orphelins de l'Éden

10.31.2007

bouboubouh!

Le soleil tombe et je peux presque entendre le branle-bas de combat dans les maisons qui nous entourent. Les enfants piétinent d'excitation. Ce soir, c'est de la pure magie.

Mon costume a fait comme un pétard mouillé. Personne n'a reconnu la nonne bouddhiste que j'incarnais. Ma robe tibétaine couleur safran, mon mala en billes de bois au poignet et mes Birkenstock dans lesquels je portais des chaussettes épaisses n'ont pas su composer le personnage de piété. Au onzième, ce sont plutôt des costumes drôles qui ont réussi à créer l'atmosphère de fête. Cht. avait une tête de Golden Retriever greffée à la sienne et un chandail de la même couleur. Costume parfait pour cette mordue du meilleur ami de l'Homme. Vr. était en pyjama et plus d'un l'ont enviée tant et tellement qu'il va peut-être y avoir une journée pyjama party d'organisé par le comité social. D'ailleurs, cette équipe de joyeux lurons qui mettent de l'ambiance sur l'étage ont même travaillé durant la nuit pour nous préparer un couloir d'entrée horrifique, araignées velues accrochées au plafond, toiles d'araignées partout, stroboscope, fumée. Génial.

Je fais ça court ce soir parce que je sens que la sonnerie va retentir d'une minute à l'autre, mais juste un dernier mot pour vous souhaiter une bonne soirée festive. Et surtout, perpétuez cette célébration ludique. Ça fait du bien de décrocher une fois l'année.

10.29.2007

pour toi

Joyeux anniversaire à ma belle filleule d'amour. Tu as trois ans aujourd'hui. Aujourd'hui de ton côté du monde parce que chez vous, il y a une demi-journée d'avance. À l'heure où il est, ta maman répond sans doute à l'appel de ta grand-maman ou de ton autre tante. Peut-être même qu'un de tes oncles t'appelle pour te faire un petit coucou. Quand à moi, j'ai bien tenté d'avoir la ligne, mais quelqu'un a été plus vite que moi. Et puis je me suis dit: pourquoi ne pas te souhaiter un bonne fête qui allait rester comme une marque sur le net. Combien de temps tiendra-t-il? J'espère assez longtemps pour que tu puisses le lire sans trop de difficulté.

Em., ta venue parmi nous a changé beaucoup de chose. Tu as bouleversé la dynamique familiale. Ton sourire est devenu le foyer de nos rencontres et le prétexte pour des réunions hebdomadaires. Avant que vous ne partiez à Hong Kong, c'était toi notre soleil. Pas comme un enfant roi, non. Comme un enfant. Point à la ligne.

Ta maman t'a sûrement raconté l'histoire de ton accouchement. Au bout de trois poussées et d'autant de cris, tu nous es apparue toute fripée. Une infirmière t'a mis un petit bonnet sur la tête et, couchée en boule sur la poitrine de ta maman, tu nous as tous séduits, chacun notre tour, petite chose si frêle et si puissante. Capable de nous attirer dans ton univers de paix avec un magnétisme sans pareil.

Tu as grandi depuis. Maintenant, tu joins les mots pour faire des phrases et tu prends l'autobus pour aller à l'école. Tu as un frère collée à toi comme ton ombre tellement il t'aime. Ta voix est toute fragile les rares fois où je l'entends. Ta maman nous dit que tu parles sans arrêt. Sans arrêt, à part quand elle te tend le téléphone. Mais c'est pas grave, je sais que bientôt, je pourrai te serrer dans mes bras après que tu te sois accoutumée à ma présence. Je dis bientôt parce que le temps passe vite et que déjà, tu parles, tu marches, tu chantes et tu existes à tous les jours de l'autre côté du monde et ici à la fois, dans tous nos coeurs. Je t'aime petite merveille, je t'adore.

10.27.2007

fin de soirée

Vraiment, ça fait chaud au coeur de constater à quel point mes grandes jambes en mal d'habillement vous touche. Merci beaucoup. Ça m'encourage à persévérer, à tenir le coup. Justement, demain, je vais jusqu'à Laval pour trouver mon fameux jeans écologique fabriqué par Levis. Eh oui, c'est juste là qu'il y en a un de ma taille. Même sur internet, c'est foutu. Imaginez. S'il y en a deux paires, je les prends les deux. Au diable les dépenses. Il faut ce qu'il faut. Après, plus de souci pour un bon six ans au moins. Vu que des jeans, je ne peux même pas en porter pour travailler.

Je vous écris avec un mélange de fatigue et d'alcool dans le corps. Ma coupe de vin est finie depuis une heure, mais l'effet poursuit son voyage dans ma lucidité vacillante. De petits détails m'ont confirmé que mon état différait que d'habitude, par exemple, un manque de coordination dans la cuisine, c'est-à-dire oubli de quelque chose dans le four - sans fumée heureusement. J'ai même jeté un citron tout entier avec les moitiés qui avaient été vidées de leur jus. À l'étape où il fallait récupérer le zeste, je l'ai cherché un instant pour finalement le trouver parmi les détritus. Oui, je l'ai bien lavé avant de le peler.

Am., ma belle-soeur, nous a présenté son nouvel amoureux. C'était le prétexte de notre réunion du samedi soir. Cl. et Rc. étaient là aussi. Rc., comme à son habitude, à mis son grain de sel dans toutes les conversations. Un bon vivant. Curieux, sensible, ouvert. Pendant que je faisais chauffer la crème pour mes Panna e limone, une recette chopée à l'émission de Daniel Pinard, Rc. et Ph. parlaient de leur voyage respectif en France, en comparant la géographie des régions qu'ils ont visitées, plus haute dune au monde, nombreuses montagnes. M. les écoutait en sirotant son verre de rouge. Am. et Cl. étaient allées chercher un gâteau au Toit Rouge parce que ma belle-soeur avait oublié d'apporter un dessert, tel que décidé plus tôt cette semaine.

