orphelins de l'Éden

9.30.2013

remous

Turbulence des fluides, on pourrait dire ça comme ça.  Si on voulait résumer les deux derniers jours de ma vie.

D'abord, hier matin, j'ai l'impression d'un étrange déjà-vu.  Tout à coup, j'ai douze ans à nouveau et j'apprends, par le sang qui tache le papier hygiénique, que je suis devenue une femme.  Vingt-et-un mois jour pour jour après mon accouchement de fillette, je renouvelle cette expérience.  Deux semaines après m'être fait compresser les ovaires par mon ostéo adorée, opératrice de miracles dans mon corps, preuve à l'appui.

Et puis, ce matin, me rendant à la salle de bain au sous-sol pour commencer ma journée avec une douche cocorico, un
toc - toc - toc - toc - toc - toc 
d'eau m'alarme.  J'ouvre la lumière de la salle de bain, pensant à un robinet mal fermé, mais rien.  Le bruit me guide aussitôt à la grande pièce juste à côté.  J'appuie l'interrupteur et bang, dégât d'eau majeur.  Les murs, le plafond, le sol.  Mouillés, gonflés de cloques, gondolés par le liquide.  Je vais réveiller M.  Les mains sur son visage, je lui intime de rester calme et lui explique ce que je viens de découvrir.  Il est 5 h 35.  Rise and shine.

Juste avant d'aller se coucher ce soir, crevé par cette journée de labeur forte en émotions, M. se laisse aller au fatalisme.  La vie nous redonne un coup, juste après celui que nous venons de surmonter - lire ici tout le capharnaüm résultant de la découverte de moisissure sur la dalle au sous-sol il y a presque un an -, dit-il.  Eh ben, peut-être avons quelque chose à mieux gérer cette fois venant.  Stay cool que nous chante The Roots depuis trois semaines sur cet album vieux de bientôt dix ans que nous venons tout juste de découvrir.  Peut-être que si cette fois nous passons au travers l'adversité sans angoisser, peut-être cela s'avérera le dernier tas de crottin à ramasser avant longtemps, si je peux m'exprimer ainsi, anglicisme compris.

Ah oui, et vous ai-je mentionné que ce matin, c'était aussi le premier jour d'un nouveau tournant pour moi au onzième et qu'il me fallait surtout un esprit en grande forme pour assimiler beaucoup de nouveauté.  Je vous en reparle.  Pour l'heure, fillette m'attend dans l'îlot, bien endormie, mais assez enrhumée pour avoir besoin de moi, une troisième nuit d'affilée.

Parce que l'important, c'est que nous soyons tous en santé.  Pas que le gyspe soit tout bousillé.            

9.23.2013

matière

Mon cadeau d'anniversaire, il est accroché sur un mur du sous-sol.  C'est que papa a eu la merveilleuse idée d'impliquer les cocos dans la réalisation d'une toile.  Alors pendant que je bossais au onzième samedi matin dernier, ils se sont mis les mains à la gouache et à mon retour au paradis, j'ai découvert toute la beauté de l'oeuvre originale après que garçon m'ait gentiment glissé dès mon entrée dans la voiture que "tu verras maman, il n'y absolument rien au sous-sol pour toi", au grand désespoir de M. qui avait voulu que ce soit une surprise.  Mes Picasso adorés.

Ce jour-là, j'ai découvert que ma soeur G. avait laissé des chocolats dans le tiroir de mon caisson de travail et une collègue-amie est allée dans une pâtisserie sélectionner des mignardises sucrées que nous avons partagées en groupe.  J'ai reçu des accolades, en plus de voeux chantés et de d'autres écrits.  J'ai mangé un repas gastronomique accompagné d'un verre de vin blanc fruité.

Ce jour-là, j'ai vieilli.  Mais seulement parce que la vie est ainsi, à cumuler les années à tous les douze mois.  Ça, et que mon corps me le laisse savoir que ma jeunesse s'estompe petit peu à petit peu.  Subtilement, graduellement.  Avec soin, il me semble, et douceur.  La nature m'épargne le choc de me découvrir toute autre et m'accompagne dans la rencontre de cette personne que je deviens.  Illusion de faire du surplace.  Cependant que l'usure ne ment pas.    

9.17.2013

en retrait

Ma guérisseuse m'a manipulée deux heures durant.  Je devais partager ce temps avec fillette, mais ma grande amie Jl., qui avait accepté de venir s'occuper d'elle pendant que je serais allongée, se tape une saleté de grippe et conséquemment, n'a pas pu nous accompagner.  Alors, je me suis dit: fichtre! ces deux heures, mon corps pourrait vachement en bénéficier.  Et de fait, les mains d'A-M mon ostéo adorée se sont promenées de ma tête aux pieds.  En passant par mes ovaires.  Oh la la que ça n'a pas été agréable de me les faire compresser ceux-là, mais il paraît qu'il fallait y dégager quelque chose - là où mes ovulations n'ont d'ailleurs toujours pas relancé mes cycles menstruels - afin que mes hanches relâchent une tension qui a contribué à me bousiller les genoux il y a trois semaines.  Eh ben.

