sommeil de plomb
Enfin, le mois d'attente s'est écoulé et je suis retournée sur la table de S. O.. Je remarque que pour la seconde fois, l'ostéopathe est toute de noir vêtue sous son sarrau blanc. Cette quinquagénaire a à peine le visage ridé et son corps est frêle comme celui d'une jeune pré-pubère. Ce qui me frappe chez elle surtout, c'est cette douceur totalement libre d'ego prétentieux qui rend son écoute vraie. Quelqu'un de pas compliqué et de compétent, j'aime.
D'emblée, je lui annonce que j'ai réussi à booker trois rendez-vous en autant de semaines avec elle. C'est qu'elle est en demande voyez-vous. Elle semble heureuse de savoir que nous aurons un bon bloc pour travailler le bobo.
Lors de notre dernière rencontre, elle avait formulé des recommandations que j'ai suivies. Quand elle m'ausculte, elle estime qu'elles ont redonné un peu de souplesse à la région figée.
Cette fois, elle m'explique qu'il y a un déséquilibre dans les courbures de ma colonne vertébrale. Entre mes omoplates, les vertèbres creusent trop et là où le poignard se plante à chaque fin de nuit, elles saillent. En tâtant le coeur du mal, elle trouve des mots pour me l'expliquer. Selon elle, c'est une très ancienne blessure que mon corps porte et qui s'est installée graduellement, à mon insu, petit à petit, jusqu'à ce point de me réveiller à toutes les nuits, parce que j'aurais les ressources à présent pour la déraciner. Elle qui a une approche terre-à-terre m'avertit qu'il se peut que des émotions me surprennent dans les prochains jours parce que le traitement fouille dans ma boue. Selon elle, ce repliement du plexus qui a créé une tension lombaire viendrait de coups émotionnels reçus pendant mon enfance et mon adolescence qui m'ont poussé à me protéger. Pour ça, la résilience, je connais.
Le côté yé!, c'est que mon corps répond bien. Déjà, j'ai senti un laisser-aller musculaire après toutes ses manipulations. Elle me dit que les nuits qui viennent seront sans doute plus douloureuses parce qu'elle a brassé beaucoup de choses intentionnellement afin de mieux repérer le véritable noeud mardi prochain.
Redonnez-moi mes nuits, c'est tout ce que je demande. Un réveil de paresse molle.
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