Le souper fut une réussite. La compagnie, agréable. Après le plat principal, M. a initié nos invités à Guitar Hero, son jeu favori des dernières semaines. Monsieur a même attaché sa courroie de guitare sèche à un clavier pour rendre le tout plus réaliste. Chaque convive a testé le principe. M., avec son enthousiasme débordant, l'alcool aidant, les a réchauffés pour le party de Noël.

Demain dimanche. Bon repos.

10.25.2007

guenilles

Au moment où je m'asseois pour pondre ce qui suis, le ciel est d'encre et la ville est veillée par une lune ronde et blanche comme une balle de neige. Dans une semaine, les enfants penseront à leur soirée qui vient de passer et au fait qu'il leur faudra attendre encore toute une rotation de 365 jours avant de pouvoir courir dans les rues pour la cueillette de bonbons. Mais le futur n'est pas encore passé alors vivons le moment présent.

Et présentement, je me cherche des fringues. Je n'en peux plus de mes pantalons avec de l'eau dans la cale à force de lavages, de mes bas troués au gros orteils, de mes lainages parasités de centaines de petites mousses, de ma paire de jeans dont la fourche élimée va fendre d'un jour à l'autre. Les pantalons ont toujours été difficiles à trouver. Je suis une grande femme. Alors pour que le pantalon tombe bien, il me faut souvent prendre une taille au-dessus de la mienne et ça c'est quand la longueur est bonne. Bien souvent, en fait la plupart du temps, il manque tout de même un bon pouce pour que le vêtement couvre mes chevilles. Et quand enfin je déniche la paire rare, le temps a toujours raison du coton qui refoule lentement mais sûrement. Mais bon, une ou deux paires suffiront. Reste plus qu'à les trouver. Ma soeur G. m'a suggéré d'aller faire un tour chez Tilley sur Laurier. Leurs vêtements sont durables. Je suis curieuse de voir si je trouverai quelque chose là. Je me suis rendue chez Reitmans car G. m'a offert un certificat cadeau de cette boutique pour mon anniversaire parce qu'ils ont une section de pantalons longs. Malheureusement, les coupes des modèles disponibles ne me vont pas bien ou ne m'intéressent pas. Avec le certificat, je risque de m'acheter des lainages. J'ai y vu quelques belles vestes à gros boutons. Des collègues, dont ma soeur, m'ont suggéré de me faire faire des pantalons sur mesure. Je me dis qu'il faudrait plutôt que je mette à la couture.

Pour les jeans, je me suis rendue chez Gap parce que j'avais entendu parler de leur collection Red fabriquée en Afrique par des Africains et dont les profits des ventes sont réinjectés dans la société africaine. Une fois là, j'ai réalisé que la collection en magasin ne comportait que des t-shirts et des camisoles. Pas de jeans. J'ai bien failli faire un cadeau à M. cependant parce que les chandails en coton léger sont jolis, avec imprimés sur eux des mots incluant "red", du genre admi"red", treasu"red" ou inspi"red". Finalement j'ai décidé d'attendre et de lui montrer sur le net les différents modèles disponibles.

C'est chez Levis que j'ai trouvé la paire de jeans que je veux. Le célèbre faiseur de vêtements en denim offre maintenant une collection conçue à partir de coton biologique: Levis Eco. Ça revient à meilleur prix que d'acheter une paire de Mavi, qui eux aussi offre un modèle en coton biologique. Le hic, c'est que je devrai acheter ma paire de jeans par internet vu qu'ils n'avaient plus ma taille.

Puisque j'étais dans l'état d'esprit magasinage aujourd'hui, je suis allée faire un tour chez La Baie dans la section sous-vêtements parce que Elita propose une collection fait à partir de fibres de bambou, matière première qui se regénère rapidement et qui est transformée en un textile d'une douceur inouïe. Elita tient aussi une collection fait à partir de soya, mais quand on sait que le soya est une des trois plantes les plus génétiquement modifiées avec le maïs et le canola, il me semble que l'enthousiasme dégonfle.

Au final, même si je me suis aussi arrêtée faire un tour chez Rien à cacher, boutique de vêtements éthiques, biologiques et/ou équitables, pendant ma virée, ce ne sont que des ceintures en tissu vendues chez American Apparel, concepteur de fringues qui rénumère ses employés justement, en paquet de trois qui ont abouti dans mon sac à dos. Au moins, ma fameuse ceinture-cravate en lambeaux depuis deux semaines a trouvé sa relève. Reste plus qu'à dénicher mes vêtements que j'userai à la corde, promis, juré, craché.

10.23.2007

train-train

En écoutant Écrire à tue-tête: la constellation Plamondon sur la Première Chaîne, je constate à nouveau à quel point les hasards, les rencontres et le guts sont des ingrédients essentiels à la recette du succès. Idem pour l'histoire de Michel Beaudet et ses têtes à claques. Idem pour beaucoup d'oeuvres obscures qui arrivent dans la mire de l'oeil public parce que le timing est bon, pour ne pas dire parfait. Bien sûr, il faut que l'oeuvre ait les reins solides, qu'elle soit capable de supporter le regard jusqu'à l'usure, qu'elle soit transmetteuse à chaque fois de cette chose qui résonne dans le spectateur, de l'émotion qui fait vibrer l'aura pour créer une secousse dans l'enveloppe corporelle. Je ris, je pleure, j'ai des frissons, je reconnais mon amour présent ou celui perdu. L'art. Pour garder la nature humaine vivante, vibrante.