Ce qui a contribué à me bousiller les genoux aussi, ce sont mes chaussures de marche, qu'il me faut de toute évidence changer.  Cadeau de ma maman pour mon anniversaire.  Anniversaire que je célèbrerai ce samedi en grande partie au onzième.  Mais bon, ça va.  Il faut ce qu'il faut et en soirée, nous irons nous mettre à table dans un bistro à deux pas de la maison.  Toute la petite famille.  Célébrer entourée de mon bonheur pas compliqué.

Car tout juste replongée dans les drames sourds de la vie de bureau, je réalise toute la force tranquille que m'a procurée ces années de recul vécues auprès de mes touts-petits et face à ces querelles intestines, je détiens mon bonheur pas compliqué.  Qui me permet ce détachement fichtrement efficace qui avait, jusqu'à ce jour, fait défaut à ma vie professionnelle.  Comme quoi cette parenthèse de quatre ans m'a menée ailleurs.

Prions pour que cet effet perdure.  Face à ce négativisme siphonnant.  Me draper de mon bonheur pas compliqué et me rappeler que l'essentiel c'est - comme le dit si bien la chanson - d'être aimé, ou plutôt, d'aimer, tout simplement.                    

9.10.2013

commencer par le commencement

Ça y est que nous avons réussi le grand saut.  Pour l'instant.  Toute la petite famille se porte plutôt bien.  Malgré le changement de rythme, malgré que je sois redevenue un de ceux qui quittent le bercail au petit matin pour y revenir dix heures plus tard.  Une femme qui se donne à 100 % en professionnelle au onzième et tout autant en maman de retour à la maison.  Avec quelques minutes de répit dans les pauses déplacement.  À écouter de la musique ou parcourir des articles en diagonale ou respirer le bonheur peinard de ne pas rien avoir à accomplir de particulier pour quelques instants.

Fillette, la plus petite de nous tous, est celle qui le ressent le plus ce changement de rythme, bien qu'elle se porte plutôt bien compte tenu, vraiment.  Surtout plus larme à l'oeil lorsqu'elle rentre à la maison après sa journée à la garderie, plus désireuse de s'accrocher à mon sein, de se coller à moi pour sentir ma chaleur de port d'attache réconfortant qui s'est tout à coup transformé en vaisseau déserteur.

Sans surprise, mon retour au travail a coïncidé tristement avec la maladie dans son petit corps.  Une primo-infection herpétique qui a gonflé ses gencives d'une inflammation douloureuse, après cinq bonnes nuits de fièvre intense.  C'est que garçon a été servi d'un bouton de fièvre la semaine précédente.  Donc, transmission du virus en période d'incubation sans doute. Dieu merci pour la cataire, cette plante aux propriétés antipyrétique et antalgique, entre autres.  Maintenant, c'est officiel, chacun d'entre nous au paradis sommes porteurs de l'herpès simplex 1.  Une saleté récurrente, surtout en cas de faiblesse du système immunitaire.  Mais rien de bien grave au final.

Organisation et routine, concepts phares pendant cette période d'adaptation.  Avec eux, le rythme effréné est canalisé en repères surmontables, même en cas d'adversité semble-t-il.  Et éventuellement reviendra l'élasticité du temps.

9.02.2013

poisson dans l'eau

Comme une championne, tu as vécu ta première journée complète à la garderie, sans moi, mais avec ton beau grand frère, Cr., votre éducatrice en or, et les amis.  Comme une championne même pour la sieste, même si tu n'avais pas le fameux "deux" - lire ici, ton sein préféré, le gauche, le plus gonflé de lait à force de bouder l'autre.  Tu as regardé les amis s'étendre et tu as fait comme eux, tout simplement, un peu beaucoup crevée de ta super matinée busy, busy.  Le jeu à son meilleur, c'est ce que ton nouvel environnement t'offre à partir de maintenant.  Les copains, les activités, les bricolages, les sorties en petit groupe.

Mercredi matin dernier, nous sommes allés tous les quatre à la garderie pour te voir intégrer une nouvelle phase de ta vie.  Bing-bang, tu as enlevé tes Crocs de deux coups parfaits de gros orteils et tu t'es lancée dans la salle de jeu, comme tu le faisais déjà depuis une grosse semaine.  Tout ça en quelques secondes à peine.  Quand nous vous avons salués parce que nous quittions, tu as dit: "Papa, maman" et c'est tout.  Nous avons passé le pas de la porte.  Sans une larme de ta part.

Ce n'était qu'une demi-journée.  Et les larmes sont venues quand je t'ai récupérée pour le dîner.  Tu ne voulais pas partir.  Même chose pour la journée suivante, encore demie celle-là aussi.  Mûre que tu es pour la garderie.  Je le disais depuis au moins deux gros mois.

Je quitte donc le paradis officiellement demain, direction le onzième.  Un retour aux airs de première journée pour moi aussi.  Enfin, nous verrons bien.