orphelins de l'Éden

3.08.2007

VI

Les parois qui entouraient Armand étaient lisses, pâles comme des fantômes, hautes comme des murailles. Cet espace lui était inconnu. Et quoi encore? Cette femme à la chevelure noire qui disait s'appeler Violaine, Violaine comme sa femme, celle qu'il connaissait depuis dix-sept ans déjà. Cette Violaine étrangère qui était chez lui, chez eux, lui et sa Violaine, la véritable à ses yeux, celle auprès de qui il vivait, heureux et comblé. Cette Violaine à la crinière noire, qui était-elle? Comment était-elle parvenue à rentrer dans leur demeure? Mais surtout, où était Violaine, sa Violaine, sa femme, son épouse?

Armand était engourdi. Ses membres lourds l'encombraient. Il aurait voulu se lever et retourner dans cette maison qui était la sienne. Revenir à cette matinée ordinaire qui ne laissait pas présager cet accroc subreptice du destin. Il aurait voulu comprendre surtout, comprendre ce qui lui échappait. Était-il passé tout près d'un indice?

Et son corps qui ne répondait pas à ses commandes, et cette pièce inconnue, cet espace aux échos lointains, à la lumière diffuse, et sa tête dans laquelle les derniers événements disponibles à sa mémoire recommençaient à rouler incessamment, encore et encore, à partir de la ruelle, sa montre disparue, la pipe brisée, l'image de la chevelure noire avec le ruban bleu et cet homme, cet homme. Et tout le reste, mais cet homme.

Peut-être qu'il était la pièce manquante à cet énigme plus grande que nature? Peut-être était-il la clef à toute cette distorsion de sa réalité? Il fallait qu'il parle à quelqu'un. Armand devait parler à quelqu'un.

Justement, il lui sembla sentir une présence. Il tenta d'exprimer ce lien qu'il venait de faire dans son esprit confus, de mettre des mots pour interpeler l'autre peut importe qui cet être était. Il lui fallait parler puisqu'il ne pouvait bouger. Il tenta la parole, mais dès qu'il écarta les lèvres, on lui fourra une substance molle dans la bouche à coup de petites cuillerées froides, aromatisées au caramel artificiel. Ce liquide onctueux le répugnait. Armand avait toujours détesté l'arôme du sucre roussi. Sa vue prit un moment à focaliser sur le visage qui se penchait au-dessus de lui. Mais quand il réussit, il faillit bondir hors de lui-même tellement il était extatique. Armand venait de reconnaître sa Violaine, sa femme, la véritable.

1 Comments:

At 5:22 p.m., Anonymous Anonyme said...

Ah! Que je suis soulagée, même si ce n'est que temporairement, pour Armand (qu'il ait reconnu sa Violaine) !

ziwi

 

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