Cette nuit, en plein sommeil, l'odeur du liquide malodorant d'une mouffette qui attaque par les fesses m'a saisie. Mêlée à la pluie, à son humidité, l'odeur rance s'en trouva amplifiée. Je me suis dit: "La mouffette dont m'a parlée Kr., ma voisine arrière, vient d'attaquer un chat sur notre terrain." Et puis, je me suis rendormie. Après le petit-déjeuner, je suis descendue au sous-sol pour remonter le thermostat, histoire de couper le froid de la journée pluvieuse. L'odeur de la bête était telle que je me suis prise à penser que l'animal se terrait ici-même, dans un coin. Kr. m'a dit que la mouffette se nichait sous leur cabanon. M., qui est venu dîner avec moi il y a un peu moins d'une demi-heure, pense que l'animal a trouvé refuge sous notre balcon avant tellement l'odeur y est forte. Maintenant, il faut trouver un moyen pour la dissuader de s'y installer.

À part les écureuils gloutons et les mouffettes puantes, tout va encore bien pour nous au paradis. La semaine dernière, dans le beau soleil de l'automne réchauffé par une planète au climat déboussolé, j'ai rangé tous les meubles de terrasse et j'ai préparé le carré de notre jardin pour l'hiver en le tapissant d'une couche végétale des plants cisaillés. Je l'ai aussi gorgé de thé fertilisant. Finalement, j'ai y enfoui le cerisier offert par Od., le coiffeur de M. qui m'a rendu le plaisir d'une tête légère hier. Au dégel, quand le soleil s'élèvera tranquillement dans l'océan de la voûte qui nous surplombe, nous le transférerons dans un endroit qui deviendra le sien. Pour l'instant, nous ne l'avons pas déterminé ce lieu qui le verra fleurir à l'adolescence de nos enfants à naître. Reste plus que les bulbes du dahlia à sécher dans le cabanon afin que je les mette à l'abri dans le sous-sol en prévision de leur regénération au printemps prochain.

Et puis l'Halloween approche, et puis Noël aussi. Au travail, Nk. mon collègue et ami m'a demandé si je participerais à nouveau à Opération Nez Rouge cette année: oui bien sûr. Il y a aussi un concours de costume la semaine prochaine au onzième pour célébrer la fête des morts. Je ne vous dis pas en quoi je me déguise, c'est une surprise.

10.21.2007

5 %

Un dimanche après-midi pas mal après tout. Je dis ça parce que pendant une heure, nous avons été une maille d'une file indienne de véhicules se dirigeant vers le centre de la nature du Mont St-Hilaire, pare-chocs à pare-chocs, une voiture tournant de temps en temps dans le stationnement d'un verger en bordure. Notre objectif, c'était le sommet, rien de moins. Nous avons plutôt bu une bière dans une brasserie artisanale de Chambly et marché sur le bord d'un canal à l'eau grise. Qu'à cela ne tienne, le soleil resplendissant nous a quand même ragaillardi.

Il n'y a pas une route qui ne soit en construction dans notre belle province. C'est hallucinant. Les cônes striés orange et argent font maintenant partie du décor, au même titre que les érables, les cottages, les herbes touffues et hautes qui bordent les routes. Aujourd'hui, il nous a fallu faire un détour digne d'un labyrinthe pour arriver sur le chemin menant au mont et hier, nous avons zizagué dans les voies reconfigurées de la 15, sans mentionner le trafic monstre en rentrant parce que la 720 est était bloquée pour cause de réparation, bien sûr. J'imagine le touriste ici pour la première fois: "Putain, c'est vraiment le nouveau monde!"

Demain, c'est décidé, je passe sous le ciseau. Snip, snip. Mes cheveux raccourciront enfin. M., qui n'aime pas les cheveux courts, et moi avons pris une entente. Il a accepté parce que c'est son coiffeur qui s'exécutera sur mon coco. Peu m'importe vraiment, lui ou un autre, fais ça court, c'est tout. À ce sujet, l'émission de court-métrages à Télé-Québec est intéressante. Si vous tombez sur elle, regardez, ça vaut le moment.

Et parce que le salon de coiffure est situé rue St-Denis, j'arrêterai acheter un jeu de Tarot de Marseille au Valet de Coeur pour en avoir un sous la main, à la maison. Nous avons joué avec grand-maman hier et vraiment, ce serait agréable de renouer avec cette tradition de la partie de cartes qui a déjà fait partie de ma vie. À deux moments, ce jeu m'a divertie, moi et mes proches de l'instant. C'est un jeu stimulant et complexe. J'essaie de voir qui pourraient devenir nos partenaires. J'ai quelques idées, du genre des amis de M. qui habitent le coin ou encore ma belle-soeur et son nouveau mec. Ma soeur et son amoureux pourraient peut-être apprendre à jouer eux aussi. Enfin, je trouverai bien. Comme ce serait bien que ce jeu devienne un incontournable dans les chaumières. Un geste convivial et rassembleur.

Vraiment, cette bière était bien bonne: www.bedondaine.com .

10.19.2007

digression

Quand je sors pour marcher sur mon heure de dîner et que j'emprunte le petit chemin de pavé uni qui longe le bâtiment, mon regard remarque une première coccinelle écrasée, puis une autre, puis une flopée d'autres, anéanties, aplaties, baignant dans leur jus de bestiole. Hier, un de ces insectes qui porte chance s'est posé sur la fenêtre du onzième et je l'ai montré à mes collègues en honorant l'effort gigantesque qu'elle avait dû déployé cette coccinelle pour aboutir là, ci-haut, par le seul moyen de ces minuscules ailes picotées. Ces coccinelles sont oranges. Il me semble que celles d'il y a quelques années étaient rouges. Sans doute une autre espèce. Sans doute aussi une autre conséquence du réchauffement planétaire. Comme toutes ces guêpes errantes du mois d'août. Regardons bien le monde qui nous entoure parce qu'il ne ressemble pas à celui qui nous attend, c'est certain.

