orphelins de l'Éden

12.11.2010

Entends-les

Je la rencontre près des tomates, dans la section des étals de fruits et légumes frais chez Tau. Elle m'aborde avec le même naturel qu'elle l'avait fait au printemps dans ce même commerce d'alimentation saine. Cette fois-là, ce faisait depuis nos années cégepiennes que je ne l'avais pas revue. Elle se souvenait de mon nom. Moi, le sien m'est venu, mais avec une légère déformation. Elle ne m'en a pas tenu rancune. Que voulez-vous, j'ai une mémoire de poisson rouge et de toute façon, J-E est pétrie de bonté.

Cette fois-là aussi, j'ai su qu'elle essayait de concevoir un enfant. Je crois qu'à ce moment-là, il y avait quelques mois qu'elle et son amoureux attendaient la joie de devenir parents parce que je lui avais parlé de l'ostéopathie qui m'avait aidé à y parvenir au bout de presque deux ans sans hormonothérapie.

Aujourd'hui, elle m'apprend qu'elle a rencontré une ostéopathe qui l'a aidée, mais que malheureusement, elle a su, après examens, qu'elle souffre d'endométriose, ce qui rend la fécondation beaucoup plus difficile. Beaucoup plus difficile, mais pas impossible. Malgré tout, elle m'en parle avec les larmes aux yeux et je la comprends. Je sens sa douleur jusque dans mon âme. Je la reconnais.

D'ailleurs, nous parlons pendant un bon quarante-cinq minutes de cette envie d'enfanter qui ne se comble pas en claquant des doigts pour certains, dont nous. Oui j'ai bien eu garçon, mais oh combien nous l'avons attendu avec inquiétude.

À son conjoint R. qui nous rejoint pendant notre conversation et à elle, je leur dis que même si je n'ai pas encore tout compris du pourquoi de cet obstacle, je suis sûre qu'il m'a aidé à être une meilleure mère dans l'adversité des défis qui viennent avec un bébé tout neuf. Garçon est mon miracle et à tous les jours qui passent, je sais que je l'ai tant voulu près de moi que même lorsqu'il crie comme ces temps-ci à briser tout le cristal des chaumières à cinquante miles à la ronde, je tiens bon avec une patience qui prend racine dans ce souvenir du désir blessé cent mille fois pendant l'attente interminable m'a-t-il semblé.

Peut-être qu'un peu du pourquoi tient au soulagement de J-E aujourd'hui de savoir qu'elle n'est pas seule à vivre avec cette blessure. Chose certaine, ils seront dans mes prières jusqu'au moment où ils seront exaucés.