons.  Je prends place dans son bureau d'Outremont au plancher de liège.  Dès lors, mon cerveau doit réactiver la zone où est terré mon anglais.  Des termes spécifiques à traduire.  Muqueuses, picotement, périnée et bien d'autres.  La beauté avec l'approche homéopathique, c'est que l'on fait le tour de la santé globale de l'individu à traiter.  Au bout de deux heures de questions-réponses, elle cible un remède qu'elle croit le bon pour moi, dans ma condition.  Elle me rassure que si cet élément n'est pas le bon, il y en a deux autres qui semblent pouvoir m'aider.

Parce que l'approche uniciste en homéopathie veut que lorsqu'un individu souffre, c'est qu'il a besoin d'un élément de source minérale, végétale ou animale, pour retrouver son équilibre.  Il y a plus de cinq cents de ces éléments parmi lesquels choisir.  Le but d'une rencontre aux mille questions, c'est de préciser le bon, the one.  Pour l'heure, j'ai gobé une granule de SULF 200 D.  C'est tout ce qu'il faut, si c'est le bon élément.  Une boule miniature ou peut-être une deuxième, dans dix jours, si le cycle infernal du picotement-grattement reprend après un certain soulagement des symptômes.  SULF parce qu'il soigne les problèmes de peau, et qu'il convient aux friands de chocolat noir et de douceurs â la pâte beurrée, qui se souviennent de leurs rêves très clairement et qui s'impatientent sérieusement s'ils ont faim - des indices accumulés au fil de l'entretien -, tels que moi.

J'attends.  Et oui, j'ai aussi tenté de mater le mal par la seule force de ma volonté.  Mais la nuit, lorsque mon esprit est brouillon de sommeil, l'irrésistible soulagement domine.  Cette fois, j'ai affaire à un ennemi de taille.  Souhaitons que l'infinitésimale en ait raison.