Alors, je vois les feuilles jaunes d'un arbre dont l'espèce m'est inconnu virevoltées dans un grand coup de vent par dizaines. Elles se détachent tels des confettis lancés sur le parvis de l'église. L'image est impressionnante. Mais autour de moi, personne ne semble remarquer ce moment fragile. C'est aujourd'hui, là, que cet arbre perd son panache et se prépare à sa dormance. Pas demain ni hier. Cet arbre-là se métamorphose live. Debout au coin de Wood et Maisonneuve, à deux pas d'une église aux airs gothiques, je l'observe avec déférence.

Une réflexion me vient à l'esprit. Je me souviens que dernièrement, j'ai dit à quelqu'un que je connais - je ne me souviens plus qui - que l'humain n'avait rien inventé. Toutes les couleurs et toutes les formes et tous les symboles et toutes les manifestations de quelque medium artistique que ce soit, tout ça nous vient de notre observation de la nature. Observation consciente, inconsciente, subconsciente, innocente, consentante, violente. L'art traduit la vie telle qu'elle bat dans les choses de la Terre. Même la science: la mécanique s'inspire des corps animaux; la physique tire les leçons des phénomènes naturels, la chimie aussi. La religion pour sa part a voulu séparer la création de l'acte de création pour qu'il y ait un début et une fin, un ordre. Un moyen de suivre une ligne directrice. Un filon pour le sens de l'existence. Justification de la souffrance surtout, mais bon, aussi reconnaissance du bon, du beau et du bien.

Je pense à tout cela et puis j'appelle mon ostéopathe pour annuler mon rendez-vous de mercredi. Revenir au plancher des vaches comme dirait ma mère, parce que je fais aussi partie du monde qui m'entoure et qui change, c'est certain.

10.16.2007

apprendre par coeur

Dans l'autobus ce soir, il y avait un adolescent plus vieux que jeune, vêtu de vêtements bouffants, armature des temps modernes. Il était affalé sur la banquette arrière, une de celles qui longent les parois. Son corps était étendu sur trois places bien qu'il soit bel et bien assis et non allongé. Je décidai de m'asseoir à côté de lui, les places étant de moins en moins nombreuses. Les "yos", ils ne m'intimident pas. Mais je sais que plusieurs n'osent les approcher. Alors, je prends place. Instantanément, il glisse une place plus loin que moi. Je n'en prends pas offense. Monsieur a besoin d'espace pour ses fringues surdimensionnées. Pauvre de lui. N'a-t-il pas compris que le bus se remplit toujours à cette heure? Que là où qu'il aille, il lui faudra partager sa précieuse bulle de dur à cuire. Et de fait, un dur à cuire plus mature, du genre plus sûr de lui, plus vrai dans ce qu'il émane, plus branché dans son énergie à cette source qui fait qu'on sait qu'il a vécu quelque chose qui le transforme en dur à cuire, eh bien lui, il s'asseoit à côté du dur à cuire de surface, du poser, de la coquille. Monsieur n'a pas le choix de se redresser et de se serrer dans une place, comme tous les autres, par contrainte civique.

Je comprends que l'on veuille être différent. Je le comprends parce que j'ai longtemps voulu être unique. Mais vouloir être unique et savoir qu'on l'est, c'est différent. Différent parce que souvent, il faut passer par cette volonté de se distinguer pour réaliser qu'on se distingue. Chercher en nous la particularité nous mène à la déceler chez l'autre et à l'apprécier. Et puis, à un moment, on s'éprend de ses variantes tant et tellement que l'on se décolle un peu de soi pour plonger dans le monde fantastique des possibilités sans fin. Pour revenir inexorablement à ce coeur qui bat, celui qui diminue son rythme à toutes les nuits, celui qui pompe, celui qui s'emporte quand on court, celui que l'on oublie tout le temps à part avant un moment décisif parce qu'il est le seul que l'on entend. Ce coeur, c'est ça qui nous distingue parce qu'il module toutes les sphères de ce qui nous compose, il est notre GPS dans l'univers. J'ai peur alors je suis. J'ai mal alors je suis. J'aime alors je suis. Rien de plus, rien de moins.

10.14.2007

arbre des pagodes

Oui, il y a encore dans la ville quelques arbres au feuillage vert parmi ceux aux teintes flamboyantes, tels les érables rouge cardinal ou ceux citron lime. La semaine dernière, j'ai décidé de changer mon itinéraire et de bifurquer vers la droite une fois en haut d'une pente dans Westmount, ville greffée à la montagne. J'avoue que je ne modifie pas souvent ma marche une fois lancée dans une direction. Il faut dire que je ne porte pas de montre, mais que les itinéraires que j'ai élaborés avec le temps sont parfaitement calculés selon que je suis partie pour une heure, une demi-heure ou même quinze minutes. Et donc, j'ai décidé de changer une de mes grandes marches d'une heure - celle qui grimpe - pour passer par l'ouest plutôt que par l'est. Et à un moment, je suis descendue par une rue et là, un arbre superbe s'élevait devant un bâtiment de jumelés. La bâtisse sans l'arbre n'aurait pas eu cette superbe. L'arbre s'élève si haut et ses branches remplissent l'environnement en fusant de toutes parts. Cet arbre est l'un des plus beaux que j'aie vus. Tellement libre, tellement équilibré. Ces feuilles en éventail cachent des fruits ronds. Il y a de plus petits spécimens ailleurs dans la ville, entre autre dans le parc Westmount.

Quand je repasse devant aujourd'hui parce qu'il m'a impressionné, je vois qu'il est encore tout vert. La saison froide n'a pas d'emprise sur sa sève semble-t-il. Je n'ose pas m'approcher de lui pour lui demander une feuille afin que je puisse l'identifier à la maison dans mon livre de plantes aromatiques et médicinales que Jl. m'a offert il y a quelques années et qui contient différentes espèces d'arbres. Je réfléchis et puis je me souviens que si je continue au parc, je pourrai prendre une feuille puisque les branches sont plus basses. De toute façon, leur forme est unique. Je pourrais la reconnaître parmi d'autres très certainement.

Arrivée sur le sentier qui mène au petit arbre, je remarque que les étangs sont asséchés. Des enfants courent dans les bassins de ciment où gît de l'eau qui n'a pas pu s'écouler. La semaine dernière, quand j'ai tenté cet itinéraire pour la première fois et que j'étais passée ici, des canards colvert s'épivardaient dans ces marres artificielles. Certains avaient le cul dans les airs, à la recherche de nourriture. Ils plongeaient à un angle de 90 degrés très net, souvent de façon synchronisée. J'ai ri en pensant que les humains avaient dû s'inspirer d'eux pour en venir à l'idée de la nage synchronisée.

Au pied de l'arbre, quelques feuilles reposent là, encore vertes pourtant. Je prends le spécimen le moins endommagé et je le fourre dans la poche de mon manteau. À la maison, il y a une quinzaine de minutes, je réalise que cet arbre que je trouve si beau est un gingko. Surprise. Un arbre chinois aux propriétés médicinales multiples pousse à Montréal. Je bois parfois des tisanes de gingko pour stimuler mon mental. Surprise. Il suffit de s'intéresser à la nature pour qu'elle nous remettre à notre place. Ici et maintenant. Il y a l'autre bout du monde.

10.12.2007

stocker

Je me suis coupée. Une entaille assez profonde en diagonale sur ma jointure centrale de mon majeur de la main droite, dans l'excédent de peau qui permet à l'ossature qui plie et se déplie de faire son boulot confortablement. Et puis, voyez tout ce qui a mené à cette éventuelle cicatrice.

C'est en manipulant le vide-pomme que j'ai acheté hier soir chez Ares - véritable paradis de tout cuistot - que c'est arrivé. L'outil traverse bien le fruit, mais pour y retirer le coeur cylindrique, c'est une autre histoire. Ça ne marche pas en poussant simplement, il faut impliquer un autre outil. J'ai tenté un petit couteau, mais j'ai plutôt vite opté pour le manche arrondi d'une petite cuillère. Cependant, même avec ce poussoir improvisé, ça donné le résultat pisse-le-sang. L'outil dormira dans le fond de mon tiroir à ustensiles, peut-être dans l'attente d'une vente de garage que nous mettrons en branle dans sept ans, quand le matériel inutilisé s'accumulera. Peut-être inventeront-ils l'outil complémentaire à celui que je possède? Peut-être que je le garderai pour le restant de mes jours parce qu'il n'y aura jamais de vente de garage parce qu'il n'y aura jamais assez de matériel inutilisé d'accumulé?

Ma soeur G. était avec moi quand j'ai déposé l'outil parce que mon corps avait une ouverture qu'il fallait boucher. Elle a été très réconfortante et très efficace. Elle m'a expliqué qu'il fallait que je nettoie la plaie avec du savon. Ensuite, le peroxyde a pétillé dans la coupure qui a gonflé. Elle a couvert le tout d'une compresse qu'elle a emprisonnée sous un serpent de ruban gommant médical. Le plus drôle, c'est que pas plus tard qu'hier soir, en revenant de chez Ares - véritable paradis de tout cuistot -, et en sautant à la chaîne Télé-Québec pendant une publicité à l'émission Tous pour un, je suis tombée sur la capsule premiers soins d'Une pilule, une petite granule. Une femme dans la quarantaine vêtue d'un uniforme d'infirmière blanc immaculé présentait des conseils pour traiter les différentes plaies et coupures. Pour une plaie comme la mienne, il me faudrait des points de rapprochement. Je n'en ai pas. Après l'écriture de ce message, j'appellerai M. pour qu'il arrête à la pharmacie sur le chemin du retour parce que le pansement que G. m'a fait commence à prendre une teinte rouge.

Tout ça parce que je voulais faire ma compote. Des accidents, ça arrive, c'est sûr. Et à l'heure où je vous écris, dix pots de liquide aux pommes reposent sur l'îlot dans la cuisine. Il me reste un gros sac de pommes. Je ferai une autre batch dans quelques semaines.

Ma soeur G. est venue pour apprendre à faire de la compote. Facile. Extra simple. En plus, avec les pommes bio, pas besoin de peler les fruits. Suffit de vider le coeur, couper en quartiers, mettre dans une casserole avec un fond d'eau, brasser jusqu'à ce que les fruits ramollissent et fondent, broyer directement dans la casserole avec un super bras Braun, empoter dans des contenants préalablement stérilisés - passés à l'eau bouillante - et le tour est joué. Délice sur rôtie beurrée en plein mois de février. Et en plus, la couleur est d'un joli rose appétissant à cause de la pelure. Dans une casserole, j'ai saupoudré de la cannelle. Dans l'autre, je n'ai rien rajouté. L'année dernière, j'avais même fait une version avec mélasse, qui avait bruni la compote, parce que je tripais sur ce liquide ferreux.

L'automne est bel et bien arrivé. Fini les pots. Fraises, bleuets, framboises, rhubarbe, pêches, tomates, pommes. Engrangés pour entendre le pop - champagne culinaire? - pendant les bleus de la saison morte. Et vivre une petite joie à tout coup.

10.10.2007

fan fini

M. est un gros dormeur. Capable de passer douze heures au lit. Les jours de semaine, quand le cadran sonne pour lui à 6 h 30, il appuie sur snooze pour étirer de 8 minutes son moment de détente. Enfin debout, ses yeux restent fripés pour une bonne demi-heure.

Ce matin, tout cela n'a pas tenu. Ce matin, le dernier album de Radiohead intitulé In Rainbows était disponible pour le téléchargement à partir de 6 h. Les yeux de ce gaga du groupe d'Oxford se sont ouverts à 6 h 01, sans beep beep du réveil-matin, avec la seule force de son subconscient. La preuve que l'Homme est capable de grande chose quand il le veut.

Installé à sa bombe d'ordinateur, il a enregistré une à une les dix chansons de l'album que le groupe a rendu disponible sur le net en échange, pour l'instant, d'une contribution volontaire. En effet, ces génies ayant décidé de ne pas renouveler leur contrat avec EMI, ils ont trouvé cette solution dans l'air du temps, tout en sachant que beaucoup achèteront leur album lorsqu'ils auront enfin déniché une maison de production répondant à leurs valeurs.

Des dix titres, seul un est vraiment nouveau pour les oreilles de M. Les arrangements des autres pièces constituent la véritable découverte pour mon amoureux. Lors de leur dernière tournée, Radiohead avait testé leurs chansons auprès des auditoires séduits à l'avance. M. ayant téléchargé plusieurs de leurs concerts à la recherche de ces perles inédites jusque-là, il ne lui restait plus qu'à apprécier les textures des mélodies mixées en studio.

Bientôt, M. recevra un coffret spécial qu'il a commandé sur le site-boutique du groupe: www.waste.uk. Si un jour je manque d'inspiration pour lui faire un cadeau, je sais que tant qu'il y a ce magasin virtuel, il y a de l'espoir.

10.08.2007

rendons grâce

Il existe un lieu à moins de cinq kilomètres de la frontière américaine où un pomiculteur d'origine grecque fait pousser des fruits magnifiques à la chair croquante gorgés de jus frais. Sans pesticide ni insecticide. Un verger biologique* et magique.



De la Cortland pour mes compotes.



De la Golden Delicious pour tous les jours, dans la boîte à lunch.



Il y avait aussi la Spartan presque violette tellement elle était rouge, la Gala orange et sucrée et d'autres variétés. Vous pouvez aller y cueillir jusqu'à la fin octobre.

* voir lien, Verger Maniadakis

10.07.2007

au fourneau

Chose promise, chose due. Je vous livre ma création culinaire.

Recette de moussaka réussie:

- 1 petite courge musquée
- 4 tiges de thym frais
- une pincée de sauge
- poivre et sel
- 1/2 t. de riz brun à grain court cuit (donc environ 1/4 t. avant cuisson)
- 1/2 t. de bouillon pour cuire le riz
- environ 1/2 t. de lait de soya
- eau de cuisson de lentilles + feuilles de laurier (jusqu'à texture désirée)
- 1/2 t. de lentilles vertes
- 3 tasses d'eau
- 2 feuilles de laurier
- 2 aubergines moyennes en rondelles
- gros sel
- 1 gros zucchini coupé en tranches (donc sur le sens de la longueur)
- Un demi oignon moyen en fines rondelles
- 1 grosse boîte de tomates en dés
- 1 gousse d'ail émincée
- basilic (environ 5 feuilles) + origan (feuilles d'une tige) frais hachés ou même herbes séchées peuvent faire l'affaire aussi, j'en suis certaine
- huile d'olive
- chapelure

Parfumer 1/3 t. d'huile olive bien chaude avec les tiges de thym dans poêlon en infusant quelques minutes.
Verser l'huile parfumée + thym dans le fond d'un pyrex assez grand pour accueillir les deux moitiés de la courge évidée des graines, face coupée vers le fond.
Piquer la pelure à plusieurs endroits à l'aide d'une fourchette, recouvrir d'alu et mettre au four à 350 jusqu'à ce qu'un couteau glisse dans le haut du col comme dans du beurre, donc environ 45 min à une heure.
Pendant ce temps, faites cuire votre riz dans le bouillon. Réserver.
Cuire les lentilles (jusqu'à tendreté) rincées dans environ trois tasses d'eau parfumée au laurier. Réserver.
Faire dégorger l'aubergine dans une tôle en saupoudrant les rondelles de gros sel.
Quand de l'eau perle sur les rondelles au bout de 20 à 30 min, rincez-les et faites-les revenir dans le poêlon huilé. Réserver.
Griller les tranches de zucchini dans le poêlon huilé. Réserver.
Dans une marmite, faites revenir la courge cuite et coupée en morceaux dont la peau a été pelée dans l'huile de cuisson en retirant le tiges de thym, ajouter le lait de soya, de l'eau de cuisson (environ 1 t. et demie à 2 t.) des lentilles, le riz et une pincée de sauge. Poivrer et saler. Broyer jusqu'à texture crémeuse. Réserver.
Dans une marmite, faites dorer l'ail dans 3 c. à soupe d'huile d'olive, ajouter tomates, lentilles, fines herbes. Laisser mijoter environ 15 min.
Dans un pyrex carré, commencer avec une rangée d'oignon coupé en fines rondelles, continuer avec une rangée d'aubergines, suivie des zucchinis. Napper le tout du mélange tomaté en utilisant une cuillère percée pour laisser écouler le jus. Poursuivre la construction de la moussaka avec une seconde rangée d'aubergines. Étendre une bonne couche de crème orange à la courge sur le dessus. Saupoudrer de chapelure et voilà, mettre au four pour environ 1 h 15 à 350, recouvert d'alu.
Attention, j'ai cochonné le fond de mon four parce que ça coule!

Déguster avec du fenouil citronné:

- 3 bulbes de fenouil coupés en deux, feuilles extérieures, tiges du haut poilues, fesses dures et coeurs retirés
- eau salée
- jus d'un citron
- zeste d'un citron
- 1 gousse d'ail coupée en deux
- 1 t. de bouillon
- 2 c. à soupe de beurre
- poignée de persil italien frais émincé

Plonger le fenouil dans l'eau salée bouillante pour dix minutes.
Égoutter.
Dans la marmite, mettre le bouillon, le jus de citron, le fenouil, le zeste, l'ail, le beurre et le persil.
Laisser mijoter pour une vingtaine de minutes dans marmite couverte.

J'avoue que je me suis lancée à fond. Mais la barre était haute pour Jl. qui me parlait toujours de ma gastronomie. Heureusement, le tout a bien tourné. Et puis, je ne vous ai même pas encore glissé un mot à propos du dessert que Tl., la fillette de deux ans et demi de Jl. et Tv, a dégusté avec gourmandise. Tant et tellement, qu'à la fin, elle a léché le fond de son assiette, au grand désarroi de son papa et tout à la fois, sous le regard attendri de sa maman. C'était une tarte choco-bananes dont je ne vous donne pas la recette parce qu'il faut bien que je me garde quelques secrets de commensale. Au plaisir.

10.06.2007

agape

Nougat le gros chat fait le scotch tape ce matin. Pendant que je vous écris, elle ronronne en boule sur mes cuisses, sa patte de velours droite étirée vers le clavier et son regard rivé sur mes doigts qui pianotent. Je me réveille tout juste. Je me souviens encore d'un bout de rêve, mais cette fois, je m'abstiens.

La semaine s'est terminée en beauté. Deux collègues amies, Cht. et Vr. m'ont offert mes cadeaux d'anniversaire. Vaut mieux tard que jamais que je dis toujours. Et vraiment, il fallait être folle pour décliner leur générosité. Les deux m'ont gâtée avec quelque chose de comestible. Quand l'appétit va, tout va.

D'abord, jeudi après-midi, Cht. a parcouru la ville de Van Horne à Laurier pour m'offrir en soirée deux pâtisseries, ses préférées, provenant de deux commerces différents. Dans la boîte, il y avait un prisme rectangulaire mousse choco-pistache tout simplement divin et une bombe mousseuse elle aussi, mais celle-là choco-framboise. J'ai fait ma gourmande et je les ai dégustées à la petite cuillère toutes les deux, l'une après l'autre. J'ai cru que mon foie allait claquer. En fait, c'était mon pancréas qui fonctionnait à toute allure. Mais parfois, l'excès qui pousse la machine est le bienvenu.

Cht. m'a aussi écrit un très beau mot, sur une carte qu'elle gardait depuis huit ans en attendant l'occasion pour l'offrir et sur laquelle, il y a d'écrit "lumière" en arabe, en volutes légères au coeur d'orange vif, couleur de flammes. Lumière chaude dans mon quotidien. Merci Cht. Tes gestes d'amitié sont délicieux pour une appréciatrice de l'Amour comme moi.

Hier soir, c'était au tour de Vr. de me gâter. Alors, un 5 octobre au soir, nous nous sommes installées sur la terrasse de Limòn situé sur la rue Notre-Dame, une enseigne où l'on sert des plats mexicains de qualité à des prix raisonnables. Notre heure de souper s'est étirée un peu, mais GM, notre patronne amie nous l'a accordé ce temps d'empiètement sur notre quart de travail. J'ai mangé un beau morceau de saumon cuit sur le gril et servi avec une sauce à base de graines de citrouille moulues, du riz, un bouquet de laitue mesclun et des asperges bien croquantes. En entrée, la guacamole était bien "limònée". Nous sommes sorties satisfaites de notre choix.

Et puis, c'est à moi d'offrir par l'estomac en fin de semaine. Mon amie Jl., son amoureux Tv. et leur fille Tl. viennent nous visiter dimanche. Pour le dîner, je planifie faire une moussaka, ma première à vie. Depuis quelques jours, je cuisine ce plat dans ma tête. Je vois les couleurs, j'imagine le mariage des textures, l'harmonie des assaisonnements. J'ai lu plusieurs recettes de ce plat à base d'aubergine. Dans ma version, il n'y aura pas de fromage, parce que M. s'évanouirerait de dégoût. Je tente un amalgame inspiré et la suite nous dira si ma création sera à la hauteur de leurs papilles. Si oui, je vous offre ma recette, promis.

10.04.2007

flashback

Discipline, quand tu me tiens. Tel que dit, tel que sera accompli. Aujourd'hui, aux environs de 14 h 30, j'estime que mes trois copies de manuscrit seront lancés dans le merveilleux monde de l'inconnu. Publiera, publiera pas. Reste à voir. N'empêche que si je reçois une lettre d'acceptation le 10 décembre, je ne pourrai m'empêcher de me mettre à genoux pour baiser la Terre en guise de reconnaissance. Voyez-vous, le 22 janvier 2005, je me suis réveillée d'un rêve tellement étrange que je n'ai pu faire autrement que de le noter.

Mon rêve débutait et j'étais en compagnie de trois filles et de trois garçons. Nous marchions dans une rue en terre battue. à notre droite, il y avait des maisons petites et similaires et devant elles, des échafaudages sur lesquels toutes sortes d'oiseaux venaient se percher. Le calme des oiseaux me fit comprendre que c'était l'hiver. Leurs plumages étaient couleur argent et bronze et leurs becs étaient longs comme des museaux minces de fourmiliers.

Nous parvenons à un parc et je suis le centre de leur séduction, des garçons et des filles. Je parle de conception de bande-dessinées avec une des filles et un garçon m'explique pour les oiseaux. Il me dit qu'ils viennent se corder lors de l'édification des perchoirs qui a lieu au moment d'une fête quelconque qui se déroule le 4 janvier. Je suis confuse. Je me demande si les oiseaux sont tous vivants ou s'il y a de faux spécimens parmi les corps entassés. Le garçon me dit qu'ils sont vivants.

Je quitte les garçons et les filles pour rentrer chez moi. Je fais des bises et le jeu de séduction est encore en cours. Chacun de mes compagnons cherche mes lèvres. Les baisers échangés sont lents et mouillés, mais chastes. Je réalise que les deux plus charmants, une fille et un garçon en particulier, ne sont plus là. Je les quitte. Je croise les deux disparus. Ils étaient allés au dépanneur.

Je marche et la nuit se lève. Il faut que je sois prudente parce que je ne suis pas passée souvent par ici. Pendant un moment, je marche au même rythme qu'un père et son garçon qui font du vélo avec tout le sérieux du monde. Je poursuis ma marche et la route pavée redevins terreuse. Des amoncellements de cailloux et des bouts d'asphalte déchiquetée sont semés sur mon parcours.

J'arrive à une fourche dans laquelle je m'engage. Je ressens une hostilité. Je suis maintenant dans une région boisée. Une bête rode. C'est un loup long qui me suit. J'accélère le pas. Il dévie sa course, mais revient en opérant une courbe qui raccourcit son trajet. Le loup a le visage blanc et des yeux bleus. Il est doux, sans une once d'agressivité. Le boisé prend fin et je réalise que j'étais dans un parc de chiens, un lieu de préservation de la faune. Une mère et sa fille pénètre le parc. Je me retourne et je vois un chien blanc qui a aussi les yeux bleus, mais il me montre ses gencives. Ce n'est pas un loup.

Une chorale est à ma gauche devant des maisons. Je continue de marcher. Je chante de façon orgueilleuse. Ma voix est belle, mais je trafique les paroles d'une chanson de Noël. J'arrive dans un quartier flanqué sur un plateau de montagne. Je descends une ruelle en pente. Tout en bas, un vieil homme à lunettes m'interpelle. Je réponds à ses questions et je fais la conversation avec lui tout en marchant. Peu à peu, je ressens une crainte vis-à-vis lui. Je suis dans un lieu de façades recouvertes de rectangles élevés de couleurs différentes. Des murs et des murs de pierres colorées et rectangulaires. L'homme me suit toujours. Je veux arriver chez moi le plus vite possible. Je suis prêt du but.

Je réussis à couper au travers mon trajet en survolant les murs de rectangles sans fin. Je comprends, parce que l'homme me le dit, que ce sont des échantillons énormes de pierres tombales. L'homme dit: "Les temps sont durs, plus personne ne veut mourir."

Je grimpe sur la cime des maisons à la recherche de la mienne. Tout à la fois, je fuis la présence de l'homme qui m'oppresse. Mais plus je fuis, plus je m'élève sur des maisons qui sont empilées les uns sur les autres. Il y a aussi des boîtes de carton formant des tours. Lorsque je réalise que j'ai le vertige, mais qu'il me faudra escalader à la baisse les parois afin d'arriver chez moi, le vieil homme réapparaît.

Je ne sais trop comment, mais c'est Dieu qui me parle et que je fuyais. Je lui demande pour mon écriture et il s'esclaffe comme si cette chose faisait partie de piètres pacotilles. Il me dit, en me montrant des coupes de champagne, que je dois faire attention à son effet, celui de l'alcool je présume, parce qu'il m'amène à chasser. Cela est néfaste et dangereux. À présent, Dieu est plus femme qu'homme. Il porte toujours les lunettes et elle a les cheveux blancs de la vieillesse, courts. Son visage est ordinaire, mais à peine ridé. Nous revenons à mon écriture et elle me lance "le 10 décembre" et dit que je serai publiée alors et que mon écriture causera un choc. Elle semble s'en réjouir gentiment. Je suis émue et débordante de joie. Dans mon rêve, Dieu m'a dit en parlant de mon écriture et de sa reconnaissance "c'est légitime".

Un, deux, trois: psychanalysez!

10.02.2007

empreinte

Encore une journée resplendissante. Le niveau du fleuve n'a jamais été aussi bas, les températures sont au-dessus de la normale, à chaque jour des tonnes de plastique sont enfouies dans les dépotoirs plutôt que d'être recyclées, mais vraiment, il faut continuer. Continuer d'apprécier les beautés simples de la nature. Continuer d'observer cette verdure grouillante et paisible.

Et pendant que je marche, maintenant citoyenne de la banlieue, je sais bien que je ne suis pas comme la citadine que j'étais, que j'utilise plus la voiture que je ne le faisais auparavant, que je participe d'une certaine façon à ce déploiement humain excessif puisque c'est ici que j'ai choisi de m'implanter, que je contribue au va-et-vient des véhicules sur les autoroutes quand je veux aller visiter à droite et à gauche. Mais on fait ce que l'on peut. C'est ce que je dis tout le temps. Personne ne peut être plus catholique que le pape. Je pose des gestes avec une conscience qui prend en compte plusieurs niveaux: la planète, les autres, moi et même ceux qui n'existent pas encore, les enfants. Quand j'achète une maison à St-Hubert-on-the-beach, ce n'est pas parce que je n'ai pas regardé à le faire sur l'île d'abord, c'est parce que nos porte-monnaies et nos valeurs se sont synchronisés là. Là où il y a l'autobus qui me transporte au travail, là où je peux marcher pour aller louer mes films ou acheter mes croissants (oui, oui, je peux y marcher, mais parfois, quand il pleut et que c'est dimanche matin et que j'ai envie de croissant, je prends la voiture). Là où Tau n'est pas trop loin. Là où M. peut se rendre à son travail à bord de Jasmine la Fit économique et peu polluante (mais polluante tout de même, je vous l'accorde) en dix minutes. Là où deux parcs immenses peuvent me servir de lit gigantesque quand il fait beau et que je veux suivre la course des nuages. Là où nous pouvons jardiner dans notre cour arrière. Là où je continue à lire Maison du 21e siècle, L'Itinéraire, Le Voir, le dernier numéro de Colors portant sur le développement durable de façon loufoque.

Tout ça pour dire que vivre selon ses valeurs, ce n'est pas toujours facile. Sincèrement, je crois que mon processus de réflexion précédant mon action tente du mieux qu'il ne le peux de considérer l'harmonie à respecter entre l'ensemble et l'élément. Je fais ce que je peux autant que faire se peut. Et vraiment, je peux beaucoup.